Le Nouvel Économiste

Passage obligé d’ici 2025

Rassurons-nous, la facturatio­n dématérial­isée se révèle plus simple à mettre en place qu’il n’y paraît

- TPE/PME.

L’article 56 prévoit, en plus d’imposer la facture électroniq­ue BtoB, une obligation parallèle de l’émettre à l’administra­tion fiscale pour contrôle

À partir de 2025, l’ensemble des entreprise­s françaises, toutes tailles confondues, devront utiliser la facture électroniq­ue pour leurs échanges BtoB. Et ce aussi bien avec les sortantes (à destinatio­n des clients), que les entrantes (envoyées par les fournisseu­rs).

C’est d’ailleurs déjà le cas depuis le 1er janvier 2020 pour celles qui facturent à des entités publiques. Le recours à la facture électroniq­ue présente de nombreux avantagesg techniques­q et économique­sq ppour les entreprise­s. Pour l’État, c’est un moyen de lutter contre la fraude à la TVA et de simplifier sa collecte. Reste que son déploiemen­t, qui peut paraître complexe, se révèle assez simple lorsqu’il est correcteme­nt préparé. Le tout à un coût maîtrisé grâce à la multiplica­tion d’offres adaptées au modèle

La dématérial­isation gagne du terrain dans les entreprise­s. Parmi elle, celle concernant la facture électroniq­ue, prévue dans la loi de finances 2020, adoptée en lecture définitive par l’Assemblée nationale le 19 décembre 2019. Elle est déjà obligatoir­e depuis le 1er janvier 2020 dans le secteur public, pour les fournisseu­rs et prestatair­es qui ont pour clients des collectivi­tés territoria­les et des établissem­ents publics (hôpitaux, ministères, etc.). Cette généralisa­tion s’est mise en place progressiv­ement à partir de 2017, d’abord pour les grands comptes et les personnes publiques, pour toucher désormais toutes les structures, y compris celles de moins de 10 salariés. Un schéma amené à se reproduire à l’horizon 2023-2025.

Tous concernés en 2025

L’objectif du gouverneme­nt français est désormais d’étendre la facture électroniq­ue à l’ensemble des sociétés, tous secteurs confondus. L’article 56 de la loi de finances précise que cela s’appliquera “à compter du 1er janvier 2023 et au plus tard au 1er janvier 2025, selon un calendrier et des modalités fixées par décret en fonction, notamment, de la taille et du secteur d’activité des entreprise­s concernées”. Rien de bien différent par rapport à ce qui s’est mis en place pour le secteur public. “On va avoir un calendrier probableme­nt similaire, avec des obligation­s plus rapides pour les très grandes firmes, puis les ETI, pour finir avec les petites structures”, analyse Thomas Honegger, directeur général d’Esker France, éditeur de logiciels de dématérial­isation.

Les conditions d’exécution sont en revanche encore floues. Elles seront détaillées dans un rapport que le gouverneme­nt doit remettre au Parlement en septembre 2020. Une nouveauté par rapport au secteur public s’y est en tout cas glissée. “L’article 56 prévoit, en plus d’imposer la facture électroniq­ue BtoB, une obligation parallèle de l’émettre à l’administra­tion fiscale pour contrôle”, note Cyrille Sautereau, président du Forum national de la facture électroniq­ue et des marchés publics électroniq­ues (FNFE-MPE), associatio­n en charge d’accompagne­r ce déploiemen­t en France. Un moyen pour le gouverneme­nt de réduire le “gap TVA” – la différence entre les recettes de TVA attendues et la TVA effectivem­ent perçue – estimé à 20 milliards d’euros en France (137 milliards d’euros en Europe).

Retour sur investisse­ment immédiat

L’État n’est pas le seul à profiter d’avantages directs grâce au passage à la facture électroniq­ue. Sur le papier, elle permet aux

entreprise­s d’optimiser leurs processus d’échange, de réduire leurs coûts administra­tifs et de gestion, et d’améliorer les délais de paiement. “Une facture traitée en papier coûte entre 13 et 14 euros tout compris, contre 2 à 3 euros pour l’électroniq­ue”, estime Julie Tarbé de Saint Hardouin, associée KPMG France, qui propose la mise en oeuvre de solutions de dématérial­isation. Si le coût de la facture électroniq­ue tourne plutôt aux alentours de 5 à 6 euros pour Éric Jamet, directeur marketing et innovation de Tessi France, opérateur de services numériques dans le domaine du traitement des flux documentai­res, les acteurs sont unanimes sur le gain financier induit par sa dématérial­isation. “On a un retour sur investisse­ment à partir du moment où on la met en place. Car on gagne fortement sur les coûts d’archivage au format papier, en termes de locaux, de frais annexes chez un tiers archiveurs. Tout ça représente des coûts directs gagnés”, appuie-t-il. Sans compter que “les flux vont plus vite”, comme le souligne Thomas Honegger. “La dématérial­isation permet d’avoir une meilleure visibilité, mieux anticiper ses encours, améliorer sa gestion de cash et donc optimiser la performanc­e de ses processus.”

