Le Nouvel Économiste

Le temps de l'intelligen­ce émotionnel­le

La transforma­tion de l’entreprise passe d’abord par celle de ses managers

- PATRICK ARNOUX

Empath vité. To manage d’origine sur lequel la science a depuis peu tant de nouvelles choses à dire: le cerveau Si actuelleme­nt, l'entreprise et son management ont un radical besoin de transforma­tion, celle-ci passe impérative­ment par un pré alable: la remise en cause drastique Le vieux des dirigeants modèle forgé ! par le top-down, l'autorité, le secret le command/contrôle a vécu. Plutôt mal. Donc il est imperative que le manager se transforme lui-méme.

rosciences q lui donnent des outils pour mener à bien cette mue. Les ” devienlant­s, à leaders” Ce qui rieux travail sur soi, au prix de quelques remises en cause. Vaste chantier personnel...

L’entreprise est en chantier collectif. Conséquenc­e d’un diagnostic accablant pointant un gâchis humain et économique: plus d’un salarié sur deux se dit démotivé, trois sur quatre se sentent stressés, plus de deux cadres sur trois ne se sentent pas reconnus à leur juste valeur… selon une étude Gallup de 2013. L’entreprise a donc besoin d’être réinventée, transformé­e pour devenir “agile”, “marguerite”, “positive”… Quelle que soit la méthode, elle doit changer radicaleme­nt de culture, grâce à des leviers et outils que propose la révolution digitale. Le profil classique du manager, ce super-héros omniscient, hier chef d’orchestre de process dé-responsabi­lisants et démotivant­s, est sérieuseme­nt remis en question. Pourtant, nombre de dirigeants restent figés dans des postures managérial­es en décalage avec les attentes de ces nouveaux modèles d’entreprise. À mille lieues de ce vieux schéma hiérarchiq­ue “command and control” si répandu. Exactement le contraire de ce dont les organisati­ons ont aujourd’hui besoin: des managers-coach-leader.

La maxime de Montaigne à la rescousse

Ce qui indique à quel point les managers actuels doivent eux aussi se transforme­r. Dans un premier temps, il s’agit d’appliquer scrupuleus­ement la maxime de Montaigne “Connaistoi toi-même”, et donc de faire un important travail sur eux-mêmes, sur la maîtrise de leurs émotions afin de pouvoir décoder celles de leur équipe. Les grandes écoles et autres université­s ne les ont en effet jamais vraiment initiés à ces “soft skills” – empathie, leadership, créativité, travail en équipe – si vitales aujourd’hui. Toutes dépendent d’une meilleure utilisatio­n du responsabl­e qui pilote les comporteme­nts, le cerveau ! Le travail sur soi pour le meilleur profit des autres. “Un leader capable d’exprimer des qualités humaines d’attention et d’authentici­té induit de la confiance, de la motivation et de l’engagement de la part de son équipe” explique un manager de Sanofi.

Alors mieux vaut apprendre à identifier et mettre à distance ses biais cognitifs, ses schémas mentaux, ses blocages et ses routines neuronales, qui sont autant de freins à l’écoute empathique, pour tenir les promesses de ce “neuromanag­ement” qui prend en compte les ingrédient­s majeurs de l’univers du travail : autonomie, responsabi­lisation, engagement, confiance, coopératio­n, empathie.

Or, c’est plus que jamais nécessaire, si l’on en croit les chercheurs en neuroscien­ces de la McMaster University de l’Ontario qui affirment que le pouvoir affaiblit en fait les facultés de compréhens­ion, du fait du déclin de l’activité des neurones miroirs qui jouent un rôle dans l’empathie, chez ceux qui sont investis d’une forme d’autorité.

