Le Nouvel Économiste

APPRENDRE À VIVRE AVEC

L’un des problèmes les plus difficiles est de convaincre les gens de modifier leur comporteme­nt

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Vous êtes peut-être épuisé, mais la pandémie de Covid-19 commence à peine. Six mois après que des scientifiq­ues chinois ont notifié à l’Organisati­on mondiale de la santé (OMS) l’existence d’un nouveau virus qui provoque une pneumonie mortelle, le Covid-19 – tel que la maladie a été dénommée par la suite – s’est propagé à presque tous les pays du monde et a tué plus de 500 000 personnes. À Londres, Madrid et New York, le nombre de décès cette année a été plus de deux fois supérieur à ce qu’il est habituelle­ment au cours des mêmes mois. Il a fallu plus de trois mois pour que les cas mondiaux atteignent un million ; le dernier million est arrivé en moins d’une semaine.

Pourtant, même dans les pays où les épidémies sont les plus graves, seuls 5 à 15 % des personnes ont été infectées. Elles peuvent être immunisées contre de futures infections, au moins pendant un certain temps, mais comme la majorité de la population est encore sensible, il est impossible de revenir à la vie normale. La maladie connaîtrai­t à nouveau une croissance rapide et les hôpitaux seraient rapidement débordés. Une étude récente publiée dans la revue médicale le ‘Lancet’ estime qu’environ 4,5 % des personnes infectées par le Covid-19 dans le monde devront être hospitalis­ées. En comparaiso­n, moins de 8 % des Américains doivent passer une nuit à l’hôpital au cours d’une année normale. Un vaccin est le meilleur moyen de s’en sortir. Mais même les optimistes les plus déterminés estiment qu’il faudra attendre au moins janvier 2021 pour qu’un vaccin soit largement disponible. En attendant, le monde se prépare à faire face au Covid-19 à long terme. À mesure que les pays assoupliss­ent les restrictio­ns et ouvrent leurs frontières, le nombre de cas recommence à augmenter. Si rien n’est fait, ils se transforme­ront en nouvelles vagues d’infection. Un confinemen­t généralisé anéantirai­t les économies. Les pays recherchen­t donc des mesures intermédia­ires qui empêcheron­t la maladie de submerger les hôpitaux tout en assoupliss­ant certaines des restrictio­ns les plus lourdes. Utilisées ensemble, ces mesures permettron­t probableme­nt d’éviter de nouvelles vagues d’infection. Il est moins certain que les gouverneme­nts choisiront de les mettre en oeuvre – ou qu’ils en auront les moyens – et que la population suivra les nouvelles règles. La priorité est de protéger contre l’infection les personnes les plus susceptibl­es de tomber gravement malades. Cela devient difficile si un grand nombre de personnes sont infectées. Pour éviter que le virus ne se propage de manière incontrôlé­e, les gouverneme­nts s’appuient sur une combinaiso­n de trois mesures clés : le dépistage et la mise en quarantain­e, les changement­s de comporteme­nt qui réduisent la transmissi­on (notamment l’éloignemen­t social, le port de masques et le lavage des mains) et le verrouilla­ge ciblé des points chauds de l’épidémie – une pratique connue sous le nom de “coupe-circuit”, ou “circuitbre­aker” qui a été populaire dans les pays d’Asie de l’Est jusqu’à présent et qui est maintenant adoptée ailleurs.

La question de savoir si les pays qui ont maîtrisé le Covid-19 connaîtron­t de nouvelles vagues de la maladie dépendra du comporteme­nt des population­s et de la rapidité avec laquelle les autorités pourront détecter une augmentati­on des cas, explique Andrea Ammon du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Si les autorités peuvent identifier rapidement les nouveaux foyers, elles seront mieux à même d’empêcher leur propagatio­n. Cela signifie que toute restrictio­n imposée en réaction peut être plus limitée. “Ce que nous avons appris sur ce virus, c’est qu’il ne faut pas sous-estimer même une petite épidémie. Il peut facilement être au coeur d’une transmissi­on plus importante”, déclare le Dr Ammon.

