Mieux vaut miser sur les acquis
Privé de grands projets, il reste au Val-d’Oise à capitaliser sur son tissu industriel et la jeunesse de sa population
Qu’il est difficile ces derniers temps d’être le Val-d’Oise. Des difficultés sociales et économiques aux territoires à fort potentiel, ce département du nord- ouest francilien navigue entre deux eaux. Département le moins peuplé d’Ilede-France, il dispose également du plus petit budget de fonctionnement : 1,2 milliard d’euros, contre 1,5 pour les Yvelines et 2,2 milliards d’euros pour la Seine-Saint-Denis. Ce tableau devait être éclairci par une décennie 2020-2030 qui promettait au département l’arrivée sur son territoire de grands projets structurants. L’aménagement de la ZAC de Gonnesse, dont le projet Europacity était la figure de proue, ainsi que l’élargissement de l’aéroport de Roissy, infrastructure déterminante du département, devaient articuler le développement économique du nord francilien.
Rattrapé par la réalité
Mais voila, l’annonce de la fin d’Europacity par la ministre de l’Environnement Élisabeth Borne en novembre 2019 a douché l’enthousiasme des élus du département qui soutenaient le projet. “Les espoirs de milliers d’habitants et d’acteurs territoriaux de l’est du Val- d’Oise sont anéantis par ce couperet brutal et injuste. Le Val-d’Oise, l’un des départements les plus jeunes de France, un territoire d’avenir aux portes de Paris, est de nouveau maltraité et relégué”, écrit alors dans un communiqué lapidaire,
Marie- Christine Cavecchi, présidente du conseil général. Il faut dire que le projet avait des airs de Graal pour un département dont le taux de chômage culmine à 8,7 % en 2019, soit 1,2 point de plus que la moyenne régionale. Unique projet labellisé Grand Paris porté exclusivement par des fonds privés, ce centre commercial et de loisirs faisait miroiter la promesse de 11 800 emplois directs en phase d’exploitation et 4 200 en phase de construction. Mais Europacity illustrait aussi la difficulté à trouver un concept viable économiquement et acceptable socialement. 80 hectares d’actuelles terres agricoles qui disparaissent au profit de 230 000 m2de surfaces commerciales n’est désormais plus concevable.
Si le projet d’Europacity est enterré, l’aménagement de la ZAC de Gonnesse et ses 300 hectares est lui toujours d’actualité, bien qu’un peu flou. À l’origine, ce projet devait transformer le triangle de Gonesse, zone coincée entre les deux aéroports de Roissy et du Bourget, qui fait partie des territoires les plus pauvres de la métropole parisienne, en un “quartier d’affaires à vocation internationale”. Dès l’annonce de la fin d’Europacity, la ministre Élisabeth Borne a chargé le haut fonctionnaire Francis Rol-Tanguy de proposer un projet alternatif pour l’aménagement de la ZAC. “Peut-on réellement se fier aux annonces de l’État sur la poursuite de l’aménagement de la ZAC du Triangle de Gonesse ? Si c’est le cas, j’attends de toute urgence une réponse à ces trois questions : avec qui, quand, et pour quoi faire ?”, se questionnait Marie-Christine Cavecchi. Depuis, la justice a apporté un début de réponse avec la décision du tribunal administratif de Montreuil de suspendre pour un an les travaux de la ligne 17 du Grand Paris Express, dont le tracé dessert le Triangle de Gonesse. Sans cette ligne, l’aménagent de la ZAC est pour le moins questionné.
Enfin, dernier projet en date, l’agrandissement du terminal 4 de Roissy, dont les travaux doivent débuter en 2021 pour un coût estimé entre 7 et 9 milliards d’euros, financés par ADP. Et là encore, une promesse de 40 000 créations d’emploi – chiffre dont la fiabilité reste à démontrer. Mais depuis le début de l’année 2020, un collectif de plus de 60 maires d’Ilede-France demande le renoncement du projet à Emmanuel Macron. Une enquête publique est prévue au deuxième semestre 2020.
