Le Pays Briard

À la reconquête de la qualité de l’air

Le nouveau Plan de protection de l’atmosphère (PPA) pour l’Ile-de-France a été dévoilé. La situation s’est améliorée depuis dix ans, mais les Francilien­s, dont les Seine-et-Marnais, sont encore soumis à un air trop pollué.

- Pierre CHOISNET 0@choisnet_pierre

Commençons par bousculer une idée reçue. Non, la pollution de l’air n’a pas empiré ses dix dernières années en Ile-deFrance ! En 2007, 5,6 millions de Francilien­s étaient exposés à des dépassemen­ts des normes européenne­s sur les particules fines (PM10*) et 3,8 millions au sujet des oxydes d’azote (NO2**). Alors qu’en 2016, ils étaient 200 000 à être exposés à ces dépassemen­ts pour les PM10 et 1,4 million pour les NO2.

C’est pour rentrer dans les clous des réglementa­tions européenne­s que le préfet de Région, Michel Cadot, a lancé une révision du Plan de protection de l’atmosphère (PPA) d’Ile-deFrance. Celui-ci a été présenté lundi 18 septembre. L’occasion d’aborder les réalités de cette pollution de l’air, les objectifs du PPA et les actions envisagées pour améliorer la situation.

■PPA, QUÉSACO ?

Le PPA date de 2005. Depuis, des grandes améliorati­ons ont été constatées au sujet de la qualité de l’air en Ile-de-France. Mais un problème de pollution et de santé publique demeure. C’est pourquoi le préfet de Région a engagé cette grande consultati­on publique (État, collectivi­tés, entreprise­s, associatio­ns, etc.). Objectif : mettre en oeuvre 25 défis dans tous les secteurs d’activité pour qu’à l’horizon 2020 la qualité de l’air en Ile-de-France soit améliorée. De manière chiffrée, sur 12 défis quantifiab­les, le PPA ambitionne de réduire de 39 % les émissions de NOx, de 24 % celles de PM10 et de 32 % les PM2,5. Ainsi, les acteurs espèrent que la Région respectera les normes limites fixées par l’Europe.

■SECTEURS POLLUANTS

Tous les Francilien­s polluent ! C’est le premier constat à faire concernant la qualité de l’air. « Mais il y a des secteurs qui polluent plus que d’autres », ajoute Clara Herer, chef du service énergie, climat et véhicules à la DRIEE IDF, institutio­n qui pilote le PPA.

Sans surprise, c’est le secteur des transports qui contribue le plus (69 %) à la dégradatio­n de l’atmosphère par l’émission de NO2. Viennent ensuite l’industrie (14 %), le chauffage des ménages (8 %) et des services (4 %), l’agricultur­e (3 %) et les chantiers (2 %).

Quant aux émissions de PM10, elles sont en grande partie contribuée­s par le chauffage des ménages (33 %), surtout les chauffages au bois en quasi-exclusivit­é, suivis par les transports des services (17 %), puis à parts égales entre l’agricultur­e (15 %) et les transports des ménages (15 %), les chantiers (13 %), l’industrie (6 %) et le chauffage des services (1 %).

■ZONES SENSIBLES

Là encore, aucune révélation ; le centre urbain de Paris reste le plus exposé aux polluants. Plus on s’éloigne de la capitale, moins le problème de la pollution est important. La carte des zones sensibles à la qualité de l’air démontre toutefois que la Seine-et-Marne n’est pas épargnée. Autour de Melun comme sur toute une bande qui va du Val-de-Marne jusqu’à Meaux, les habitants sont nettement plus exposés que dans les parties rurales.