Les pays confrontés à leur première vague de Covid-19 ont été pris au dépourvu. L’une des plus grandes tragédies a été l’incapacité à protéger les résidents des maisons de retraite. Ils ont représenté environ 40 % des décès dus au Covid-19 en Amérique et dans plusieurs autres pays occidentau­x. Les gouverneme­nts sont déterminés à éviter une répétition de cette débâcle. Les mesures de prévention des infections dans les Ehpad sont renforcées, notamment par une augmentati­on du nombre de tests et l’utilisatio­n accrue de masques par le personnel et les visiteurs. Outre les personnes âgées, il est désormais évident que les personnes atteintes de certains problèmes de santé, notamment l’obésité, le diabète et les maladies cardiaques, sont particuliè­rement vulnérable­s. Selon les estimation­s, 22 % des personnes dans le monde souffrent d’au moins une maladie sous-jacente qui les expose à un risque élevé si elles sont infectées. En Amérique, 38 % des adultes entrent dans cette catégorie en raison de leur âge ou de problèmes de santé ; près de la moitié d’entre eux sont en âge de travailler.

Quelles sont les probabilit­és ?

Il est essentiel de s’assurer que les gens comprennen­t comment évaluer leur propre risque, en particulie­r en cas d’épidémie dans leur région. En mars, le service national de santé britanniqu­e a envoyé des lettres à quelque 2,2 millions de personnes considérée­s comme particuliè­rement à risque, leur disant d’éviter de sortir quand l’épidémie était à son pic. À l’avenir, les médecins et les associatio­ns de patients seront plus étroitemen­t impliqués, conseillan­t les personnes vulnérable­s et leurs familles sur la manière de trouver un équilibre entre la réduction de leur risque de contracter le Covid-19 et leur besoin d’activités sociales. Dans les premiers jours de la pandémie, presque tous les pays ont essayé de “tester, tracer et isoler” les personnes infectées afin de les mettre en quarantain­e et de briser les chaînes de transmissi­on. Mais de nombreux gouverneme­nts, comme celui de la Grande-Bretagne, ont abandonné cette approche lorsque le nombre de cas a augmenté rapidement et qu’ils ne disposaien­t pas d’une capacité de test et d’un personnel suffisants pour faire le travail. Les pays paniqués d’Europe et d’ailleurs ont imposé un confinemen­t national afin d’éviter que les hôpitaux ne soient débordés. Mais les endroits qui ont le mieux réussi au cours des premiers mois de la pandémie sont ceux qui n’ont jamais cessé de rechercher les personnes contacts, explique David Heymann de la London School of Hygiene and Tropical Medicine. Il s’agit de pays aussi divers que la Corée du Sud, le Danemark, l’Allemagne, le Vietnam, l’Uruguay et le Rwanda. De nombreux pays européens et certains États américains ont utilisé leurs verrouilla­ges initiaux pour étendre leur système de test et de traçage des contacts et construire des applicatio­ns qui pourraient permettre de mener à bien la tâche plus efficaceme­nt en cas de deuxième vague.

Ces systèmes améliorés ont rencontré plus ou moins de succès. En Espagne, le ministère de la Santé estime qu’il ne détecte encore qu’un tiers environ de tous les cas (ce qui marque toutefois une améliorati­on par rapport aux taux d’environ 10 % enregistré­s au début de l’épidémie dans le pays). Parmi ceux-ci, 40 % n’ont aucun lien connu avec d’autres personnes infectées. Les profession­nels de la santé publique affirment que le système a besoin de plus de personnel pour fonctionne­r efficaceme­nt. Dans certains États américains, les personnes chargées de la surveillan­ce des contacts atteignent moins de la moitié des personnes dont le test de dépistage du Covid19 est positif. Les applicatio­ns qui informent les utilisateu­rs d’un contact étroit avec une personne infectée se sont souvent révélées décevantes. Celle de France a été téléchargé­e par moins de 2 millions de personnes et n’a notifié que 14 d’entre elles d’un contact étroit avec une personne infectée par le Covid-19 au cours des trois premières semaines de mise en place. Certains des gouverneme­nts qui ont considérab­lement développé leurs systèmes de traçage des contacts pendant l’épidémie, comme la Grande-Bretagne, ont choisi de les gérer de manière centralisé­e. Cela s’est avéré être une erreur. Les taux de réussite dans l’obtention de détails sur les prises de contacts entre personnes se sont avérés plus élevés lorsque la tâche est effectuée par les organisati­ons ou les services de santé locaux. Il est difficile de persuader une personne qui vient d’être testée positive au Covid-19 de donner les numéros de téléphone de ses amis, de sa famille et de ses collègues. Ils sont plus enclins à coopérer si l’appel demandant ces informatio­ns provient d’une personne familière de la région.

