Fabricant lettré d’artistes
Les MBA américains ont enregistré cette année une baisse de 7 % des candidatures, selon la GMAC (Graduate Management Admission Council). Un choc pour des institutions comme Harvard, Stanford ou Wharton : “Il est certain qu’ils ont pris un coup au moral, confie Benoît Banchereau, directeur exécutif des programmes MBA d’HEC. Habitués à un nombre de candidatures gigantesque, ils n’avaient encore jamais connu la baisse.” Surtout, ce phénomène concerne l’ensemble des établissements, souligne Virginie Fougea, directrice des admissions et des aides financières de l’Insead : “La baisse n’est pas relative, elle est bien visible et touche aussi bien les petites universités du Midwest que les business schools les plus cotées.”
Sur un marché aussi global et mondialisé que celui des MBA, on pourrait s’attendre à une baisse généralisée des candidatures à travers la planète. Or ce n’est pas le cas. Les MBA et executive MBA asiatiques poursuivent leur explosion, avec des hausses de candidatures en progression de près de 10 % par an (+9 % l’an passé selon GMAC), s’appuyant sur une forte demande de leur marché domestique. Quant aux MBA européens, gardant jalousement confidentiels les chiffres des candidatures qu’ils reçoivent, on l’assure : celles-ci demeurent stables.
Incertitude + bonne santé : le mauvais cocktail
Cette baisse d’attractivité des formations américaines a plusieurs causes. “d’abord, l’administration Trump fait planer l’incertitude et a durci les règles du jeu en matière de visa”, explique Benoît Banchereau. Le visa, un élément essentiel du succès des MBA. “Pour amortir un investissement de 200 000 dollars – tarif des programmes américains – il faut pouvoir bénéficier des salaires américains.” Un diplômé MBA touchera en effet plus de 150 000 dollars annuels aux États-Unis, quand sa rémunération dépasse rarement 100 000 dollars en Europe. Soit un retour sur investissement bien plus long à réaliser si on ne parvient pas travailler sur place. Or, la politique américaine actuelle ne joue pas en faveur des étrangers. En sortant de sa formation, un diplômé a le droit de travailler un an seulement aux États-Unis. Ensuite, si son entreprise veut l’embaucher, elle va se heurter à des complications car elle doit prouver qu’elle ne parvient pas à recruter un américain à sa place. “Un principe qui existait déjà mais s’est sensiblement durci ces dernières années”, observe Benoît Banchereau.
Cette tendance décourage inégalement les candidats. Le public chinois, par exemple, est moins freiné par ces mesures, la plupart des participants prévoyant de retourner en Chine une fois diplômés pour y occuper un poste. En revanche, elle freine les Indiens, plus nombreux à vouloir travailler quelques années sur place.
“Nous enregistrons clairement une hausse du nombre de candidatures venant d’Inde”, admet Phil Eyre, directeur des programmes MBA de GEM (Grenoble École de management). Quant au discours protectionniste de l’administration Trump, il n’est pas de nature à encourager les ressortissants
“Nous nous faisons disrupter à droite, à gauche et au milieu”, concédait récemment Susan Fournier, dean de Boston University, à ‘The Economist’.