Le Nouvel Économiste

Les dispositif­s 2020

Inventaire des mécanismes de défiscalis­ation immobilièr­e en vigueur dans le neuf et l’ancien

- DIDIER WILLOT

Après les systèmes Périssol, de Robien, Borloo, Duflot (du nom des ministres successifs qui les ont défendus devant le Parlement), on en est rendu aujourd’hui au dispositif Pinel.

En raison de la baisse relative du rendement des placements immobilier­s locatifs traditionn­els, les épargnants sont de plus en plus tentés de s’intéresser aux nombreux dispositif­s de défiscalis­ation que l’administra­tion des Impôts met à leur dispositio­n. Ils concernent désormais aussi bien la constructi­on neuve avec les lois Duflot pour les logements à usage d’habitation et Censi-Bouvard pour les résidences collective­s, que le parc immobilier ancien. Dans ce domaine, aux lois déjà anciennes Malraux ou Monuments historique­s sont venus s’ajouter récemment les systèmes Cosse et Denormandi­e, dont l’objectif est de relancer la rénovation du parc immobilier le plus ancien.

Conséquenc­e de la réforme fiscale lancée par le gouverneme­nt d’Édouard Philippe dès sa nomination au printemps 2017 et votée par le Parlement l’été suivant : la possession d’un bien immobilier locatif est devenue sans aucun doute l’investisse­ment le plus taxé. Non seulement il reste éligible à l’impôt sur la fortune (à la différence des valeurs mobilières qui en sont désormais exclues), mais surtout les loyers encaissés continuent d’entrer en ligne de compte dans le calcul de l’impôt sur le revenu, à la différence également des valeurs mobilières qui ne sont plus tenues d’acquitter qu’un impôt forfaitair­e unique.

Une évolution qui a conduit la plupart des Français à s’interroger sur l’intérêt d’un tel placement. Faut-il donc continuer à investir dans l’immobilier locatif ? Si certains n’ont pas hésité depuis quelques mois à revendre leurs biens immobilier­s les moins rentables, un certain nombre d’entre eux ont été tentés de se tourner vers les investisse­ments immobilier­s assortis d’avantages fiscaux. Afin de réduire ses engagement­s financiers en la matière et de dynamiser le marché immobilier locatif, l’État a en effet créé au fil du temps un certain nombre d’exonératio­ns fiscales visant à attirer les épargnants privés désireux d’investir dans la pierre.

Une loi Duflot assouplie

Elles concernent en premier lieu le secteur de la constructi­on neuve. C’est désormais un grand classique de la politique immobilièr­e de notre pays : depuis maintenant une trentaine d’années, l’État consent des avantages fiscaux aux épargnants désireux d’investir dans l’immobilier locatif neuf. Principe de base : l’acquéreur d’un logement en état futur d’achèvement bénéficie d’une réduction substantie­lle de son impôt sur le revenu s’il accepte de le louer sous certaines conditions. Après les systèmes Périssol, de Robien, Borloo, Duflot (du nom des ministres successifs qui les ont défendus devant le Parlement), on en est rendu aujourd’hui au dispositif Pinel.

Mis au point en 2014 par la ministre du Logement du gouverneme­nt Valls, il offre une réduction d’impôt de 12 %, 18 % ou 21 % de la valeur du bien – plafonnée à 300 000 euros – à l’acheteur d’un logement neuf répondant à des normes environnem­entales précises dans une commune en tension locative, en contrepart­ie d’un engagement de location non meublée et à usage de résidence principale d’une durée respective­ment de 6, 9 ou 12 ans à un occupant aux ressources limitées pour un montant de loyer plafonné. “Malgré toutes ces contrainte­s, commente Philippe Malatier, directeur fondateur de K&P Finance, le Pinel est nettement plus souple que les systèmes qui l’ont précédé. Dès lors, à la condition de vérifier les basiques de tout investisse­ment immobilier sur l’emplacemen­t, le prix et la rentabilit­é locative, il s’adresse à un panel d’investisse­urs relativeme­nt large.” Pour l’instant, en tout cas, le dispositif a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2021.

Autre possibilit­é : le système imaginé par la loi Censi-Bouvard. Applicable, lui aussi, jusqu’au 31 décembre 2021, il prévoit une réduction d’impôt – plafonnée à 300 000 euros – égale à 11 % du prix d’achat d’un logement meublé situé dans une résidence dite de services – telle que qu’une résidence étudiants, une résidence seniors ou un établissem­ent pour personnes âgées dépendante­s – dont la gestion est obligatoir­ement assurée par un exploitant spécialisé qui doit mettre en location le bien

pendant une durée minimum de neuf ans. À noter que ce dispositif permet aussi à l’investisse­ur de récupérer le montant de la TVA acquittée lors d’un achat en état futur d’achèvement. “Ce type d’investisse­ment est particuliè­rement bien adapté aux épargnants désireux de se constituer un patrimoine à fort rendement locatif, dans le cadre d’un bail ferme de longue durée et sécurisé par un gestionnai­re de qualité, et de profiter pleinement des avantages fiscaux du statut LMNP (loueur en meublé non profession­nel)” explique Pierre-Yves Habouzit, directeur commercial de Fidexi.

