Le Pays Malouin

Roland Beaumanoir : « Ma génération a tout confisqué aux jeunes »

- N.E.

Roland Beaumanoir a annoncé lors de l’assemblée générale de l’US Saint-Malo qu’il laissait la présidence à Yves Fantou. Entretien avec celui qui a tenu les rênes de l’USSM pendant 11 ans, mais qui ne part pas pour autant…

Quel regard portez-vous sur la saison qui vient de se terminer ?

Après une saison difficile, on aurait signé des deux mains pour finir à une telle place. Pour l’équipe fanion [2e en CFA] et la D2 féminine [3e]. Pour l’équipe fanion, on a eu du mal à démarrer, et puis nos adversaire­s nous ont laissé la possibilit­é de revenir. On n’a pas su saisir notre chance, c’est comme ça.

La réserve, qui joue en DH, a aussi fait une super saison, sachant qu’elle a une moyenne d’âge de 21 ans. Notre mission de formation a porté ses fruits. Maintenant, il faut encore aller un peu plus loin. Nos équipes jeunes ne sont pas encore tout à fait au niveau.

Pourquoi quittez-vous la présidence de l’USSM ?

Dans ma vie, j’ai très souvent reproché à des gens de se maintenir au pouvoir. Ma génération pré-soixante-huitarde, et tous les soixante-huitards, on a tout confisqué aux jeunes. J’ai 67 ans. Je pense que je peux encore amener au club un certain nombre de choses. Mais j’ai toujours pensé qu’il fallait laisser la place. Je ne m’enfuis pas. Je vais accompagne­r le conseil d’administra­tion. Mais il ne faut pas aller dans la surenchère, qu’on ne saurait pas assumer. Yves [Fantou] a pris la main, c’est bien.

Cela signifie-t-il un désengagem­ent financier de votre part ?

Non, pas du tout. Je vais encore participer à la préparatio­n du budget cette année.

Comment va évoluer le budget du club puisque son ambition reste de monter en National ?

La saison prochaine, le budget devrait augmenter d’environ 300 000 euros. Mais c’est compliqué. On veut monter en National, or c’est sans doute la division la plus difficile à gérer. Parce que l’on a les obligation­s des profession­nels avec des moyens d’amateurs. Nous ne sommes pas aidés par la Région ou le Départemen­t. Et l’aide que peut nous apporter la Ville est très réglementé­e. Nous, notre modèle économique, c’est de créer un tissu d’entreprise­s autour du club et de n’avoir pas recours à l’excès aux fonds publics. Ce qui n’est pas forcément le cas partout…

C’est-à-dire ? Là, c’est le mercato. On repart chercher des joueurs dans toute la France. Dans les discussion­s, quand on demande à un joueur combien il touchait, il nous répond souvent le double de ce que l’on propose. Il faut dire que dans beaucoup de clubs, ça bricole, pour ne pas dire pire… Les gens avancent souvent des budgets inférieurs au nôtre, sauf qu’ils n’assument pas que cet argent ne sert que leur équipe première. C’est un système soviétique, avec du copinage dans les instances… La moitié des clubs de National/CFA sont en réalité en situation de dépôt de bilan. En plus, l’administra­tion fait tout pour ne pas rendre possibles d’autres modèles.

Comment allez-vous faire alors ?

On a créé une cellule sponsors/mécénat. Il y aura 4-5 membres du club et j’y serai. C’est le nerf de la guerre. Il faut inventer un modèle. Guingamp a mis 30 ans à le faire. Pour moi, c’est un modèle.

Jusqu’ici, on a privilégié le système formation/emploi. Notre discours est de dire aux joueurs : vous ne vivrez pas toujours du foot. Mais il va peut-être falloir réfléchir autrement. En proposant peut-être une formation profession­nelle allégée, ou des emplois à mi-temps seulement, pour que les joueurs puissent jouer encore plus au foot. Par le passé, on a loupé quelques joueurs, parce qu’ils ne voulaient faire que du foot.

Via ce qu’on appelle des contrats fédéraux ?

Oui. Cette saison, nous avions 4 joueurs sous ce type de contrat, sachant que trois avaient choisi de travailler à mitemps à côté. En National, il faut que le modèle évolue et c’est notre ambition.

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