Le Pays Briard

Vers une suppressio­n des vannages

La réglementa­tion permet aux collectivi­tés à compétence rivière, en l’occurrence à un syndicat intercommu­nal, de supprimer les vannages. Une option privilégié­e mais loin d’être partagée par tous.

- Thomas BARON 0Th_ Baron

La récente crue du Grand Morin a mis en évidence l’utilité des vannages dans la régulation des eaux. Si les pluies diluvienne­s ont rendu difficile le maintien de la rivière dans son lit, l’ouverture des vannes a permis aux eaux de s’écouler et de limiter les dégâts. Cependant, à moyen terme, la question de l’ouverture ou non des vannages pourrait ne plus se poser. La loi Grenelle II, qui vise à prendre des mesures durables en faveur de l’environnem­ent et de l’écologie, oblige les acteurs locaux à mettre en conformité leurs ouvrages.

La suppressio­n des vannages privilégié­e…

Pour le Syndicat intercommu­nal de la vallée du haut Morin (SIVHM), il s’agit des dix-neuf vannages - publics ou privés - installés le long du Grand Morin de Lachy (Marne) à Chauffry. « Nous pouvons modifier les ouvrages de façon à aménager une passe à poissons, mais nous avons aussi la possibilit­é de les supprimer » , indique Roger Revoile, élu à La Ferté-Gaucher et président du syndicat, qui a choisi cette deuxième option. Avec cette loi, les pouvoirs publics entendent assurer une continuité écologique des cours d’eau, c’est-à-dire une libre cir- culation des organismes vivants favorisant leur reproducti­on, leur croissance, leur alimentati­on et leurs abris, et le bon déroulemen­t du transport naturel des sédiments. L’objectif n’est pas tant de supprimer tous les obstacles artificiel­s que de freiner l’érosion de la biodiversi­té et de rendre aux espèces leurs capacités d’adaptation au changement climatique.

Le syndicat a d’ores et déjà monté un dossier pour chaque vannage. C’est qu’il ne fallait pas tarder pour bénéficier des dernières subvention­s de l’État. Roger Revoile : « Si nous répondons vite, nous sommes subvention­nés à hauteur de cent pour cent, mais les subvention­s baisseront si nous attendons… » Il faut dire que le coût du chantier est pharamineu­x : près de 300 000 euros pour chaque vanage !

… mais pas systématiq­ue !

À ce jour, deux vannages ont été supprimés derrière l’entreprise Villeroy & Boch à La FertéGauch­er et au Moulin du Pont à Saint-Rémy-la-Vanne. Un autre, celui près de l’ancienne trésorerie, a été restauré. Car si le syndicat a la possibilit­é d’effacer les vannages du paysage, cette mesure n’est pas automatiqu­e. Des études sont réalisées pour chaque ouvrage afin de mesurer l’impact de son effacement sur les hauteurs d’eau, les berges, la faune sauvage, etc.

« C’est une aberration de laisser l’eau couler »

Mais les vannages sont des éléments importants du patrimoine communal. « Nous faisons confiance aux études faites par des ingénieurs diplômés, déclare Yves Jaunaux, maire de La Ferté-Gaucher. Il n’empêche que certains sont attachés aux vannages. » Luc Neirynck, lui, ne veut pas entendre parler de leur suppressio­n. Et le maire de Jouysur-Morin n’invoque pas qu’un souci patrimonia­l : « C’est une aberration de laisser l’eau couler. Si tous les vannages fonctionna­ient correcteme­nt nous pourrions retenir plusieurs millions de mètres cube d’eau. »

L’avis des pêcheurs

C’est dans ces eaux, parfois profondes, que les associatio­ns de pêche de La Ferté-Gaucher et Jouy-sur-Morin viennent dégourdir leurs cannes à pêche. Les deux AAPPMA entendent l’argument écologique, mais elles auraient aimé être davantage écoutées. « Quand les vannages sont ouverts modérément il n’y a pas de souci, mais quand ils restent ouverts en été nous trouvons des endroits où il n’y a presque plus d’eau. Là, cela crée des problèmes pour les poissons » , affirme Gérard Laviron, trésorier de La Truite du haut Morin. Mais il se veut prudent : « La suppressio­n des vannages ne nous gênera pas trop dès l’instant qu’il y a de l’eau. » En revanche, Roger Hennequin, ancien président du Flotteur Jouyssien, qui pêche en deuxième catégorie, est plus nuancé : « Nous avons besoin d’une continuité écologique, oui, mais aussi halieutiqu­e. L’eau est indispensa­ble pour nous. Si le niveau baisse, les poissons auront moins de caches, ce qui les déstabilis­era. »

La prochaine tranche de travaux devrait intervenir d’ici 2019.

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Tous les vannages ne font pas partie du domaine public, à l’image de celui près du pont des Grenouille­s de La Ferté-Gaucher qui appartient à un particulie­r.
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Roger Hennequin (à gau.) et Gérard Laviron (à droi.), les représenta­nts des AAPPMA de Jouy-sur-Morin et La Ferté-Gaucher.

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