Le Pays Briard

Le ténor Dupond-Moretti plaide devant une salle comble

Le champion des acquitteme­nts, Eric Dupond-Moretti, était au tribunal de Melun, la semaine dernière. L’occasion d’un cours pratique pour les élèves de la fac de Melun. Certains magistrats avaient également fait le déplacemen­t.

- Vanessa RELOUZAT

Dans la salle des pas perdus, où il vient de faire son entrée, toutes les têtes se tournent sur lui. La démarche assurée. C’est vrai qu’il en impose Eric DupondMore­tti. Certains aiment son style, son éloquence, sa grande gueule. D’autres, agacés par ses uppercuts verbaux et son franc-parler parfois pris pour de l’insolence, ne l’apprécient pas. « Ouais, je sais, je suis un gros con (sic) », ironise-t-il, provocateu­r (référence à la polémique après le procès Merah). En tout cas, le pénaliste laisse rarement indifféren­t. Et quand celui-ci vient plaider à Melun, c’est toujours un événement. La semaine dernière, ce ténor du barreau défendait le cas de Youssef, 37 ans, accusé d’avoir assassiné Clément, 24 ans, à Angerville (91), en avril 2012.

Résultat : il fallait se serrer sur les bancs de la salle d’audience qui n’a pas désempli de la semaine. Particuliè­rement bondée, vendredi matin, lors de la plaidoirie de ce champion de l’acquitteme­nt que les étudiants de la fac de droit de Melun n’auraient manquée pour rien au monde. C’est le cas d’Ilyes Kamèche, en troisième année, à 19 ans à peine, et lauréat du concours de plaidoirie et d’éloquence. Ce dernier, lors d’une suspension d’audience, a décidé de ranger son intimidati­on au vestiaire et, d’un pas timide, s’est approché du serial plaideur. « On s’ins- pire beaucoup de ce que vous dites à la fac ».

« Un personnage »

La boulangère d’Outreau, Merah, Kerviel, Treiber, Colonna, Tapie, Benzema mais aussi Mohammed VI, le roi du Maroc : Eric Dupond-Moretti a assuré la défense dans de nombreuses affaires plus ou moins médiatisée­s. Inspirant pour les étudiants et rassurant aussi. « Il défend vraiment. Une remarque qui ne lui convient pas et il attaque, raconte Martin Saint Fort Ichon, un élève de deuxième année. Pourtant, son parcours scolaire n’est pas brillant. C’est réconforta­nt ! » Et sa camarade Chloé Nouaux d’ajouter, impression­née : « Quand on fait des études de droit, Dupond-Moretti est une référence. J’aime sa façon de plaider, de lancer des piques, parfois il est odieux. Il n’hésite pas à attaquer le président, il fait le show, c’est un personnage. » Le rythme, les silences assourdiss­ants, les répétition­s. Rien n’est laissé au hasard chez le pénaliste. « Un roi dans son domaine », commente Laura Cabrera, une autre étudiante, tout sourire.

Des compliment­s à la pelle pour l’avocat aux plus de 141 acquitteme­nts. Un cours pratique mémorable pour les étudiants qui encensent celui qu’ils aimeraient être, dans quelques années. « Je suis très attentif à la forme et, en même temps, à la simplicité, commente Me Dupond-Moretti. J’essaye d’être accessible. Ce ne sont pas les plaidoirie­s grandiloqu­entes du siècle dernier. »

Une reconnaiss­ance égale- ment chez certains confrères, y compris, dans la partie civile. « Il est rompu à l’exercice. C’est toujours impression­nant à voir, même pour un profession­nel, remarque Me Yacout Chachou, avocate au barreau de l’Essonne. Il m’arrive de prendre des notes. »

« La première reconnaiss­ance, c’est celle de ses confrères et celle des étudiants ne me laisse pas insensible, commente Me DupondMore­tti. J’ai effectué la même démarche et j’ai passé beau- coup de temps sur les bancs de la cour d’assises lorsque j’étais étudiant. » À l’heure où nous imprimons, le verdict n’est toujours pas tombé.

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