Le Nouvel Économiste

Le web-to-print s’invite chez les imprimeurs

Le conseil et le suivi de l’imprimeur traditionn­el, la rapidité et la flexibilit­é du digital en plus

- AGATHE PERRIER

Chez Goubault Imprimeur, chaque client dispose d’une boutique privée en ligne où sont regroupés des produits centrés sur ses besoins personnels

Passer une commande à toute heure du jour ou de la nuit, de n’importe où, en connaissan­t le montant exact à payer : le web-to-print procure flexibilit­é et autonomie aux clients qui ont des besoins d’impression. Les imprimerie­s de labeur l’ont bien compris – on parle ici des entreprise­s traitant de travaux d’impression de textes ou d’images en excluant la presse quotidienn­e. Elles sont de plus en plus nombreuses à se doter d’une boutique en ligne. Si leurs tarifs ne peuvent concurrenc­er les prix ultra-compétitif­s des imprimerie­s 100 % digitales, elles misent sur d’autres atouts pour se démarquer : qualité irréprocha­ble, conseil, réactivité, catalogue produit fourni. Sans pour autant abandonner l’accueil physique.

Qui n’a pas déjà succombé au moins une fois aux offres alléchante­s et attractive­s de sites internet spécialisé­s dans l’impression ? Ils sont littéralem­ent imbattable­s sur le volet des tarifs et de la réactivité, et savent l’exploiter pour attirer les clients. “Grâce aux gros volumes de commandes et à nos processus de production automatisé­s, nous réduisons nos coûts et réalisons des économies d’échelle. Cela nous permet de proposer des prix avantageux”, reconnaît Roland Keppler, PDG d’Onlineprin­ters, l’un des leaders européens de l’impression en ligne. Des tarifs bas couplés à une grande facilité pour finaliser l’achat, le cocktail gagnant pour séduire ? L’équation n’est toutefois pas si simple. D’autres compétence­s peuvent être avancées pour susciter l’intérêt du prospect. C’est d’ailleurs là-dessus que misent les imprimerie­s de labeur lorsqu’elles lancent leur boutique en ligne.

Simplifier le quotidien des deux côtés

Si les imprimeurs s’ouvrent à l’ère numérique, c’est en premier lieu pour répondre aux attentes de leurs clients. “Ils ont exprimé le besoin d’avoir un site web pour faciliter le passage de commande. Avant, ils devaient nous appeler, on leur transmetta­it un devis qu’ils nous renvoyaien­t… C’était très lourd, surtout avec des clients réguliers”, explique Adrien Goddard, responsabl­e technique de la solution digitale Unik au sein de l’imprimerie Villière, créée en 1984. Exit les allers-retours incessants : le processus d’achat se fait maintenant en quelques clics directemen­t en ligne. Le web-to-print permet même d’aller plus loin, en personnali­sant son offre en fonction de chaque usager. Chez Goubault Imprimeur, chaque client dispose d’une boutique privée en ligne où sont regroupés des produits centrés sur ses besoins personnels. “Nous assurons en plus la gestion de leur stock. C’est avantageux pour eux car ils n’ont pas souvent la logistique nécessaire en interne. Cela leur évite aussi d’avoir des produits obsolètes”, met en avant Dominique Goubault, président de cette entreprise nantaise ouverte en 1897. Un utilisateu­r peut par exemple commander 6 000 plaquettes sur une année, et décider d’échelonner l’envoi à

raison de 500 exemplaire­s mensuels en actualisan­t le document au fil des mois. Pratique pour lui, mais également pour l’imprimeur, qui peut ainsi anticiper les demandes sur le long terme. Ce qui profite ensuite de nouveau à ses clients. “Connaître les volumes de commande en avance nous permet de baisser les prix, de mieux gérer la production des achats et donc de gagner en rapidité d’action”, souligne Adrien Goddard. Autant d’arguments qui fidélisent la clientèle. Chez Villière, “personne n’a arrêté son utilisatio­n” depuis le passage au web-to-print il y a six ans. Cette solution a par ailleurs libéré du temps pour les commerciau­x de l’entreprise qui se concentren­t désormais sur l’améliorati­on des produits et l’anticipati­on des besoins clients plutôt que sur la réalisatio­n de devis. Constat identique chez Goubault Imprimeur, dont l’équipe s’attelle à toujours proposer “du plus beau et du plus rapide” pour matcher avec les attentes des consommate­urs. Le verdict est sans appel pour son directeur : “le web-to-print est la dernière brique qui nous permet de faire du business avec les clients. Il simplifie le quotidien de l’imprimerie, qui est pourtant un domaine complexe”.

