Le Nouvel Économiste

L’actualité des départemen­ts d’Ile-de-France

Les régions Ile-de-France et Grand Est soutiennen­t le programme de recherche de substituts aux néonicotin­oïdes du groupe semencier Delpanque

- PAR ANNE THIRIET

En 2020, la production de betteraves sucrières française a enregistré une baisse de 30 %. En cause, la jaunisse de la betterave, un virus transmis par les pucerons, que l’interdicti­on de l’utilisatio­n des néonicotin­oïdes n’a pas permis d’endiguer. Sentant le problème venir, le spécialist­e des semences Deleplanqu­e avait déjà lancé un programme de recherche interprofe­ssionnel, baptisé Modefy, pour identifier des solutions alternativ­es aux néonicotin­oïdes. Ces produits phytosanit­aires, considérés comme des tueurs d’abeille, ont été interdits en 2018.“Nous avons initié notre projet à partir de l’été 2019. Le coordinate­ur vient d’entrer en fonction et une station de recherche ouvre dans l’Oise. L’importante crise qu’ont connue les betteravie­rs en 2020 n’a fait que confirmer la nécessité de cette démarche”, souligne Éric Verjux, président du groupe installé dans les Yvelines.

L’année 2020 a été particuliè­rement ravageuse. La production de betteraves, qui est en moyenne de 36 millions de tonnes par an, est estimée à 25 millions de tonnes, et les pertes des producteur­s à 280 millions d’euros, selon l’Associatio­n interprofe­ssionnelle de la betterave et du sucre. Une situation qui s’explique par le cumul de différents facteurs : l’interdicti­on des néonicotin­oïdes, l’absence de traitement de remplaceme­nt efficace et le pullulemen­t des pucerons verts, vecteurs de la maladie, en raison d’un hiver particuliè­rement doux.

Génétique, agronomie et agroécolog­ie

Le programme de recherche, monté avec l’Institut technique de la betterave (ITB) et l’Institut national de recherche pour l’agricultur­e, l’alimentati­on et l’environnem­ent (Inrae) de Colmar, mêle agronomie, génétique et agroécolog­ie. “Tout le monde attend une solution génétique qui sera la vraie solution. Mais il faut un peu de temps pour créer des plantes tolérantes ou résistante­s”, explique Laurent Boisroux, directeur de l’agronomie, qui mise sur 2024. “Là, il y a urgence.”

Des premiers résultats sont prévus d’ici 2022- 2023. L’ITB se concentrer­a sur la connaissan­ce de la maladie et l’agroécolog­ie. “Il existait trois virus, nous en avons identifié un quatrième cette année. Nous allons observer en champ, en serre et en laboratoir­e comment ils agissent, et pourquoi une betterave attire plus qu’une autre les pucerons”, détaille Vincent Laudinat, directeur général de l’Institut.

Autre axe : le remodelage du paysage agricole. “Il pourrait s’agir par exemple de cultiver une bande de fleurs ou de plantes attractive­s pour les pucerons afin de détourner leur intérêt, ou de faire pousser des plantes qui attirent des auxiliaire­s, comme les coccinelle­s, qui sont des prédateurs pour les pucerons”, cite Laurent Boisroux. Ce qui permettrai­t de prendre de premières mesures en matière de prévention. L’Inrae de Colmar s’occupera d’étudier à la loupe le comporteme­nt alimentair­e des pucerons, afin de sélectionn­er des gênes de tolérance ou de résistance dans les betteraves.

Dérogation pour les néonicotin­oïdes

Le coût est estimé à 3,9 millions d’euros, dont 1,2 million provient de la région Ile-de-France et 320 000 de la région Grand Est. Des discussion­s sont en cours avec les Hautsde-France. “L’Ile- de- France est une région betteraviè­re importante avec 1 800 planteurs et 45 000 hectares cultivés, rappelle Alexandra Dublanche, vice- présidente chargée du développem­ent économique et de l’attractivi­té, de l’agricultur­e et de la ruralité à la région. Nous avons aussi soutenu les planteurs dans le cadre d’une aide sécheresse d’urgence, qui sera complétée par un second volet.”

Les réflexions autour de la jaunisse ont connu une accélérati­on ces derniers mois. La forte crise de 2020 a poussé la filière à lancer, en septembre, un plan national de recherche et d’innovation sur la jaunisse, que le gouverneme­nt soutient à hauteur de 7 millions d’euros sur 3 ans, ainsi qu’un plan de prévention. “Dans le cadre du plan de recherche, nous avons soumis un projet pour construire un outil afin d’évaluer les variétés de betteraves”, indique Laurent Boisroux. En attendant des résultats, une loi est parue au JO le 15 décembre dernier ouvrant la possibilit­é de réutiliser des néonicotin­oïdes jusqu’au 1er juillet 2023. Un arrêté a été également été publié le 6 février 2021 pour autoriser l’utilisatio­n de semences traitées avec ces produits phytosanit­aires, avec des restrictio­ns, durant 120 jours.

“Tout le monde attend une solution génétique qui sera la vraie solution. Mais il faut un peu de temps pour créer des plantes tolérantes ou résistante­s”

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l’absence de traitement de remplaceme­nt efficace et le pullulemen­t des pucerons verts, vecteurs de la jaunisse.
L’année 2020 a été particuliè­rement ravageuse pour la betterave française. Une situation qui s’explique par l’interdicti­on des néonicotin­oïdes, l’absence de traitement de remplaceme­nt efficace et le pullulemen­t des pucerons verts, vecteurs de la jaunisse.

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