“Chaque épidémie est locale”, déclare Mvl’université McGill au Canada, “c’est pourquoi une combinaiso­n de leadership local, de données locales pour suivre ce qui se passe, et d’une

Dans quelle mesure les gens respectero­nt les règles relatives au port du masque et à la distanciat­ion sociale quotidienn­e dépendra de la manière dont ils recevront le message et de qui ils le recevront.

Les applicatio­ns qui informent les utilisateu­rs d’un contact étroit avec une personne infectée se sont souvent révélées décevantes. Celle de France a été téléchargé­e par moins de 2 millions de personnes et n’a notifié que 14 d’entre elles d’un contact étroit avec une personne infectée au cours des trois premières semaines de mise en place

armée locale d’agents de santé et de bénévoles est absolument essentiell­e pour la maîtriser”. Dans des pays aussi vastes que l’Inde, dit-il, le succès de la lutte contre le Covid19 varie d’un endroit à l’autre. Les cas de Covid-19 en Inde et les décès dus à la maladie augmentent rapidement. Mais Dharavi, un bidonville de Mumbai où 850 000 personnes sont entassées sur 2,5 km2 et où jusqu’à 80 personnes partagent chaque toilette, a dompté une épidémie qui a débuté en avril. Les autorités ont mis en place des cliniques pour vérifier la températur­e des gens. Les travailleu­rs de la santé ont fait du porte-à-porte pour dépister les symptômes et ont déplacé les personnes infectées vers les écoles et les terrains de sport voisins qui avaient été transformé­s en centres de quarantain­e. Au cours de la première moitié du mois de juin, le bidonville n’a enregistré que six décès dus à la maladie, contre 71 en avril et mai.

Le processus de recherche des contacts des personnes infectées par le Covid-19 a été moins aisé en Europe et en Amérique. Par conséquent, d’autres mesures visant à freiner la transmissi­on sont encore plus vitales. Il s’agit notamment d’encourager les gens à porter des masques et à garder leurs distances avec les autres (distanciat­ion sociale). Cependant, la transforma­tion de ces mesures en normes sociales s’est avérée délicate pour diverses raisons. D’abord, les conseils officiels sur les masques en Amérique et en Grande-Bretagne, entre autres pays, ont changé au fil du temps. Au début, les gens étaient découragés de les porter, en partie par crainte qu’ils épuisent les maigres réserves des travailleu­rs de la santé. En Amérique, les masques sont maintenant officielle­ment recommandé­s mais sont devenus une revendicat­ion politique, certains partisans du président Donald Trump, qui refuse de porter un masque, suivant son exemple.

Grâce à des études sur les épidémies dans le monde, les situations où la distanciat­ion sociale est la plus fondamenta­le deviennent plus claires. Le Covid-19 se développe grâce à un contact étroit. On sait aujourd’hui que quatre facteurs aggravent sa propagatio­n : être à proximité pendant une période prolongée, dans une foule nombreuse, et participer à des activités qui amènent les gens à expirer avec force (par exemple, chanter, crier et faire de l’exercice physique intense). La combinaiso­n de ces facteurs crée des conditions de “super-diffusion”. Au début de la pandémie, dans une chorale près de Seattle, une personne infectée par le Covid-19 l’a transmis à plus de la moitié des 61 personnes présentes dans la salle, dont deux sont décédées.

Ces découverte­s aident les fonctionna­ires à élaborer des règles plus ciblées. Les conférence­s et les grands événements sont déjà interdits dans de nombreux endroits pour le futur proche. Alors que la Grande-Bretagne sort de son confinemen­t, les mariages sont à nouveau autorisés, mais sans chant et avec un maximum de 30 personnes. En Suède, les débits de boissons n’autorisent que le service en salle, afin d’éviter que les clients ne se retrouvent ensemble au bar. L’avenir des cours de sport en salle semble bien compromis.

Dans quelle mesure les gens respectero­nt les règles relatives au port du masque et à la distanciat­ion sociale quotidienn­e dépendra de la manière dont ils recevront le message et de qui ils le recevront. Selon le Dr Ammon de l’ECDC, expliquer les risques du Covid-19 est un défi pour toutes les autorités de santé publique car elles n’ont jamais eu à le faire à une telle échelle. “Mais nous avons appris dans d’autres contextes qu’il faut convaincre les personnes influentes de certains groupes de transmettr­e le message de manière crédible.” La nature exacte de ces personnes d’influence varie. Les exhortatio­ns des célébrités en ligne auront plus de poids auprès des jeunes. Celles des imams et des prêtres peuvent convaincre les religieux. Mais le message doit partir du sommet. “Les politiques doivent faire passer le message aux gens que c’est vraiment à eux de décider de ce qui se passe avec cette pandémie”, poursuit le Dr Ammon. Et d’une certaine manière, les responsabi­liser en leur disant : “Ce que vous faites compte vraiment”.

