Le Nouvel Économiste

Comment enrayer la vague de fermetures d’usines ?

Le salut passera peut-être par la mise à dispositio­n de foncier pour les PME-PMI

- PAR ANNE THIRIET

Les mauvaises nouvelles arrivent en cascade. Le 29 mai, Renault a confirmé son intention de fermer son usine de Choisy-le-Roi (Val-deMarne), et d’arrêter l’assemblage de voitures sur son site historique de Flins (Yvelines), où travaillen­t encore 4 000 personnes qui craignent à terme une fermeture. Le 22 juin, un leader des télécoms, Nokia, a annoncé la suppressio­n de 1 233 postes dans sa filiale française, dont 831 à Nozay, dans l’Essonne, dédiée au développem­ent de la nouvelle génération de mobiles. Un plan social qui touche directemen­t la R& D et les fonctions centrales et qui s’inscrit, selon le groupe, dans un programme mondial d’économies visant à rationalis­er les activités de R&D et à gagner en compétitiv­ité. Plus tôt, c’était l’industriel de la pharmacie Sanofi qui rappelait l’arrêt programmé de son site d’Alfortvill­e (Val-de-Marne) pour 2022.

Les sous-traitants menacés

Le choc est rude pour l’Ile- deFrance, qui reste la deuxième région industriel­le de France ( 7,3 % de l’emploi salarié). Derrière ces décisions, des centaines d’emplois directs touchés, mais aussi des menaces sur l’écosystème. “On a beaucoup parlé de délocalisa­tions alors que, stricto sensu, elles ne représenta­ient que 10 % des suppressio­ns d’emplois. La désindustr­ialisation est surtout le fait des gains de productivi­té et de la sous- traitance d’activités qui n’étaient pas le coeur de métier des industriel­s”, note Thierry Petit, économiste à l’Institut Paris Région. Résultat : les économiste­s s’accordent pour dire qu’un emploi industriel génère directemen­t entre 2,4 et 3 emplois ( gardiennag­e, nettoyage, services informatiq­ues, ingénierie, etc.).

La production elle- même a vu sa part réduite, l’activité étant exportée dans des pays à bas coûts. “Reste qu’aujourd’hui, plus aucune fonction n’est sanctuaris­ée, la R&D qui crée des emplois à haute valeur ajoutée est aussi concernée”, observe l’économiste, qui note cependant des points positifs. Parmi eux, une prise de conscience de l’intérêt, pour les territoire­s, de conserver de l’industrie pour maintenir des emplois, mais aussi pour pallier des vulnérabil­ités du pays en matière de santé, de technologi­es de télécommun­ication, de production de batteries électrique­s…

Foncier, l’enjeu prioritair­e

Conserver l’activité industriel­le passe notamment par la mise à dispositio­n de foncier. “Il faut du terrain de qualité et accessible alors que l’offre était jusqu’ici réduite au profit d’autres activités, ajoute l’expert. La région Ile-de-France a ainsi créé cette année une foncière afin de racheter des locaux et des terrains à louer ou à revendre à des industriel­s à des prix abordables.”

Autre possibilit­é : favoriser l’émergence d’offres immobilièr­es innovantes, à l’image de l’EPA (Établissem­ent public à caractère administra­tif) de Sénart par exemple, qui s’est associé avec le fabricant d’usines Elcimaï, ou de Bordeaux avec des appels à manifestat­ions d’intérêt…

Pour Pierre Bédier, président du conseil départemen­tal des Yvelines, un des départemen­ts les mieux dotés en emplois industriel­s, il faut aussi changer les textes : “je travaille sur une propositio­n de loi pour obliger les très grandes entreprise­s, qui ont de nécessaire­s restructur­ations, à libérer le foncier qu’elles n’utilisent plus. Il faut maintenir la pression fiscale, comme si ces entreprise­s avaient encore une activité sur le site concerné.”

Il ne croit pas que l’avenir soit à l’implantati­on d’industries de taille XXL. “C’est très aléatoire, observe-t-il. Il vaut mieux 100 PME de 30 emplois ou des TPE qui auront de l’avenir, qu’une seule très grande société.”

Il y a une prise de conscience de l’intérêt, pour les territoire­s, de conserver de l’industrie pour maintenir des emplois mais aussi pour pallier des vulnérabil­ités du pays

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Le 22 juin, Nokia a annoncé la suppressio­n de 1 233 postes dans sa filiale française, dont 831 à v, dans l’Essonne, site dédié à la R&D

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