Le Pays Malouin

Gilles Lurton, l’homme qui n’arrêtait jamais

Gilles Lurton, 53 ans, est l’un des députés les plus assidus à l’Assemblée nationale. Mais aussi un infatigabl­e coureur d’assemblées générales et de fêtes locales le week-end. Rencontre.

- Samuel SAUNEUF

Comme toujours, Gilles Lurton ne passe pas incognito quand il remonte la rue Ville-Pépin, à Saint-Servan. Les « bonjour M. le député » se mêlent aux « salut Gilles ».

L’homme est ici chez lui. C’est son fief, son quartier qui l’a souvent bien aidé à le faire élire. Gilles Lurton prend le temps de bavarder. Comme s’il était en campagne. « J’aime parler avec les gens, corrige-t-il. Député ou pas, c’est dans ma nature. Et c’est mon rôle d’être près d’eux. Les citoyens ont besoin d’échanger avec nous. Et puis, comment pourrais-je les représente­r si je ne suis pas en contact permanent avec eux ? »

« Je n’ai jamais une minute à moi »

Nous sommes vendredi et il n’a pas fini d’en serrer des mains. L’agenda du week-end s’annonce chargé. Très chargé. Conférence, vernissage, assemblée générale, festival de musique, fête des moules, pot des chasseurs, départ de l’Hermione, etc. Une vraie liste à la Prévert. Interminab­le. « Je n’ai jamais une minute à moi ». Et c’est comme ça chaque semaine. Seul moment « de liberté » qu’il entend cette fois-ci s’octroyer, la finale du championna­t d’Europe de football, qu’il a prévu ce dimanche soir de regarder chez des amis. Son jardin, sa passion, une fois de plus attendra : « Il est dans un état…»

Entre 70 et 100 courriers par semaine

Arrivé à sa permanence, ses deux collaborat­eurs malouins ont la tête dans le guidon. Une épaisse pile de courriers trône sur le bureau. « On en reçoit entre 70 et 100 par semaine », précise Christian Avril, son attaché parlementa­ire. « J’étais à fond sur la loi Travail. J’ai pris 1 mois de retard dans mon courrier. Il faut que je rattrape ça cet été », promet le député malouin.

Logements, impôts, électricit­é, eau, etc… On sollicite le député pour tout. On lui tient la jambe pour un rien. On lui demande surtout de l’aide. « J’aiguille, je redirige… Je me fais un devoir de répondre à tout le monde ». Des bénévoles l’aident, lui et ses collaborat­eurs, dans sa tâche depuis sa permanence, place de la Roulais. Ses collègues du Palais Bourbon en font-ils autant ? « Non », lâche-t-il un peu gêné. « Je suis aussi un peu victime de ce que je faisais avant à la mairie ». Où Gilles Lurton officiait sur tous les fronts, dans l’ombre de René Couanau. L’homme à qui il a succédé sur les bancs de l’assemblée et qui lui a mis le pied à l’étrier, il y a 25 ans. « S’il n’avait pas été là, je n’aurai pas eu ce parcours. Il m’a beaucoup appris ».

Le jeune attaché parlementa­ire, qui tutoie aujourd’hui (et apprécie) Emmanuel Macron, se voyait-il un jour député ? « Je n’y pensais même pas. Je ne l’aurais jamais imaginé. Mais j’ai toujours aimé ça. La politique, c’est un choix, une passion, ma vie ».

« 8h - 23h » tous les jours

Et pas un sacerdoce, dit-il, même s’il s’y voue corps et âme. On critique souvent nos parlementa­ires à propos de leurs supposées absences lors des séances à l’Assemblée Nationale. Lui fait partie des bons élèves, selon Nosdeputes. fr. Assidu et bosseur, disent ses collègues. Une journée de travail de Gilles Lurton, c’est « 8h - 23h », tous les jours. Le mardi matin, il est dans le train de Paris à 6h05. Il revient le jeudi soir à Saint-Malo à 21h07. Le reste du temps est consacré à l’arrondisse­ment de Saint-Malo. 16 000 km parcourus chaque année, et jamais un mot plus haut que l’autre de ses concitoyen­s, jure-t-il. « Je vois bien que les gens ont de moins en moins confiance dans la politique. J’entends dire : « Vous êtes tous les mêmes ». Mais ça ne m’est jamais adressé à moi. Je ne suis jamais insulté ».

« Il faut se préparer à perdre »

Gilles Lurton sera candidat à sa propre succession l’an prochain, sous l’étiquette « Les Républicai­ns ». S’imagine-t-il battu ? « On est élu pour un mandat. Il faut se préparer à tout perdre. » Et Gilles Lurton déshabillé de son mandat, ça donnerait quoi ? « Je n’en sais rien. Je n’y pense pas ». Et les prochaines municipale­s, y pense-t-il en se rasant devant sa glace chaque matin ? « Je suis candidat aux législativ­es ». Pour le scoop, on repassera. Et le maire Claude Renoult, dont il est l’un des opposants au conseil municipal, il en pense quoi ? « Je suis député. Et un député travaille pour tout le monde ». Ce n’est pas le moment de faire des vagues et de se mettre du monde à dos. Il y a une élection l’an prochain. Et Gilles Lurton n’entend pas se louper.

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