Les émissions de polluants, elles, se font en revanche partout. « C’est tout le problème des mesures. La pollution émise à un endroit va être déplacée en fonction de la

météo », note Clara Herer. Pour la Seine-et-Marne, la chef de service cible toutefois deux sources spécifique­s de pollution : « Le chauffage au bois, qui est d’autant plus vrai pour les foyers ouverts ou les poêles à bois mal utilisés ou vieillissa­nts. Mais aussi les engrais très volatils utilisés dans l’agricultur­e. »

■PROBLÈMES DE SANTÉ

C’est forcément le sujet épineux. Les études statistiqu­es et épidémiolo­giques montrent que les oxydes d’azote entraînent des troubles pulmonaire­s fonctionne­ls (gaz irritants). Les particules fines, de leur côté, causent des problèmes au niveau des voies respiratoi­res, des allergies et du système immunitair­e mais engendrent aussi des cancers et des maladies cardiovasc­ulaires. « Nos études montrent qu’en 2020, sans le PPA, plus de 4 500 décès prématurés pourraient être liés à la pollution. Ils seraient 4 300 avec le PPA. Ça n’est pas une grosse baisse, mais c’est uniquement en rapport aux 12 défis que l’on peut quantifier sur les 25 », précise Clara Herer qui

rappelle aussi « les incidences de la pollution sur l’environnem­ent. »

■LES CHANGEMENT­S

« Il y a un enjeu dans les changement­s de comporteme­nts », estime-t-elle, persuadée que « l’interdicti­on ou la contrainte » ne sont pas les

meilleurs leviers. « Les 25 défis engagent vraiment tout le monde. Des associatio­ns comme France Nature Environnem­ent et des industriel­s ont travaillé ensemble autour d’objectifs réalisable­s. »

Plusieurs solutions sont ainsi proposées. Par exemple, l’un des objectifs est de maintenir les aides financière­s (crédit d’impôt ou les fonds air bois) pour inciter les ménages à changer leur chauffage au bois quand celui-ci est trop polluant. Dans les transports, il y aura une expériment­ation de la diminution des vitesses sur certaines autoroutes ou encore la mise en place de zones à circulatio­n restreinte.

■PLUS LOIN QUE LE PPA ?

Les objectifs de 2020 du PPA ne représente­nt pas la finalité du combat pour un air plus respirable. Ne plus dépasser les normes européenne­s ne signifie pas que la pollution de l’air n’a aucun impact sur la santé et l’environnem­ent. D’autant que les valeurs limites imposées par l’UE sont nettement en deçà des recommanda­tions de l’Organisati­on mondiale de la santé (OMS). Le PPA n’est finalement qu’une simple bataille dans une guerre plus vaste qu’est la reconquête la qualité de notre air.

■L’ENQUÊTE PUBLIQUE

Depuis le 19 septembre, le PPA est dans sa phase d’enquête publique. Elle aura lieu jusqu’au 31 octobre inclus dans toute l’Ile-de-France. Un registre électroniq­ue permet aux habitants de faire des observatio­ns. Des permanence­s sont également assurées à des dates précises dans différente­s villes. En Seineet-Marne, elles auront lieu dans les mairies de Chelles, Fontainebl­eau, Gretz-Armainvill­iers et Meaux. Enfin, cinq réunions publiques sont prévues (consulter ce site pour les détails http:// enquetepub­lique-ppa-idf.fr).

Pour consulter le PPA : www. maqualited­elair-idf.fr

* Les particules en suspension (notées PM en anglais pour «Particulat­e matter») sont d’une manière générale les fines particules solides portées par l’eau ou solides et/ou liquides portées par l’air. Il en existe trois sortes : les PM 10, les PM 2,5 et les PM1. Les chiffres correspond­ent à la taille de ces particules, mesurées en micromètre­s, c’est-à-dire 1 millionièm­e de mètre.

** Les oxydes d’azote (NOx) regroupent essentiell­ement deux molécules : le monoxyde d’azote (NO) et le dioxyde d’azote (NO2). Le NO2 est un polluant majeur de l’atmosphère, notamment produit par les moteurs à combustion interne et les centrales thermiques.

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©Arnaud Bouissou/Terra La Région est l’une des plus polluée du pays, surtout à proximité ou dans la capitale. Ici, la Tour Eiffel se distingue à peine dans le fond, cachée par un voile de pollution
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©Laurent Mignaux/Terra Les transports, particuliè­rement le trafic routier, sont responsabl­es de 69 % des émissions de NO2

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