Territoire d’industrie
Il y a derrière la remise en question de ces trois chantiers une certitude : le développement économique du département – s’il veut rattraper le niveau régional – ne passera pas par les grands projets. Le département du Val-d’Oise doit davantage miser sur ce qu’il possède déjà, des pôles économiques et industriels et une population jeune. L’exemple est frappant avec Cergy- Pointoise. Agglomération de 208 000 habitants et 13 communes, elle est aussi le troisième pôle universitaire d’Ile-de
France avec un effectif de 30 000 étudiants et 1 500 enseignants-chercheurs. Avec une université et des écoles d’ingénieurs ou de commerce comme l’Ensea et l’Essec, “le pôle Cergy-Pointoise compte un grand nombre d’entreprises de haute technologie de R&D mais également de nombreuses PME, notamment dans les domaines de la mobilité/automobile”, détaille l’Institut Paris Région. Ainsi, en plus d’être un pôle universitaire
En plus d’être un pôle universitaire reconnu, le bassin de Cargy-Pontoise est encore marqué par une activité industrielle forte, avec plus de 14 000 emplois sur un total de 90 500, soit une part des emplois industriels deux fois plus importante qu’à l’échelle régionale
reconnu, ce bassin est encore marqué par une activité industrielle forte, avec plus de 14 000 emplois sur un total de 90 500, “soit une part des emplois industriels deux fois plus importante qu’à l’échelle régionale”. L’Institut Paris Région préconise ainsi au territoire, pour renforcer son attractivité et affirmer son identité économique industrielle, de soutenir le développement des TPE-PME et encourager l’esprit d’entreprendre, notamment chez les jeunes.
Depuis 2018, une importante part du département a été labellisée “Territoire d’industrie” par le gouvernement. Un programme qui a pour objectif d’apporter des réponses collectives favorables à l’attractivité de territoires industriels labellisés, “de favoriser des initiatives appropriées à chacun d’eux, parce que conçues dans une démarche ascendante”, explique l’Académie des technologies. La société savante française vient ainsi de publier un rapport intitulé ‘Attractivité des métiers, attractivité des territoires : des défis pour l’industrie’, dans lequel elle presse l’État mais aussi et surtout les collectivités locales et autres opérateurs publics et privés, de s’impliquer avec ambition dans le développement d’une plus grande synergie entre attractivité du secteur industriel et emploi des jeunes. Au travers de la création de “parcours sur mesure de formation, accompagnés d’un service complet aux jeunes qui sont éloignés géographiquement”, les collectivités doivent faire de ces thèmes “une priorité politique majeure sur tous les territoires de l’industrie” Et si chaque territoire est un cas particulier, le Val-d’Oise avec sa dimension industrielle encore présente et une population jeune, semble être le coeur de cible de ces démarches, et pourrait, peut être, y trouver sa raison d’être.
urbaine), a indiqué mardi l’Aorif, l’association regroupant les bailleurs sociaux d’Ile-de-France. Un niveau à peu près stable par rapport à 2018, qui avait connu 28 830 agréments - après une baisse de 20 % entre 2016 et 2018.
Ce chiffre reste très en deçà des objectifs définis. L’Aorif rappelle que le Schéma régional de l’habitat et de l’hébergement a fixé un objectif annuel de 37 000 agréments pour être en mesure de répondre aux besoins des Franciliens.
Plus de 720 000 ménages sont aujourd’hui en attente d’un logement social en Ilede-France (+5 % en deux ans). Seules 72 000 attributions ont été comptabilisées en 2019. Un chiffre en baisse de 4,5 % par rapport à 2018, notamment du fait de la paupérisation des locataires du parc HLM. Ces derniers libèrent de moins en moins de places dans les logements déjà construits, le parc privé restant pour eux inaccessible.
En parallèle, les mises en chantier de logements sociaux restent insuffisantes. La rareté et la cherté du foncier aggravent la situation. De même que la hausse des coûts de construction, et la compression des ressources des organismes HLM, mis à contribution pour compenser la baisse des aides personnalisées au logement (APL). Tous ces éléments ne peuvent conduire qu’à accentuer la crise.
“Le logement social apparaît comme l’unique solution abordable pour une large frange de la population francilienne. Mais l’offre n’est pas à la hauteur des besoins”, résume Jean-Luc Vidon, le président de l’Aorif. L’organisme en appelle à une mobilisation de la puissance publique et des futurs maires.
Dans un rapport publié il y a quelques mois, la Fondation Abbé Pierre rappelait que parmi les 4 millions de personnes mal logées en France, 1,2 million vit en région parisienne. Elle appelait elle aussi à accentuer l’effort de construction de logements, notamment sociaux.
Les Échos - 04/03