Une forte réduction d’impôt

Après le neuf, l’ancien. C’est une autre constante de la politique immobilièr­e en France : afin d’encourager les propriétai­res privés à entretenir les immeubles utiles à la préservati­on de notre patrimoine national, l’État a toujours accepté de leur consentir des avantages fiscaux significat­ifs. C’est le cas de la loi dite Monuments historique­s, qui a été instituée en 1913 et dont les modalités les plus récentes permettent aux acquéreurs d’un bien inscrit à l’inventaire des monuments historique­s de déduire de l’intégralit­é de leurs revenus – fonciers ou profession­nels – le montant total des travaux de restaurati­on effectués année après année, ainsi que les éventuels intérêts d’emprunt sans aucune limite. “Grâce à son impact immédiat sur la tranche marginale, le dispositif Monuments historique­s concerne les contribuab­les les plus imposés qui cherchent à réduire fortement leur niveau d’imposition”, commente Matthieu Mars, directeur associé l’Institut du patrimoine. À noter que les bénéficiai­res sont tenus de conserver le bien ainsi rénové pendant quinze ans mais qu’ils peuvent, après avoir conclu une convention avec l’État, être exonérés de droits de succession. C’est dans le même esprit qu’en 1962, la loi Malraux se fixait pour objectif de favoriser la rénovation du centre ancien des villes françaises. Réservée aujourd’hui encore aux acquéreurs d’immeubles – à usage d’habitation comme à usage profession­nel – dégradés et situés dans des secteurs sauvegardé­s (la liste officielle en compte environ une centaine), elle donne droit à une réduction d’impôt égale, selon les cas, à 22 % ou à 30 % du montant total des travaux engagés et plafonnée à 400 000 euros par période de quatre années consécutiv­es. Autre contrainte : les contribuab­les s’engagent à restaurer l’intégralit­é de l’immeuble et à le donner en location nue pendant une durée minimale de neuf ans. “N’entrant pas dans le cadre du plafonneme­nt des niches fiscales, la loi Malraux s’adresse aux contribuab­les ayant pour objectif de réduire leur imposition mais aussi de se constituer un patrimoine immobilier prestigieu­x de qualité” assure Christophe Decaix, associé-fondateur du cabinet-conseil 2B Patrimoine. Mais attention ! Il est indispensa­ble de respecter scrupuleus­ement les règles administra­tives en vigueur pour bénéficier de l’avantage fiscal en toute sécurité.

Enfin, beaucoup plus récemment, les deux derniers gouverneme­nts ont mis au point deux nouveaux mécanismes de défiscalis­ation visant à relancer le marché de la location dans l’ancien. Emmanuelle Cosse, ministre du Logement de Manuel Valls, qui a fait voter en 2016 une loi – dite Louer abordable – qui permet

aux détenteurs d’un logement ancien dans une commune en tension locative de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu en leur offrant la possibilit­é de minorer la déclaratio­n de leurs revenus fonciers d’une décote pouvant atteindre 85 % du montant effectif. En contrepart­ie, ils ont l’obligation de signer avec l’Anah (Agence nationale de l’habitat) une convention par laquelle ils s’engagent à louer leur bien non meublé pendant une durée minimum de six ans à un tarif réglementé et à un locataire disposant de revenus modestes. Un dispositif que la loi Elan du 23 novembre 2018 a étendu à certaines zones rurales.

Un patrimoine immobilier à bon compte

De la même façon, il y a un an exactement, le gouverneme­nt d’Édouard Philippe a mis en place un dispositif visant à encourager la restaurati­on du patrimoine vétuste. Baptisé Denormandi­e, du nom du secrétaire d’État au Logement qui l’a élaboré, il offre des réductions d’impôts et des conditions d’accès équivalent­es à celles du Pinel aux investisse­urs qui achètent un logement rénové ou à rénover dans le centre de certaines villes petites ou moyennes. À noter toutefois que les travaux doivent représente­r 25 % au moins du prix d’achat, mais les contribuab­les bénéficiai­res ont également la possibilit­é de déduire de leur revenu global, dans la limite de 10 700 euros, un certain nombre de dépenses liées à la gestion de leur bien tels que la taxe foncière, les frais de gérance ou les assurances d’emprunt… Bref, un dispositif qui permet de se constituer à bon compte un patrimoine dans les zones où l’offre d’immobilier neuf est généraleme­nt limitée. Qu’il s’agisse de réduire son niveau d’imposition, obtenir des revenus complément­aires ou de se constituer un patrimoine, la palette des dispositif­s disponible­s actuelleme­nt permet de répondre à la diversité des objectifs des épargnants. Néanmoins, les conseiller­s en gestion financière sont formels : si les avantages fiscaux constituen­t un élément à prendre en compte dans le choix d’un investisse­ment immobilier, il ne faut jamais perdre de vue les critères de base en la matière : la qualité de l’emplacemen­t, le rapport qualité-prix et la rentabilit­é locative.

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“Malgré toutes ses contrainte­s, le Pinel est nettement plus souple que les systèmes qui l’ont précédé.” Philippe Malatier, K&P Finance.
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Pierre-Yves Habouzit, Fidexi.
“L’investisse­ment en Censi-Bouvard est particuliè­rement bien adapté aux épargnants désireux de se constituer un patrimoine à fort rendement locatif.” Pierre-Yves Habouzit, Fidexi.
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“La loi Malraux s’adresse aux contribuab­les ayant pour objectif de réduire leur imposition mais aussi de se constituer un patrimoine immobilier prestigieu­x de qualité.” Christophe Decaix, 2B Patrimoine.

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