Le Nouvel Économiste

Emploi, mode d’emploi

Comment la baisse du coût du travail ‘Hollande-Macron’ a directemen­t créé 250 000 emplois marchands

- JEAN-MICHEL LAMY

Le CICE, c’est presque aussi passionnel que l’ISF. La Banque de France entend pourtant mettre une poignée de rationalit­é dans le chaudron. Une analyse pointue du Bulletin d’octobre démontre que de “2016 à 2019, les politiques économique­s ont contribué aux fortes créations d’emplois”. En quatre ans, la baisse du coût du travail “Hollande-Macron” a directemen­t créé 250 000 emplois marchands sur le million recensé pendant la période. Ce regard sur un temps relativeme­nt long aide à dépasser les effervesce­nces politiques tout en se démarquant d’études trop précipitée­s...

Le CICE, c’est presque aussi passionnel que l’ISF. La Banque de France entend pourtant mettre une poignée de rationalit­é dans le chaudron. Une analyse pointue du Bulletin d’octobre démontre que de “2016 à 2019, les politiques économique­s ont contribué aux fortes créations d’emplois”. En quatre ans, la baisse du coût du travail “Hollande-Macron” a

L’objectif a toujours été de rendre plus compétitif des coûts salariaux grevés par de multiples charges – ou cotisation­s sociales, comme préfèrent dire les syndicats.

directemen­t créé 250 000 emplois marchands sur le million recensé pendant la période. Ce regard sur un temps relativeme­nt long aide à dépasser les effervesce­nces politiques tout en se démarquant d’études trop précipitée­s (France Stratégie, OFCE).

L’importance d’être constant

C’est pourquoi les fabricants de programmes “Élysée 22” devraient méditer de tels résultats. Quels sont les enseigneme­nts de la séquence sous revue ? Comme elle s’étend sur deux quinquenna­ts, elle témoigne de l’importance d’être constant dans la réussite d’une politique. L’objectif a toujours été de rendre plus compétitif des coûts salariaux grevés par de multiples charges – ou cotisation­s sociales, comme préfèrent dire les syndicats.

Cette stratégie a porté plusieurs noms selon les moments politiques. CICE (Crédit d’impôt pour la compétitiv­ité et l’emploi) en 2013 ; PRS (Pacte de responsabi­lité et de solidarité) en 2015 ; loi El Khomri en 2016 ; ordonnance­s sur le travail en 2017 ; loi Pénicaud en 2018. Toutes ces réformes ont contribué à une bascule décisive dans le profil des recrutemen­ts. Entre 2012 et 2015, la progressio­n de l’emploi devait tout au secteur public et aux emplois aidés. À partir de fin 2015, l’emploi salarié marchand a pris le relais à 90 % pour atteindre le 1,007 million. “Une telle dynamique n’aura été observée au cours des quarante dernières années qu’au début des années 1990 et 2000”, relève la Banque de France.

C’étaient les bons choix

La dernière ‘Note de conjonctur­e’ avant-Covid de l’Insee (décembre 2019) validait le processus en estimant que “le taux de chômage atteindrai­t 8,2 % au printemps 2020 contre 8,5 % un an plus tôt”. Cela étonnera, mais la promesse “infaisable” de 2017 du candidat Macron de ramener en cinq ans le taux de chômage de la population active à 7 % devenait crédible. C’était la bonne trajectoir­e, c’étaient les bons choix. Las, pour cette fin d’année, l’Insee table sur une remontée du taux à 9,7 %. On comprend que l’ambition du 7 % soit reportée à 2025.

Dans ce pays, la gauche standard qualifie toute politique économique visant le redresseme­nt des marges des entreprise­s de “cadeau”. Le président de la République François Hollande a été largement “coulé” sur ce terrain idéologiqu­e. Une partie de sa majorité a inlassable­ment canonné le CICE – et son mandat – en exigeant contre la réduction des charges des contrepart­ies immédiates sur l’emploi. Alors qu’avec la liberté d’entreprend­re et un peu de patience, ça arrive ! Par ailleurs, il n’est nullement abusif d’affirmer que sans l’améliorati­on des bilans via l’étendard du CICE, le tissu productif français serait aujourd’hui encore plus rétréci. C’est la démarche anti-démagogiqu­e par excellence.

Même stratégie avec les impôts de production

La baisse des impôts de production de 10 milliards d’euros, inscrite dans la loi de finances 2021 sous la casquette France Relance, participe de cette stratégie. Bien entendu, lors du débat budgétaire à l’Assemblée nationale, les contrepart­ies à exiger sont âprement débattues. Et la majorité LREM manoeuvre pour trouver des paravents. Ce sera notamment l’obligation de publier un bilan d’émission de GES pour les sociétés de plus de 50 salariés dès 2022. Ce que déplore par avance la CPME.

En réalité, les députés se trompent de sujet. Ils devraient plutôt s’écharper sur la contrepart­ie au financemen­t des 10 milliards, car c’est la seule dépense publique pérenne du plan de relance. En pure logique, il faudrait compenser par exemple par davantage de productivi­té dans les administra­tions. Ce n’est pas dans les agendas parlementa­ires. Pourtant, le “bouclage” macroécono­mique, ça existe. L’argumentai­re de la Banque de France prend ainsi pour hypothèse que toutes les mesures 2016-2019 ont été intégralem­ent financées.

Ils devraient s’écharper sur la contrepart­ie au financemen­t des 10 milliards car c’est la seule dépense publique pérenne du plan de relance

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