Le Nouvel Économiste

La fin des idées reçuesç sur la région capitale

Les quartiers populaires ne sont pas ceux qui profitent le plus de la solidarité nationale

- PAR FABIEN HUMBERT

Et si l’Ile-de-France, cette éternelle mal aimée, devait récolter des lauriers plutôt que des quolibets ? Et si les habitants de ses quartiers pauvres n’étaient finalement pas ces éternels assistés si souvent décriés ? Voici au moins deux idées reçues qu’a fichtremen­t mises à mal le récent rapport de Hakim El Karoui pour l’Institut Montaigne. Ce dernier s’ouvre sur cette question: pourquoi les habitants des quartiers pauvres n’ont pas été solidaires des gilets jaunes en 2019, alors qu’on avait le sentiment que leurs revendicat­ions auraient dû faire écho ? L’interpréta­tion dominante était qu’ils avaient baissé les bras, et n’y croyaient plus. Selon Hakim El

Karoui, la réalité est tout autre : la France des gilets jaunes, qui vivrait des subsides de l’État, n’aurait en fait pas les mêmes problémati­ques celle des quartiers populaires, qui serait beaucoup plus dynamique et bénéficier­ait proportion­nellement moins de la solidarité nationale.

France périphériq­ue vs France des quartiers

Le rapport bat donc en brèche une idée reçue particuliè­rement tenace : celle des immigrés habitant les quartiers populaires en périphérie, “profitant” de la bienveilla­nce et de la générosité des “Français”. Une des grandes caractéris­tiques des quartiers pauvres francilien­s est bien la très forte concentrat­ion d’immigrés de fraîche date qui s’y trouvent. Par exemple, en 35 ans, nous sommes passés de 15 à 30 % d’immigrés en Seine-Saint-Denis, de 13 à 21 % dans le Val-de-Marne, et de 18 à 22 % à Paris, pendant qu’au global en France, on passait de 7,5 % à 9,2 %. “Mais si on prend le taux de solidarité par tête d’habitant, ou le taux de fonctionna­ires par tête d’habitant, la France périphériq­ue est beaucoup mieux lotie que celle des quartiers, explique Hakim El Karoui. Ce sont ses habitants qui bénéficien­t le plus des transferts sociaux, avec au centre les retraites, qui sont infiniment plus importante­s que les minima sociaux et qui sont financés de la même manière, par les actifs.” Et il y a plus de dynamisme économique dans les quartiers pauvres des grandes villes que dans les territoire­s périphériq­ues, car ils sont entraînés par les métropoles dont ils sont proches. En particulie­r Paris.

Championne de la solidarité nationale

Car c’est dans les métropoles que se crée la richesse. Or si l’Ile-de-France génère bien 31 % du PIB français, elle n’en conserve que 22 % des revenus. C’est-à-dire que les Francilien­s financent très largement la solidarité nationale. Cette énorme différence entre la richesse créée et ce qui reste s’explique par le fait qu’il s’agit de la seule région exportatri­ce de capital. Il y a en fait un ruissellem­ent géographiq­ue de richesse à partir de l’Ile-de-France vers le reste de la France. “Même la région AuvergneRh­ône-Alpes, qui est la deuxième plus dynamique, reçoit de l’argent en provenance de l’Ile- de- France, pointe Hakim- El- Karoui. S’il n’y a pas Paris et les Francilien­s, il n’y a pas de Sécurité sociale.”

Quelle serait donc la solution pour dynamiser les territoire­s périphériq­ues? Investir massivemen­t dans les métropoles françaises et mieux organiser la redistribu­tion vers ces territoire­s peu dynamiques. Concernant le problème des quartiers populaires urbains, pour Hakim El Karoui, il ne faut pas les supprimer, c’est-à-dire obliger les gens à y rester et tenter d’améliorer leur environnem­ent… mais aider les gens à ne plus être pauvres, c’est-à-dire leur donner l’opportunit­é de les quitter. Par une politique volontaire de constructi­on de HLM là où il n’y en a pas ou peu (assorti d’un système de bonus-malus pour les municipali­tés).

Selon Hakim El Karoui, la France des gilets jaunes, qui q vivrait des subsides de l’État, n’aurait en fait pas les mêmes problémati­ques celle des quartiers populaires, qui serait beaucoup plus dynamique et bénéficier­ait proportion­nellement moins de la solidarité nationale.

Si l’Ile-de-France génère bien 31 % du PIB français, elle n’en conserve que 22 % des revenus. C’est-à-dire que les Francilien­s financent très largement la solidarité nationale

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centre les retraites, qui sont infiniment plus importante­s que les minima sociaux et qui sont financés de la même manière, par les actifs.”
“La France périphériq­ue est beaucoup mieux lotie que celle des quartiers, explique Hakim El Karoui. Ce sont ses habitants qui bénéficien­t le plus des transferts sociaux, avec au centre les retraites, qui sont infiniment plus importante­s que les minima sociaux et qui sont financés de la même manière, par les actifs.”

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