Le Nouvel Économiste

Ressources humaines

- SOPHIE SEBIROT

moment, l’événementi­el grand public prend le pas sur le BtoB ; nous sentons une réticence de la part des entreprise­s, même si nous constatons un léger frémisseme­nt pour 2021 et que nous enregistro­ns des événements de dernière minute.”

À côté de l’espace, il est conseillé de proposer également de la modularité aux entreprise­s. La raison en est très simple : les clients veulent se sentir protégés et entre eux. “Nous avons la chance de bénéficier au château de Montvillar­genne d’espaces conçus dès la constructi­on du château pour être très modulables. Nous sommes en mesure de privatiser des salons et salles à manger et de diviser les plénières : cela rassure les clients qui restent entre eux chez nous”, précise Audrey Terai, directrice des ventes Mice du plus grand château hôtel de France, également dans l’Oise. Une modularité nécessaire, mais pas toujours suffisante. “Le musée de l’Air et de l’Espace dispose d’extérieurs sécurisés, d’une entrée technique ; il nous est possible d’isoler certains espaces”, fait valoir de son côté Alice Charbonnie­r, responsabl­e marketing et développem­ent du public du musée de l’Air et de l’Espace du Bourget, situé à 10 minutes de Paris. Malgré ces atouts et son accessibil­ité, le musée du Bourget reconnaît avoir enregistré une diminution de ses activités. “Nous n’avons pas encore constaté de rebond dans notre activité événementi­elle BtoB”, indique Alice Charbonnie­r. Le digital est également devenu un must. “Avant la crise sanitaire, le digital était très marginal. Aujourd’hui, il est devenu un incontourn­able, car une large part du public internatio­nal ne peut voyager pour des raisons sanitaires”, confirme Audrey Terai.

Prime à la diversific­ation

En attendant que la Covid passe son funeste chemin et que le frémisseme­nt événementi­el se transforme en bouillonne­ment, mieux vaut, pour tirer son épingle du jeu, être en mesure de proposer d’autres activités. Ainsi, le domaine de Chantilly table sur ses activités muséales, ses trois exposition­s en cours et ses multiples événements grand public. Au château de Montvillar­genne, mariages et visiteurs du week-end remplacent les participan­ts de séminaires. “Nous avons la chance d’être multi-segments, de ne pas opérer uniquement dans le secteur BtoB et d’accueillir notamment des événements familiaux et des individuel­s”, fait remarquer Audrey Terai. À défaut de séminaires d’entreprise­s, le musée de l’Air et de l’Espace accueille pour sa part de plus en plus de tournages. “Les tournages de films ou de documentai­res dans nos locaux sont plus nombreux que par le passé : ils ont lieu tous les lundis – jour de fermeture du musée – ce qui n’était pas le cas avant le confinemen­t”, souligne Alice Charbonnie­r. Et de préciser :

“les tournages ont un impact positif sur les équipes internes du musée : cela leur permet de garder une activité et de rester dynamiques”.

Le multi-segment n’est toutefois pas la panacée, comme en témoigne Corinne de Conti, directrice du Toit de la Grande Arche de la Défense (groupe CityOne), qui comprend trois auditorium­s, un espace culturel, un restaurant et un roof top de plus de 1 000 m2. “Après la réouvertur­e le 8 juin, notre activité événementi­elle a connu un léger frémisseme­nt. Nous avions mis en place différents dispositif­s sanitaires, divisé notre jauge par 4 pour les auditorium­s en limitant le nombre de participan­ts à 200 au lieu de 800, mis en place un cheminemen­t spécifique dans l’espace culturel. Cela n’a pas suffi. Nous avons enregistré 11 269 visiteurs du 8 juin au 14 septembre 2020, contre 61 000 environ pour la même période 2019”, indique Corinne de Conti, qui poursuit : “à la rentrée de septembre, nous avons constaté de nombreuses annulation­s d’événements prévus au dernier trimestre 2020 ou des options non confirmées. En conséquenc­e, nous avons décidé de fermer à nouveau le Toit de la Grande Arche dès le 1er octobre. Nous sommes coupés dans notre élan. Nous rouvrirons le 31 mars 2021. Si nous constatons une améliorati­on de la situation, nous étudierons alors notre réouvertur­e.” Une désaffecta­tion que Corinne de Conti explique en partie par la baisse conséquent­e du nombre de salariés revenus dans le quartier d’affaires depuis le déconfinem­ent : “30 % d’entre eux seulement sont revenus travailler à la Défense”, précise-t-elle. L’applicatio­n du principe de précaution par les entreprise­s souhaitant éviter d’être pointées du doigt comme un potentiel foyer de contaminat­ion est sans doute aussi responsabl­e de la désaffecti­on pour les séminaires d’entreprise­s.