Les sciences cognitives s’invitent dans le management

Voilà quelques années qu’en mobilisant les ressources et avancées dans trois domaines – la psychologi­e positive, les neuroscien­ces cognitives et la pleine conscience (une technique de méditation permettant de placer les choses à distance) –, Yves Le Bihan, chroniqueu­r de la Harvard Business review et auteur du livre “Le leader positif” chez Eyrolles, a formé plus de 1 200 dirigeants et managers pour en faire des “leaders positifs” (voir encadré). Après avoir transformé et amélioré le monde de l’éducation, les sciences cognitives s’invitent dans le management. Des managers se forment en effet aux neuroscien­ces, nouveau levier de transforma­tion des entreprise­s. Ces neuroscien­ces offrent des clés d’analyse inédites sur le fonctionne­ment cérébral, notamment grâce à la découverte des concepts de neuroplast­icité de neurones miroirs (catégorie de neurones du cerveau qui présentent une activité aussi bien lorsqu’un individu (humain ou animal) exécute une action, que lorsqu’il observe un autre individu (en particulie­r de son espèce) exécuter la même action, ou même lorsqu’il imagine une telle action – d’où le terme de miroir), de processus conscients et inconscien­ts, de flexibilit­é mentale, etc.

L’intelligen­ce émotionnel­le, nouvelle clé des organisati­ons

Eh oui, les money-makers changent de profil à vitesse V, au gré de la transforma­tion globale de leur organisati­on – et grâce aux derniers apports des sciences cognitives. C’est en effet le cerveau qui est optimisé grâce à ces neuroscien­ces qui travaillen­t sur la cognition (langage, mémoire, raisonneme­nt…). “Les neuroscien­ces permettent de revisiter ou de valider des techniques que l’on connaissai­t déjà, comme les exercices d’entraîneme­nt mental, et d’identifier les biais cognitifs qui altèrent nos décisions” explique Yves Le Bihan. Elles permettent à chacun de travailler sur la nouvelle clé des organisati­ons : l’intelligen­ce émotionnel­le. Si la plupart des grandes écoles ont intégré dans leurs cursus l’optimisati­on des soft skills, les managers actuelleme­nt aux responsabi­lités n’ont pu profiter de ces avancées des sciences comporteme­ntales. La seule évocation du leader positif pourrait rendre au mieux dubitatif, au pire narquois voire sceptique devant ce qui pourrait passer pour de l’optimisme béat. Pourtant, il s’agit bien de travailler sur soi, sur la maîtrise des émotions et surtout d’optimiser l’utilisatio­n de son cerveau.

Face aux défis de l’intelligen­ce artificiel­le, les managers affûtent sa version humaine qui possède un vaste potentiel de progressio­n. Le cerveau en effet n’est pas multitâche et son hyper-sollicitat­ion peut brider son efficacité.

L’ hyper connaissan­ce oblige à la connaissan­ce de soi

“Dans un monde profession­nel où les repères se diluent, savoir qu’on peut compter sur le cerveau est rassurant, s’enthousias­me Yves Le Bihan, également fondateur de l’Institut français du leadership positif (IFLP). Nous rentrons dans l’ère de l’hyper-connaissan­ce, cela implique également une meilleure connaissan­ce de soi en tant que manager.”

Sans recourir à ces avancées scientifiq­ues, avec une approche plus pragmatiqu­e, Yves de Montbron, consultant et conférenci­er, se fait l’apôtre de l’optimisme en entreprise, plus particuliè­rement pour la motivation des managers. “Ils doivent énergiser, enthousias­mer leurs collaborat­eurs. L’optimisme est une bonne façon d’y parvenir grâce à une approche bienveilla­nte. Il s’agit en fait de capitalise­r sur les points forts de chacun au lieu de focaliser sur ses points faibles, comme cela se fait traditionn­ellement depuis l’école” explique ce conférenci­er “optimiste” qui porte cette bonne parole à la Société Générale, chez Accor et dans bien d’autres grands groupes à travers la France. “Depuis toujours, on est exigeant sur les points faibles et tolérant sur les points forts ; un manager optimiste fait exactement l’inverse. D’ailleurs, toutes les grandes réussites – hommes politiques, acteurs, grands patrons – sont basées sur ce principe.”

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"C'est le cerveau qui est optimisé grâce à ces neuroscien­ces qui travaillen­t sur la cognition (langage, mémoire, raisonneme­nt...). Elles permettent à chacun de travailla sur la nouvelle clé des organisati­ons: l'intelligen­ce émotionnel­le"
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sur la nouvelle clé des organisati­ons: l’intelligen­ce émotionnel­le”
“C’est le cerveau qui est optimisé grâce à ces neuroscien­ces qui travaillen­t sur la cognition (langage, mémoire, raisonneme­nt…). Elles permettent à chacun de travailler sur la nouvelle clé des organisati­ons: l’intelligen­ce émotionnel­le”

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