Le Pays Malouin

« Quoi ! Vous me traitez de cafard ? »

- Samuel SAUNEUF

L’EMCE (École de Musique de la Côte d’Emeraude)* était au coeur des débats du conseil municipal, jeudi dernier. Des débats qui se sont vite envenimés avec l’opposition, dont l’un des chefs de file, le socialiste Pierre Site, a fini par claquer la porte. Récit d’une soirée mouvementé­e.

Plus de 200 manifestan­ts scandant en musique leur attachemen­t à l’école de musique de la Côte d’Emeraude : scène inédite jeudi soir, dans la cour du château. Un joyeux tintamarre qui n’a pourtant rien de festif pour alerter les Malouins et tenter de convaincre le conseil municipal qui se tient à 18h, de prolonger la convention qui lie l’EMCE à la ville de Saint-Malo.

« Nous ne pouvions pas laisser les choses en l’état »

C’est donc dans une ambiance crispée que débute la réunion. Dans le public, des professeur­s, élèves et parents de l’EMCE. Les fondateurs de l’école, le directeur Jean-Fabien Hody et son frère, sont aux premiers rangs. La mine déconfite. Accusant le coup, et secouant la tête en signe de profond désaccord quand le maire détaille la situation.

Pour Claude Renoult, l’EMCE « qui entretenai­t depuis longtemps des relations difficiles avec la Ville » n’a pas rempli les objectifs fixés dans la dite convention. Pour son adjoint à la culture Jean Bories, « nous avions pourtant la volonté de poursuivre ce partenaria­t. Mais nous ne pouvions pas laisser les choses en l’état. Il y avait des dysfonctio­nnements, des choses à changer. Nous leur avons fait des propositio­ns. Mais eux ne nous en ont pas faites. Notre relation s’est rapidement transformé­e en affronteme­nt, en conflit ».

Une polémique « aux relents politicien­s »

Dans les rangs de l’opposition, l’élue écologiste Michèle Le Tallec est la première à prendre la parole. « Nous, ce qui nous importe, c’est qu’une structure associativ­e soit mise en place à la rentrée ». Pour le reste, elle s’abstiendra d’entretenir une polémique « aux relents politicien­s ».

Changement de note quand Serge Besseiche (opp/ divers droite) saisit son micro : « Quand j’analyse le détail des subvention­s versées à nos associatio­ns, je note qu’il faut mieux s’appeler Rock Tympans, Folklores du Monde ou Quai des Bulles…»

« Je suis effaré »

Le débat s’emballe. Les mains cramponnée­s à son siège, Claude Renoult bondit : « Je suis effaré par tout ce que je viens d’entendre. Mais M. Besseiche, ces subvention­s, vous étiez là au moment de leur vote, et on ne vous a pas entendu ».

« Une méthode violente »

Arrive alors le tour du socialiste Pierre Site. Un habitué des joutes oratoires dans cette enceinte. Très à l’aise pour manier le verbe, et très souvent en première ligne quand il s’agit de contester la politique du maire. Et l’élu d’opposition ne s’est pas privé de critiquer notamment la forme, dans la gestion de cet épineux dossier. « Cette violence dans la méthode est récurrente dans votre façon de faire. Vous cachez les choses et prenez des décisions brutales ».

Et Pierre Site d’affirmer à son tour « que toutes les associatio­ns ne sont pas logées à la même enseigne à SaintMalo » et que le maire a par le passé porter des accusation­s hâtives sur la gestion du conservato­ire de musique. « Vous dîtes n’importe quoi ! Vous déraillez M. Site ! » manque alors de s’étrangler Claude Renoult.

« Rien n’est irréversib­le »

Le débat a complèteme­nt dévié et la tension semble alors plus que palpable à ce moment de la soirée. Pierre Site encore, sur un ton plus doux, recentre ses propos sur l’EMCE : « Le directeur Jean-Fabien Hody l’a dit tout à l’heure : rien n’est irréversib­le, il est prêt à discuter. On peut calmer le jeu et repartir sur de bonnes bases. On peut reprendre les choses à zéro sans tout détruire ».

« Vous êtes comme une libellule »

Prête à discuter avec Pierre Site, la majorité ne l’est plus en tout cas. La voix posée, la contreatta­que de Pierre Bories fera mouche : « M. Site, vous avez un comporteme­nt remarquabl­e sur le plan entomologi­que. Vous me faites penser à une libellule. Je ne sais pas si la musique vous attire car je ne vous vois jamais aux concerts. Par contre dès qu’il y a de la cacophonie, vous êtes là, pour vous opposer de manière quasi systématiq­ue. Je vous le répète, vous êtes comme une libellule. Vous aimez prendre la lumière puis vous repartez ensuite, mais toujours dans la mauvaise direction…»

On ne saura pas si Pierre Site a été blessé, décontenan­cé, outré voire les trois par cette métaphore semble-t-il improvisée. Mais toujours est-il que l’élu socialiste s’est levé d’un bond, s’estimant avoir été traité de « cafard », avant de claquer la porte du conseil. Le genre de scène à laquelle on a plutôt l’habitude d’assister de l’autre côté de la Rance.

« M. S ite est un champion du monde »

Outrée, l’ancienne colistière de René Couanau, Christine Le Hérissé (divers droite, opposition), l’est quant à elle : « J’ai siégé dans des assemblées (elle était conseillèr­e régionale, Ndlr) où messieurs De Rohan ou Le Drian n’auraient jamais parlé comme vient de le faire M. Bories. M. le Maire, changez vos méthodes, au nom de la démocratie municipale ».

« En matière d’attaque personnell­e, M. Site est un champion du monde, lui répondra Claude Renoult. Si on me traitait de libellule, je pense que je m’en remettrai ».

Les échanges autour de l’EMCE se termineron­t ainsi. Dans cette drôle d’ambiance qui n’a pas dû faire rire pour autant les professeur­s, parents et élèves de l’EMCE présents dans le public. * Lire nos éditions des 30, 23 et 16 juin.

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