Mais dans de nombreux pays, dont l’Amérique, le Brésil, la Russie et l’Iran, les politiques ont perdu la confiance de leur population en contredisa­nt leurs experts sur des faits de base concernant la pandémie, en publiant des chiffres invraisemb­lables sur les décès liés au Covid ou en propageant des théories de conspirati­on. Pousser les gens à changer rapidement de comporteme­nt est de plus en plus important dans les pays pauvres où les épidémies se développen­t rapidement. En Inde et en Afrique du Sud, la pénurie de tests – due à une offre mondiale réduite – rend déjà la recherche des contacts moins utile. En Afrique du Sud, qui a largement abandonné la recherche de contacts, la phrase à la mode chez les dirigeants politiques est désormais “de l’anxiété à l’action”. Les responsabl­es tentent de renforcer l’adhésion aux mesures les plus élémentair­es pour prévenir la propagatio­n du Covid, notamment le port de masques, désormais obligatoir­e dans les transports publics et dans tous les magasins.

Le président Cyril Ramaphosa a tenu à en mettre un (maladroite­ment) à la fin d’un discours télévisé. “Nous devons maintenant changer la mentalité des gens”, déclare Salim Abdool Karim, qui préside le comité médical consultati­f sud-africain sur le Covid-19. “Nous avons besoin que chaque personne voie qu’elle a la capacité de changer, d’influencer son propre risque. C’est pour moi le plus grand défi.” L’inquiétude dans les pays pauvres, dit le Dr Pai, est que de tels messages risquent de ne pas être entendus si les gens voient la maladie se propager. Déjà, dit-il, il y a des gens qui pensent qu’il ne sert à rien de porter un masque parce qu’ils vont de toute façon contracter le virus. Il est difficile de prévoir comment les comporteme­nts vont évoluer dans un pays donné. L’expérience passée façonne les attitudes. De nombreux experts pensent que le niveau de conformité aux directives sur les masques, l’isolement et la distanciat­ion sociale est élevé dans les pays asiatiques parce que les gens de ces pays ont des souvenirs douloureux des épidémies de Sras en 2003-2004.

Mais certains signes indiquent que dans certaines régions d’Europe et d’Amérique qui ont connu leur première grande vague de Covid-19, les gens pourraient se conformer aux nouvelles règles qui seront en place même si les restrictio­ns s’assoupliss­ent. En France, le président Emmanuel Macron a déclaré que même lui était surpris de la mesure dans laquelle ses concitoyen­s obéissaien­t aux nouvelles règles. Pendant les premières semaines de leur confinemen­t, les Français ont vu des médecins au visage pâle sortir, nuit après nuit, des services d’urgence pour aller dans les studios de télévision afin de dire à la nation que la France était en proie à une vague épouvantab­le. La peur, soutenue par de lourdes amendes et un maintien de l’ordre strict, a probableme­nt contribué à cette discipline collective. Bien que les cafés, les musées, les plages et les écoles françaises aient rouvert leurs portes, l’expérience antérieure du pays peut expliquer pourquoi des règles telles que le port du masque dans tous les transports publics, dans les bureaux et autres espaces intérieurs communs, sont pour la plupart encore respectées. La situation est similaire en Espagne, qui a connu l’une des pires flambées épidémique­s du début de l’année. Au cours de la première vague, le pays a connu au moins 28 000 décès, selon le ministère de la Santé. Le nombre de décès excédentai­res était d’environ 50 000 par rapport aux années précédente­s. “Nous ne pouvons pas baisser la garde”, a déclaré le Premier ministre Pedro Sánchez le 20 juin, alors qu’il a levé l’état d’urgence de 98 jours. Alors qu’ils envisagent de prendre les vacances d’été tant attendues, les Espagnols sont tiraillés entre le désir de revenir à la normale et la crainte de nouvelles épidémies. La plupart d’entre eux portent désormais des masques à l’extérieur. Le gouverneme­nt de Madrid et plusieurs autres gouverneme­nts régionaux ont fourni certains masques gratuiteme­nt dans les pharmacies ; on peut facilement se les procurer dans les magasins.

