Effet domino sur le commerce parisien
Cinq années de turbulences sociales et d’évolution des modes de consommation viendront-elles à bout des commerces indépendants ?
Que le Parisien se rassure. Avant que sa ville n’emprunte le chemin de certaines communes françaises en proie à la désertification de leur centre-ville, il y a de la marge. Une marge confortable même, puisque l’une des spécificités de la capitale est sa densité exceptionnelle de commerces et services commerciaux.
Depuis le début des années 2000, l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) observe et renseigne régulièrement l’état des commerces parisiens et leurs évolutions. D’après les derniers chiffres disponibles, ceux de 2017, l’offre commerciale de la capitale est composée de 62 507 commerces et services commerciaux. Un chiffre qui traduit une densité importante en termes de commerces par habitant – 28 pour 1 000 habitants – ou encore rapporté au linéaire de voies – 4,3 commerces pour 100 m de voies. À titre de comparaison, l’Apur fait remarquer que ces plus de 60 000 commerces “représentent 58 % de la totalité des commerces recensés dans la Métropole du Grand Paris, pour seulement 13 % du territoire et 33 % de la population”. Tout va bien, donc, dans le meilleur des mondes ? Pas vraiment.
Tandis que la campagne pour les élections municipales bat son plein, la situation dans laquelle se trouvent les commerces franciliens devient objet de débat. Au point qu’un candidat, Benjamin Griveaux, propose de mettre en place un “plan Marshall” pour le commerce. Celui-ci passerait par la création d’une “cellule d’urgence commerciale sous l’autorité de chaque maire d’arrondissement” pour répondre aux commerçants “concrètement et plus rapidement pendant les périodes de crise”. Le candidat LREM verrait bien également la création d’un “fonds de solidarité commerçants”, doté de 15 à 20 millions d’euros. Pour la maire et candidate à sa réélection Anne Hidalgo, la question du soutien aux commerces de proximité est aussi un axe de campagne.
Commerce indépendant p au gré des tempêtes sociales
Bien que le nombre de commerces et services commerciaux soit stable depuis 2014, les cinq dernières années ont largement affecté ces petits commerçants. Des attentats de 2015 aux mouvements sociaux contre la réforme des retraites, en passant un an de mobilisation hebdomadaire des gilets jaunes, le constat est lourd. Interruption d’activité, baisse de chiffre d’affaires, dégradations : une décélération a été observée depuis la fin de l’année 2018. Or les trois quarts des commerces parisiens sont tenus par des commerçants indépendants, qui par définition ont une marge de manoeuvre plus restreinte. C’est pourquoi à la fin de l’année 2019, la chambre de commerce et d’industrie Paris Ile-de-France a appelé à “un plan d’urgence pour les commerçants, les restaurateurs et les hôteliers parisiens”. Une urgence selon la CCI, afin de préserver le commerce indépendant. “Ces perturbations ont un effet domino sur l’ensemble de l’écosystème francilien : commerce, filière touristique, congrès et salons”, selon la chambre. Une situation qui pourrait ruisseler sur l’attractivité d’une capitale qui “commence à connaître de sérieuses difficultés”, complète la CCI. Selon un sondage mené par la chambre de commerce, 93 % des commerçants parisiens interrogés notent un impact de la grève sur leur activité économique, et 96 % déplorent une baisse de chiffre d’affaires.
Mono-activité et retour des grandes surfaces en centre-ville
Mais en plus des problèmes conjoncturels auxquels font face les commerçants, viennent s’ajouter ceux liés à des tendances plus profondes. Bras armé de la mairie de Paris dans le domaine commercial, la Semaest, société d’économie mixte la ville, mène depuis 2015 une action pour maintenir ou faire revenir les commerces en pieds d’immeubles. Car si Paris possède une offre commerciale exceptionnelle, certains quartiers sont eux en proie à la mono- activité, ou pire encore à l’augmentation de la vacance commerciale. Depuis 2017, la ville de Paris a mis en place un “contrat Paris commerce”, qui permettra à la Semaest de déployer son action de préemption dans 12 nouveaux secteurs prioritaires. Aujourd’hui, la Semaest maîtrise plus de 650 locaux. Une action qui a, selon les chiffres disponibles, permis d’augmenter de 38,8 % le nombre de commerces alimentaires de détail, et de 12,6 % celui des activités de proximité ( commerces alimentaires et commerces de services) dans ces quartiers cibles. Car selon Emmanuelle Hoss, directrice générale de la Semaest, le commerce de proximité, en plus d’affirmer la singularité d’un quartier, est un “facteur d’attractivité et de dynamisme économique”. Outre ces zones grises commerciales qui mitent la capitale française, les commerces font désormais face au retour des grandes surfaces dans le centre- ville. Si le dernier projet en date, le réaménagement de la gare du Nord et l’extension de sa surface commerciale, a suscité la polémique, les établissements de plus de 1 000 m ² font depuis cinq ans leur retour sans trop de bruit. Ainsi selon l’Apur, entre 2015 et 2019, 37 nouveaux établissements de 1 000 m² ou plus sont apparus sur le territoire métropolitain. Ce qui représente une progression d’un peu plus de 4 % des effectifs. Une augmentation dont près de la moitié s’est faite sur le territoire de Paris avec 17 nouveaux établissements. Une nouvelle concurrence pour les commerces indépendants.
“Ces perturbations [les mouvements sociaux] ont un effet domino sur l’ensemble de l’écosystème francilien : commerce, filière touristique, congrès et salons”, selon la CCI
dont la superficie excède certains seuils (TSBCS ; CGI, art. 231 ter). Cette taxe est due par les personnes privées ou publiques propriétaires de locaux imposables ou titulaires d’un droit réel sur de tels locaux.
Les tarifs de la taxe sont définis au mètre carré en fonction de la catégorie de locaux et de leur localisation, avec jusqu’à présent trois circonscriptions. La première comprend Paris et le département des Hauts-de-Seine, la seconde les autres communes de l’unité urbaine de Paris et la troisième les autres communes d’Île-de-France.
À noter : les tarifs sont actualisés au 1er janvier de chaque année en fonction de la prévision de l’indice des prix à la consommation, hors tabac, retenue dans le projet de loi de finances de l’année.
L’article 18 de la loi de finances pour 2020 définit une nouvelle zone, issue de la division de la première circonscription, regroupant des arrondissements de Paris et plusieurs communes des Hauts-de-Seine considérés comme particulièrement attractifs pour les locaux à usage de bureaux.
À compter du 1er janvier 2020, la région Île-de-France est ainsi découpée en quatre circonscriptions :
– 1re circonscription (dite “premium”) : 1er, 2e, 7e, 8e, 9e, 10e, 15e, 16e et 17e arrondissements de Paris et les communes suivantes : Boulogne-Billancourt, Courbevoie, Issy-les-Moulineaux, Levallois-Perret, Neuilly-sur-Seine et Puteaux ;
– 2e circonscription : autres arrondissements de Paris et les autres communes des Hauts-de-Seine ;
– 3e circonscription (ancienne 2e circonscription) : communes de l’unité urbaine de Paris autres que Paris et les communes des Hauts-de-Seine ;
– 4e circonscription (ancienne 3e circonscription) : autres communes d’Île-deFrance.
Actualités du droit - 24/01