Le Pays d'Auge (Édition Littoral)
La statue voyageuse d’Eugène Cornuché
D’abord installée dans les jardins du casino puis déplacée sur le Boulevard lors des travaux de construction du CID, la statue d’Eugène Cornuché vient encore de déménager. Explications.
Eugène Cornuché est une figure symbolique dans l’histoire de Deauville. Son côté visionnaire et son audace ont permis de redonner naissance à la station balnéaire délaissée. En hommage à l’un de ses fondateurs Deauville a choisi, il y a quelques années déjà, de donner son nom à la route qui passe devant le casino, l’actuel Boulevard Cornuché.
Le buste de l’entrepreneur est ensuite inauguré, le 29 mai 1927, dans les jardins du casino. C’est à cette époque que sur le socle de la statue, implantée au centre des jardins qui font face au casino, on grave le texte qui demeure encore aujourd’hui : « À Eugène Cornuché, La Plage Fleurie » , c’est ainsi que l’on nommait la plage de Deauville à l’époque, plusieurs documents anciens l’attestent d’ailleurs.
Puis, l’ensemble, socle et buste, est déplacé sur le Boulevard qui porte son nom en 1990 lors des travaux du futur Centre international de Deauville, le CID.
Travaux fonctionnels et qualitatifs
Tout récemment, le fondateur de Deauville a dû à nouveau changer de place. En effet, à l’occasion des travaux d’accès à Port-Deauville, rue Mirabeau, Eugène Cornuché a encore déménagé, mais de quelques mètres seulement cette fois pour trôner sur le terre-plein central de la nouvelle voie. « Nous avons embelli, structuré et sécurisé cette artère souligne Guillaume Capard, adjoint au maire en charge de ces travaux. Cette première phase de rénovation est un maillon du lien entre la Presqu’île et Port Deauville voulu par le maire Philippe Augier qui souhaite qu’en sortant de la gare, on puisse rejoindre la plage, à pied ou en vélo, sans croiser de voiture » .
« Dommage qu’il ne regarde pas son oeuvre, remarque Guillaume Capard. J’aurais aimé qu’il soit un peu orienté vers la droite afin de contempler les hôtels et le casino » . L’adjoint au maire poursuit en plaisantant : « En plus il aurait tourné le dos à Trouville qui lui avait tourné le dos en son temps… » .
Cornuché et son oeuvre
Remarquablement mis en valeur, Eugène Cornuché va ainsi « raconter » son histoire aux curieux qui ne la connaissent pas encore.
Né en avril 1867 et fils d’un marchand de vins, le jeune Eugène se lance rapidement dans la restauration. Après avoir été serveur Chez Durant ou au Weber, il est embauché dans le florissant Maxime et Georges. À la mort du gérant de bistrot, celui qui deviendra le « Napoléon des restaurateurs » reprend l’affaire et la rebaptise à l’anglaise, Maxim’s. Attentif à l’essor des stations balnéaires, Eugène Cornuché commence par s’intéresser à Trouville-surMer. À l’élection du nouveau maire, le Casino de Trouville est démoli puis reconstruit contre le souhait de Cornuché, souhaitant l’extension de l’existant. Contrarié, il décide de franchir le pont pour prendre attache avec le maire de Deauville, Désiré le Hoc. Dès lors, Eugène Cornuché prend une place prépondérante dans la refondation d’une ville délaissée. Chargé de construire un nouveau Casino en 1910, l’entrepreneur prend en main l’élaboration de ce projet dont il souhaite un rendu inspiré du petit Trianon de Versailles.
Le casino et les hôtels
Le Casino de Deauville et l’Hôtel Normandy sont inaugurés en novembre 1912, seulement 18 mois après le début des travaux. Disposant de 400 chambres au confort de l’époque, l’Hôtel devient très vite un lieu où des hôtes de marque comme Sacha Guitry, Jean Cocteau ou encore Maurice Chevalier viennent profiter de la station balnéaire. Le succès est tel que la capacité devient rapidement insuffisante. Eugène Cornuché décide alors d’ouvrir un second grand Hôtel nommé Royal, ouvert en 1913. De même, la programmation du Casino est ambitieuse, Eugène Cornuché parvient à faire venir la plus célèbre compagnie de Ballets accompagnée du danseur vedette, Nijinski.
La guerre résonne dans l’ascension de la station balnéaire. À l’issue de cette tragédie, les Années Folles débutent en 1919 et propulsent Deauville dans son premier âge d’or.
Laissant derrière lui une station balnéaire luxueuse et en plein épanouissement, Eugène Cornuché décède à Paris le 1er avril 1926 à 59 ans.