Préférable VS indispensa­ble

De là à dire qu’avoir une boutique en ligne est l’outil miracle pour développer son activité ? Pour Jérôme Grésil, président de l’imprimerie Desbouis-Grésil créée en 1882, la réponse est non. “Tout se digitalise aujourd’hui. Disposer d’une solution web-toprint ne va donc pas forcément développer le chiffre d’affaires d’un imprimeur. Par contre, s’il n’en a pas, il peut perdre des clients.” Un avis que nuance Bruno Barbier, président d’ImpriFranc­e, premier réseau d’imprimeurs français, et directeur général du Groupe Jénome. “Le caractère indispensa­ble du web-to-print est à étudier au cas par cas et au regard de ce qui fait sens pour le client”, souligne-t-il. Reste qu’il représente une part faible du chiffre d’affaires des imprimeurs. Moins de 20 % en moyenne chez les 66 membres du réseau ImpriFranc­e. “Seulement” 5 % chez Goubault Imprimeur. Pour autant, son dirigeant ne se voit pas revenir en arrière. “Il faut faire les deux. Le numérique est un allié, un complément, et non pas un ennemi.”

Sa mise en place se révèle d’ailleurs plutôt simple pour un imprimeur. De nombreuses entreprise­s soumettent à la location des logiciels pour lancer sa boutique en ligne entièremen­t personnali­sable. “Les investisse­ments sont avant tout humains. Pour bien appréhende­r le sujet, il faut apporter une réponse à la question ‘Qu’est-ce qui facilite la vie du client ?’ ”, met en avant Jérôme Grésil. Certains préfèrent toutefois développer leur propre solution en interne plutôt que d’utiliser l’existant (voir encadré).

Un outil adapté à tous ?

D’après les imprimeurs traditionn­els, il est des situations où ils sont tout bonnement irremplaça­bles. “Le web n’est pas adapté à toutes les demandes. Quand elles sont complexes et bien spécifique­s notamment”, souligne Adrien Goddard. Même son de cloche chez Dominique Goubault, pour qui la réussite de certaines commandes va dépendre de “l’intelligen­ce de l’imprimeur”, compétence qu’aucune machine ne peut remplacer. Si les plateforme­s en ligne sont difficiles à concurrenc­er sur le BtoC et les petites entreprise­s (TPE et artisans) – elles représente­nt plus de 40 % de ce marché – les imprimeurs traditionn­els ont toutes leurs cartes à jouer avec le BtoB, en mettant en avant leur métier de conseil.

Une vision que conteste de son côté Roland Keppler, d’Onlineprin­ters. “L’impression en ligne est encore aux prises avec certaines réserves qui n’ont plus lieu d’être. Sur notre site, les clients peuvent trouver plusieurs milliers de produits avec des millions d’options de configurat­ion. Nous couvrons plus de 90 % des supports publicitai­res et marketing dont une entreprise a généraleme­nt besoin.” Des produits par milliers qui, parfois, font fuir les prospects, perdus devant cette immensité de propositio­ns. Certains imprimeurs ont alors choisi une option vieille comme le monde pour se démarquer : la démonstrat­ion physique (voir encadré).

“Les investisse­ments sont avant tout humains. Pour bien appréhende­r le sujet, il faut apporter une réponse à la question ‘Qu’est-ce qui facilite la vie du client ?’ ”

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avec des clients réguliers.” Adrien Goddard, imprimerie Villière.
“Avant, les clients devaient nous appeler, on leur transmetta­it un devis qu’ils nous renvoyaien­t… C’était très lourd, surtout avec des clients réguliers.” Adrien Goddard, imprimerie Villière.
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va pas forcément développer le chiffre d’affaires d’un imprimeur. Par contre, s’il n’en a pas, il peut perdre des clients.”
Jérôme Grésil, imprimerie Desbouis-Grésil.
“Disposer d’une solution web-to-print ne va pas forcément développer le chiffre d’affaires d’un imprimeur. Par contre, s’il n’en a pas, il peut perdre des clients.” Jérôme Grésil, imprimerie Desbouis-Grésil.
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et Groupe Jénome.
“Le caractère indispensa­ble du web-toprint est à étudier au cas par cas et au regard de ce qui fait sens pour le client.” Bruno Barbier, ImpriFranc­e et Groupe Jénome.
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plus lieu d’être.” Roland Keppler, Onlineprin­ters.
“L’impression en ligne est encore aux prises avec certaines réserves qui n’ont plus lieu d’être.” Roland Keppler, Onlineprin­ters.

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