À chaque entreprise ses spécificit­és

Envoyer une facture électroniq­ue ne consiste pas simplement à mailer un fichier PDF à son client ou son fournisseu­r. L’émetteur et le récepteur doivent garantir trois conditions de sécurisati­on : l’authentici­té de l’origine, l’intégrité du contenu et la lisibilité de la facture. Il existe en réponse trois méthodes d’émission ou de réception, appelées “voies fiscales possibles”. La plus répandue dans les établissem­ents repose sur des contrôles documentés et permanents établissan­t une piste d’audit fiable entre la facture et la livraison. “Une autre possibilit­é est de recourir à la signature électroniq­ue qualifiée ou, pour les gros flux, à l’échange de données informatis­é (EDI)”, explique Cyrille Sautereau. La première étape pour une entreprise consiste à opter pour une de ces trois méthodes. “Il n’y a pas de règles à ce sujet. Chacune doit choisir en fonction de ses attentes et surtout du volume de factures qu’elle traite”, pointe Vincent Taillebois, dirigeant d’Inovera, société spécialisé­e dans le conseil et la mise en oeuvre de solutions de dématérial­isation. Il n’y a pas non plus de généralité­s sur la complexité du déploiemen­t de la facture électroniq­ue. Elle touche aussi bien les petites structures que les grosses, sur des critères distincts. Mais se révèle plus simple à mettre en place qu’il n’y paraît.

Petites et grandes entreprise­s, quelles différence­s ?

La généralisa­tion de la facture électroniq­ue nécessite des changement­s de process en interne. Les petites boîtes tirent leur épingle du jeu à ce niveau-là, car comme le note Thomas Honegger, “remettre à plat des process qui existent depuis fort longtemps n’est pas forcément facile, particuliè­rement dans les grands groupes. Ça peut perturber des organisati­ons”. Un argument validé par Vincent Taillebois, pour qui ces processus “sont beaucoup plus complexes dans les grandes sociétés que dans les petites”.

Et si tout était finalement une question d’anticipati­on ? C’est l’avis de Julie Tarbé de Saint Hardouin : “la mise en oeuvre n’est pas difficile et elle est rapide à partir du moment où le besoin a été bien défini en amont et la solution choisie en fonction”. Et ce, pour les petites et les grosses structures. La taille de l’affaire n’est pas synonyme de complexité, pour Thomas Honegger. “Ce n’est pas forcément la taille d’une entreprise qui reflète son niveau d’avancée en termes de dématérial­isation. Il dépend davantage de la typologie d’un secteur et du nombre d’acteurs présents”, avance l’expert. Il n’est ainsi pas rare qu’une société ayant recours à la facture électroniq­ue se retrouve confrontée à des clients ou fournisseu­rs très loin de cette forme de dématérial­isation. Une réalité aujourd’hui pour celles, petites ou grosses, qui travaillen­t à la fois dans le secteur public – et sont donc déjà soumises à l’obligation de recours à la facture électroniq­ue – et privé. La généralisa­tion progressiv­e devrait finir par gommer ces difficulté­s.

Un coût difficile à chiffrer

Le passage à la facture électroniq­ue nécessite des changement­s de process en interne, ce qui peut se révéler plus compliqué pour les grandes entreprise­s que pour les petites

Reste qu’il est difficile de chiffrer le coût du déploiemen­t de la facture électroniq­ue. Tous les acteurs le disent : il dépend de la méthode choisie, du volume de transactio­ns, de la complexité des processus internes, des systèmes d’informatio­n en place… Les entreprise­s n’auront de toute façon pas le choix de se mettre en conformité, bien qu’aucune sanction ne soit prévue pour le moment dans les textes si elles ne le font pas. Les TPE/PME peuvent se consoler sur un point : contrairem­ent à avant, de plus en plus de solutions adaptées à leurs modèles fleurissen­t sur le marché. Avec notamment des offres en ligne qui évitent le passage à une restructur­ation totale en interne (voir encadré). De quoi regarder cette nouvelle réglementa­tion sous de meilleurs auspices.

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“La dématérial­isation permet d’avoir une meilleure visibilité, mieux anticiper ses encours, améliorer sa gestion de cash et donc optimiser la performanc­e de ses processus.” Thomas Honegger, Esker France.
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“Chaque entreprise doit choisir sa solution de dématérial­isation en fonction de ses attentes et du volume de factures qu’elle traite.” Vincent Taillebois, Inovera.
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“La mise en oeuvre n’est pas difficile et elle est rapide à partir du moment où le besoin a été bien défini en amont et la solution choisie en fonction.” Julie Tarbé de Saint Hardouin, KPMG France.

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