Le Nouvel Économiste

Invasion de “memes” aux États-Unis

Les candidats rivalisent de messages originaux sur la toile et les réseaux sociaux

- TRUMP POWER, ANNE TOULOUSE

Si vous n’êtes pas familier avec le terme “meme”, prononcer “mime”, il va falloir vous y habituer, c’est le nouveau gadget des campagnes électorale­s américaine­s. Et comme il se doit, le premier utilisateu­r est celui qui se veut à la pointe du progrès, Michael Bloomberg. Il vient d’adjoindre à sa campagne “Memer 2020”, dont la spécialité est de manipuler l’image d’un personnage sur les réseaux sociaux. Un meme est un message qui devient “viral” c’est-à-dire qui se répand comme un virus sur Internet. “Meme” vient de “mimétisme” et utilise le caractère moutonnier propre à la nature humaine en créant une tendance.

Un meme est un message qui devient “viral” c’est-à-dire qui se répand comme un virus sur Internet. “Meme” vient de “mimétisme” et utilise le caractère moutonnier propre à la nature humaine en créant une tendance

Les “memers” sont des influenceu­rs au plus haut niveau de la technologi­e. Leurs messages au second degré peuvent paraître hermétique­s à ceux qui ne sont pas familiers avec le langage des différents supports, comme Instagram, mais cela marche, puisque cela se vend et même cher. Michael Bloomberg, qui a 60 milliards de dollars à la banque et qui a déjà investi près de 400 millions dans sa candidatur­e, peut se permettre ce genre d’exploratio­n.

Bernie Sanders, un “meme” à lui tout seul

À l’autre extrémité du spectre de la mouvance démocrate, Bernie Sanders assure qu’il est parfaiteme­nt capable de créer un courant de société par lui-même, et les événements lui donnent raison: il est un “meme” à lui tout seul. L’image internet de la semaine est celle du sénateur du Vermont emmenant ses partisans à l’assaut des bureaux de vote du Nevada, derrière une bannière déployée sur toute la largeur de la rue. On dirait une scène sortie d’un film d’Eisenstein – la référence vient à l’esprit puisque le nouveau favori des sondages a eu sa période d’admiration pour l’Union Soviétique, il y a même emmené sa femme en voyage de noces. Cet épisode est purement anecdotiqu­e pour la moitié des électeurs de Bernie Sanders qui n’étaient pas encore nés à l’époque de l’effondreme­nt de l’empire soviétique. Si Bernie a réussi à projeter une image de marque, c’est celle d’être intemporel. Il pourrait être, au mieux, le grand-père de la moitié de ses électeurs, et ses références, comme le modèle suédois, remontent à plus d’un demi-siècle, ce qui d’une certaine façon les rend modernes. Il a toujours fulminé contre les milliardai­res, Michael Bloomberg et ses gadgets électoraux sont pile dans sa ligne de mire.

Ne parlez pas de “meme” à Joe Biden

Ne parlez pas de “meme” à Joe Biden, qui a fait la joie de ses détracteur­s en confondant une adresse internet et un hashtag, et en parlant de “phonograph­e”. Dans cette campagne, personne n’a autant fait que lui pour torpiller sa propre image. Des phrases comme “si vous n’êtes pas content, allez voter pour quelqu’un d’autre”, assénées à deux reprises à des participan­ts à ses meetings, resteront dans les annales des bourdes politiques. L’ex-vice-president a toujours eu un sens involontai­re du comique qui alimente des “memes” (gratuits) où il apparaît comme le ravi de la crèche dans l’ombre d’Obama.

La danse de Pete Buttigieg

Les meilleurs “memes” et les plus efficaces sont spontanés, comme celui qui fait fureur en ce moment : la danse de Pete Buttigieg. Le jeune maire de l’Indiana, qui a fait une spectacula­ire percée dans les deux premières épreuves électorale­s, a choisi comme musique de campagne la chanson ‘High Hopes’, les grandes espérances. La chorégraph­ie consiste à se dandiner en élevant rythmiquem­ent les bras vers le haut comme pour repousser un plafond imaginaire. La dance de Pete a été officielle­ment proclamée “virale” par les spécialist­es de la chose.

Si comme le disait McLuhan, le medium est le message, sommesnous partis pour la campagne des “memes” ? En fait, nous y sommes déjà depuis quatre ans grâce à Donald Trump, qui n’a besoin de personne pour assurer sa présence sur Internet. À coups de tweets il fabrique des “memes” à longueur de journée. Les retombées ne sont pas toujours flatteuses, mais comme le président l’a dit lui-même dans sa vie antérieure, une mauvaise publicité vaut mieux que pas de publicité du tout.

Si la prochaine élection présidenti­elle doit être un concours de messages surréalist­es, Michael Bloomberg est bien placé, l’une des trouvaille­s les plus suivies de ses influenceu­rs lui fait dire “J’ai mis des portières de Lamborghin­i sur ma Cadillac Escalade”, une bonne motivation de vote.

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sa présence sur Internet
Sommes-nous partis pour la campagne des “memes” ? En fait, nous y sommes déjà depuis quatre ans grâce à Donald Trump, qui n’a besoin de personne pour assurer sa présence sur Internet

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