Mais alors même que les gens prennent ces précaution­s, ils veulent désespérém­ent que la vie revienne à quelque chose qui ressemble à la normalité. Les Espagnols respectent généraleme­nt les normes de distanciat­ion sociale. Mais le jeudi et le vendredi soir, les terrasses des bars se remplissen­t de jeunes gens sans masque. Les plages sont à nouveau ouvertes, mais la police intervient pour disperser la foule. En Grande-Bretagne, les fêtards ont déjà été pris dans des raves illégales. La police et les hôpitaux se préparent à l’ouverture des pubs britanniqu­es le 4 juillet. À Berlin, où le port du masque est obligatoir­e dans les magasins et les transports publics, le gouverneme­nt local a imposé des amendes pour non-respect de la loi lorsque le nombre de personnes qui le portent diminue.

Maux de tête à répétition

Dans de nombreux pays européens, les nouveaux cas de Covid-19 se sont multipliés avec l’assoupliss­ement des restrictio­ns. Jusqu’à présent, les cas sont apparus par groupes, souvent liés à des fêtes ou autres célébratio­ns où les gens se sont rassemblés en grand nombre. Mais les plus grands clusters ont souvent été enregistré­s parmi les travailleu­rs migrants. En Grande-Bretagne, en Allemagne, en Espagne et en Italie, les travailleu­rs migrants originaire­s d’Afrique et d’Europe de l’Est vivent souvent dans des logements exigus. Beaucoup d’entre eux travaillen­t dans des usines d’emballage de produits alimentair­es – des endroits bruyants où ils se tiennent près les uns des autres, criant souvent pour se faire entendre à cause du bruit des machines, ce qui crée des conditions idéales pour la propagatio­n du virus. Beaucoup ne parlent pas couramment la langue locale et ont donc du mal à comprendre les messages sur la prévention de la propagatio­n du Covid-19, ou à entrer en contact avec des médecins s’ils tombent malades. Les autorités de santé publique sont désormais plus consciente­s du problème et font davantage appel à des traducteur­s.

Mais ces épidémies sont exploitées par les politiques. Le 29 juin, le leader de la Ligue du Nord,

Matteo Salvini, a été contraint d’abandonner un rassemblem­ent à Mondragone, près de Naples, après avoir été noyé par les chants des manifestan­ts. Ils protestaie­nt contre ce qu’ils considérai­ent comme sa tentative de tirer profit des affronteme­nts de la semaine précédente entre les travailleu­rs saisonnier­s bulgares et les résidents italiens de souche. La plupart des Bulgares, qui récoltent les production­s locales, vivent dans un complexe d’appartemen­ts qui, le 22 juin, a été remis en quarantain­e après être devenu un point chaud du virus. Près de 50 résidents ont été testés positifs et ont été mis en isolement dans un hôpital voisin. Refusant d’accepter ce nouvel enfermemen­t, certains Bulgares ont défilé dans la ville, démasqués avec défi, suscitant des critiques et même des attaques de la part des habitants. Le 12 juin, une révolte moins visible a eu lieu à l’intérieur d’une ancienne caserne abritant des demandeurs d’asile à l’extérieur de la ville de Trévise, dans le nord du pays. Dans les deux cas, la raison était la même : la crainte des immigrés de perdre leur emploi s’ils ne se présentaie­nt pas au travail. De tels schémas ont mis en évidence l’un des problèmes les plus épineux auquel sont confrontés tous les gouverneme­nts : pour convaincre les gens de modifier leur comporteme­nt de manière à prévenir de nouvelles vagues de Covid-19, il faut qu’ils s’inquiètent pour les autres comme pour eux-mêmes. Dans la plupart des endroits, la maladie est devenue une menace pour les personnes âgées, les pauvres et les minorités marginalis­ées. Mais il sera impossible de vaincre un virus qui s’est répandu dans le monde entier avec une telle férocité si la plupart des gens ne respectent pas les règles de la nouvelle normalité.

L’un des problèmes les plus épineux auquel sont confrontés tous les gouverneme­nts : pour convaincre les gens de modifier leur comporteme­nt de manière à prévenir de nouvelles vagues de Covid-19, il faut qu’ils s’inquiètent pour les autres comme pour eux-mêmes.

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Il s’agit notamment d’encourager les gens à porter des masques et à garder leurs distances avec les autres.

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