« Outil monstrueux »
La critique vient de la droite qui avait pourtant, en 2012, voté une loi afin de mettre en place un fichier similaire utilisable à des fins judiciaires. A l’époque, celui-ci avait été baptisé « le fichier des gens honnêtes » puis censuré par le Conseil constitutionnel le jugeant contraire à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Un de ses opposants les plus virulents était alors le socialiste Jean-Jacques Urvoas, soulignant « la création d’un fichier à la puissance jamais atteinte dans notre pays puisqu’il va concerner la totalité de la population. Aucune démocratie n’a osé franchir de pas ! » Aujourd’hui ministre de la Justice, il affirme que le TES « n’est pas en contradiction avec ce que j’ai défendu en 2012 car il tient compte des censures que le Conseil constitutionnel avait prononcées » et répond « à l’objectif d’un juste équilibre entre la protection de l’identité de nos concitoyens et la garantie des libertés publiques ». Malgré les explications du gouvernement, cherchant à rassurer, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) relève, par la voix de sa présidente, Isabelle Falque-Pierrotin, « un fichier national qui concerne tous les Français, cela n’a jamais été fait et je crois que cela nécessite un débat au parlement ». Spécialiste des questions numériques, la députée (exEELV) Isabelle Attard s’inquiète aussi, dans les colonnes du magazine Marianne. « Quand François Hollande avoue s’être servi de l’Etat d’urgence pour mater des militants écologistes pendant la COP21, comment avoir confiance avec ce fichier ? Pour moi, c’est clair, il sera détourné de son but initial, affirme-t-elle. Aux Etats-Unis, les données biométriques de plus de cinq millions de personnes ont récemment fuité. Ces informations ont une valeur commerciale faramineuse ! Il est évident que des piratages auront lieu pour ensuite vendre ces renseignements. » Son collègue socialiste, Gaëtan Gorce, appelle quant à lui à renoncer à cet « outil monstrueux » et propose des solutions alternatives. Il plaide pour l’introduction dans la Carte d’identité d’un composant électronique comportant les données biométriques et le chiffrage des données avec la clé secrète de l’Etat lors de la création de la pièce d’identité. Une puce sécurisée protégeant davantage les libertés publiques, comme le confirme la CNIL, mais « toujours pas mise en oeuvre ».