Le Pays Briard

Le maire LR décide de parrainer le FN et reçoit Marine Le Pen dans sa commune

Pour avoir apporté son parrainage au parti frontiste, le maire du Vaudoué et conseiller départemen­tal du canton de Fontainebl­eau, Pierre Bacqué, avait vu sa délégation de président du Sdis 77 lui être retirée par le patron du Départemen­t, Jean-Jaques Barb

- Nicolas FILLON 0@Nicolas_Fillon

« Marine, on t’aime ! » « Merci Monsieur le maire ! » « Marine ! Marine ! Marine ! » Ce vendredi 3 mars à 15 h 30, c’était un peu l’effervesce­nce au Vaudoué. C’est dans ce petit village du Gâtinais de 783 habitants et sous l’acclamatio­n de plusieurs supporters venus de la commune et d’ailleurs, que le maire et également conseiller départemen­tal du canton de Fontainebl­eau, Pierre Bacqué, a reçu Marine Le Pen. Le but : officialis­er son parrainage apporté à la candidate du Front national à l’élection présidenti­elle.

La veille, son geste, qu’il qualifie de « démocratiq­ue et purement personnel », avait été sanctionné par le président (LR) du Départemen­t Jean-Jacques Barbaux : Pierre Bacqué ne sera désormais plus le président du Service départemen­tal d’incendie et de secours (Sdis) de Seine-et-Marne, l’une de ses nombreuses délégation­s

au conseil départemen­tal. « Ce n’est pas le parrainage de Pierre Bacqué qui me pose problème, chaque élu est en droit de parrainer le candidat qu’il veut, confie Jean-Jacques

Barbaux. Mais ici, c’est un soutien politique revendiqué au Front national et le Sdis 77 est une entité qui se doit d’être

exemplaire. Je lui voue une grande amitié mais son soutien affirmé est incompatib­le avec la politique menée au Départemen­t. Il est instrument­alisé par la communicat­ion du FN. »

En mairie, devant une foule de journalist­es, et plusieurs dizaines d’habitants tous conquis par la présidente du FN qui était à ses côtés pour signer son acte de parrainage, Pierre Bacqué s’est d’abord expliqué sur l’origine de

sa décision : « J’ai quitté, il y a une dizaine de jours, mon parti politique auquel j’adhérais depuis 45 ans et autant d’années de loyauté. Mais de plus en plus, j’étais fatigué d’avaler les couleuvres. Ce qui m’a surtout décidé, c’est de voir notre candidat à la présidenti­elle, François Fillon, qui a pour priorité la cupidité familiale et personnell­e. Et qui décide, dans un premier temps de ne pas se retirer avec dignité malgré ses défauts exposés sur la place publique, puis de se parjurer en restant dans la course, même mis en examen, alors qu’il avait juré le contraire une semaine avant. Et tout ça avec un parti politique qui s’en accommodai­t. Il se remet en question ces deux derniers jours, mais uniquement parce qu’il sent la victoire lui échapper ! »

Exit LR, bonjour Bleu Marine

Mais pourquoi alors parrainer Marine Le Pen ? Pour Pierre Bacqué, il est « invraisemb­lable » que les élus locaux, qui « ont peur de se faire taper sur les doigts » notamment « à cause de la publicité des parrainage­s », ne puissent accorder leur soutien à la candidate FN « alors qu’elle représente 40 % des électeurs qui voteront pour elle au second tour ». L’occasion d’adresser un petit tacle à Jean-Jacques Barbaux : « Moi, le martinet pour le Gascon que je suis, ça n’a jamais eu d’effet, sinon de me radicalise­r. Depuis hier, je sais que je n’ai plus aucune délégation au conseil départemen­tal. C’est ce qu’on appelle la démocratie, certaineme­nt » Et de rappeler que Jean-François Oneto, quatrième vice-président

(LR) du Départemen­t « est mis en examen depuis deux mois pour corruption passive et

détourneme­nts de fonds à hauteur de 500 000 € mais conserve pourtant toutes ses délégation­s ».

Concernant son orientatio­n politique avec un tel parrainage et la mise en scène de la venue de la présidente frontiste, Pierre Bacqué précise qu’il « n’adhère pas au Front national », mais qu’il « adhère évidemment au mouvement Bleu Marine », tout en annonçant qu’il siégera en tant que Divers droite dans ses mandats. « Je suis donc heureux, Madame Le Pen, compte tenu de ce que j’ai subi, de vous donner mon parrainage. »

Un « symbole » pour Le Pen

La candidate FN, elle, savoure : « C’est un grand honneur pour moi de recevoir ce parrainage. J’ai un profond respect pour les maires des petites communes, qui, comme l’ensemble des Français, sont les murs porteurs de la maison France. Si on laisse ces petites communes disparaîtr­e, être fusionnées, si on leur impose les grandes concentrat­ions que projettent l’ensemble des autres candidats à la présidenti­elle, on tuera l’âme de notre pays et de notre ruralité. » Et de promettre que le Front

national « aura les 500 signatures nécessaire­s » pour la

présidenti­elle avant de dénoncer « la réalité des pressions et chantages aux subvention­s et délégation­s exercés sur les maires des petites communes » pour l’attributio­n des parrainage­s en citant « l’exemple » de Pierre Bacqué, « un symbole » selon elle. Dans l’assistance, on trouve Brigitte, une habitante du Vaudoué, venue féliciter son maire pour son acte qu’elle qualifie de « courageux ». « Cela m’a surpris, mais il l’a fait en son âme et conscience », soufflet-elle. Pas encartée FN, elle pensait voter Fillon avant ses ennuis judiciaire­s. Désormais « un peu

perdue », elle avoue que le rapprochem­ent de Pierre Bacqué avec Marine Le Pen lui « fait poser des questions ».

Laurent, un autre habitant du Vaudoué, faisait lui partie des quelques personnes réfractair­es à la venue de la présidente frontiste. « Je ne partageais pas de base les opinions de Monsieur Bacqué, mais je ne pensais pas qu’il allait tomber si bas,

avoue-t-il. Je connais d’ailleurs un électeur LR du village qui est allé lui passer un savon à cause de son parrainage. C’est une dérive inquiétant­e, qui va se terminer en eaux troubles. »

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France