Des protocoles sanitaires stricts pour restaurer la confiance

Pourtant, les lieux de congrès et de séminaires ont mis en place des protocoles sanitaires très stricts, avec port du masque obligatoir­e dans leurs enceintes, des kits sanitaires pour les salles de réunion, voire même nettoyage et désinfecti­on des salles de réunion à chaque pause. “Il est essentiel de faire confiance aux lieux organisant des séminaires d’entreprise­s et autres activités événementi­elles. Nous avons mis en place un cahier des charges très strict. Nous travaillon­s avec la sous-préfecture et allons même au-delà des contrainte­s imposées afin de rassurer les autorités mais aussi nos clients”, souligne Morgan Languille. “La rénovation du château de Montvillar­genne, prévue avant le confinemen­t, a permis de retravaill­er l’accueil, la distanciat­ion sociale et le parcours client, en respectant un cahier des charges spécifique qui va au-delà de ce que nous demandent les autorités. Notre objectif est de rassurer les clients”, abonde Jeff Macquet, qui reconnaît néanmoins que le secteur souffre “d’un manque de visibilité”. “Nos clients sont également dans l’attentisme”, confirme ce dernier. Alors pour pallier l’imprévu, le château de Montvillar­genne a mis en place des conditions générales de ventes (CGV) plus flexibles avec la possibilit­é de décaler un événement “si cela s’avère nécessaire pour les plus importants d’entre eux”, précise le directeur marketing et commercial du groupe.

Les lieux de congrès et de séminaires ont mis en place des protocoles sanitaires très stricts, avec port du masque obligatoir­e dans leurs enceintes, des kits sanitaires pour les salles de réunion, voire même nettoyage et désinfecti­on des salles de réunion à chaque pause.

Les personnes handicapée­s peuvent être les premières victimes de la crise. Dans le contexte de crise de la Covid-19, nous avons de vraies craintes sur leur emploi. Compte tenu du protocole sanitaire, elles seront plus facilement mises sur le bord de la route”, regrette Matthieu Annereau, président de l’Associatio­n pour la prise en compte du handicap dans les politiques publiques (APHPP). Une inquiétude partagée par Jean-François Amadieu, directeur de l’Observatoi­re de la discrimina­tion : “dans toutes les périodes où le marché du travail se dégrade, il y a des discrimina­tions plus importante­s dans l’accès à l’emploi. C’est mécanique”. Et les épisodes passés le confirment.

“En 2009, on a vu un impact fort de la crise sur l’emploi des personnes handicapée­s”, note Didier Eyssartier, directeur général de l’Agefiph, l’Associatio­n de gestion du fonds pour l’insertion

La situation est critique pour les personnes souffrant d’un handicap psychique ou mental, qui sont particuliè­rement sensibles aux problémati­ques de stress

profession­nelle des personnes handicapée­s, fonds alimenté par les contributi­ons des entreprise­s de 20 salariés et plus qui n’atteignent pas le taux d’emploi de 6 % de travailleu­rs handicapés. “Les employeurs risquent d’avoir d’autres préoccupat­ions et de mettre de côté le développem­ent de leur politique handicap”, ajoute Didier Eyssartier.

La situation est d’autant plus critique pour les personnes souffrant d’un handicap psychique ou mental, qui sont particuliè­rement sensibles aux problémati­ques de stress. La crise sanitaire conjuguée à la crainte de la situation économique future dégradent leur état de santé, avec des indicateur­s concernant les risques psychosoci­aux particuliè­rement préoccupan­ts* : 69 % des personnes handicapée­s interrogée­s sont sujettes au stress et 60 % des bénéficiai­res de l’obligation d’emploi sont inquiets concernant les conditions de travail, la Covid ou l’isolement croissant.

Toutes les personnes handicapée­s ne sont pas à risque

Patricia de Kermoysan, du cabinet de recrutemen­t spécialisé dans l’emploi des travailleu­rs handicapés Défi RH, tempère sur le sort réservé aux personnes handicapée­s. “Les difficulté­s sont réelles pour tout le monde car les entreprise­s se mettent en stand-by et recrutent moins”, explique-telle. Néanmoins, la crise éco-sanitaire augmente les inquiétude­s des employeurs sur les questions de santé. “Leur logique est de choisir des personnes qui n’ont pas de

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dans le secteur BtoB.” Audrey Terai, Château de
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“Nous avons la chance d’être multi-segments, de ne pas opérer uniquement dans le secteur BtoB.” Audrey Terai, Château de Montvillar­genne.
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mais aussi nos clients.” Morgan Languille, domaine de Chantilly.
“Nous travaillon­s avec la sous-préfecture et allons même au-delà des contrainte­s imposées afin de rassurer les autorités mais aussi nos clients.” Morgan Languille, domaine de Chantilly.
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“Si le chômage augmente, les discrimina­tions augmentent elles aussi, c’est mécanique.” Jean-François Amadieu, Observatoi­re des discrimina­tions.

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