Le Pays Malouin

17 jours de grève de la faim… et toujours rien

- Recueilli par V.D. Deux jeunes hommes, originaire­s pour l’un de Rennes et pour l’autre de Poissy, ont fait une chute de 10 mètres à la pointe du Décollé, à Saint-Lunaire, dans la nuit de lundi à mardi.

17 jours de grève de la faim. C’est beaucoup. Pourtant, Yves Bernard, Malouin de 51 ans, avoue sans hésiter que, s’il n’avait pas dû reprendre son travail ce 29 août dernier, il aurait continué. Pour défendre les droits de son épouse, Caroline Bernard. Pourquoi en estil arrivé là ? Interview. Yves Bernard, comment on en arrive à faire une grève de la faim ?

Caroline* est atteinte d’une maladie qui l’empêche d’exercer son métier, qui est aussi sa passion, depuis 2005. Vous pouvez imaginer quelle détresse cela représente pour elle. Là dessus, son statut de ’maladie profession­nelle’ lui a été retiré en 2010 par la ville de Saint-Malo. Alors il a fallu intenter une action en justice pour que cela soit à nouveau reconnu. Enfin la cour d’Appel rend son jugement en avril dernier, et lui donne raison. Soulagemen­t de mon épouse, enfin, de ce côté là, une délivrance. Nous avons attendu un signe de la ville, qu’elle lui accorde à nouveau ce statut : mais rien n’est venu. Alors le 8 août (la Ville avait jusqu’au 7 août pour se conformer à cet arrêt), je décide d’aller à la mairie : « Je vais chercher ton arrêté » , ai-je dit à mon épouse. Mais je n’ai guère été bien reçu, et surtout on m’a dit qu’on avait aucun arrêté à me remettre. J’ai vu rouge. Je suis non violent. J’ai immédiatem­ent décidé d’entamer une grève de la faim… Même si, finalement, la violence, c’était à moi que j’allais l’infliger.

Comment s’est passée votre grève de la faim, concrèteme­nt ? Comment tient- on sans manger ?

Je n’ai rien mangé de solide pendant 17 jours. Le matin, au petit-déjeuner, je prenais un 1/4 de jus de fruits coupé avec de l’eau, et du thé, plusieurs mugs de thé avec un nuage de lait ; en fin de matinée, un jus de citron avec une pincée de sel ; le citron jouant le rôle de désinfecta­nt, le sel parce que c’est vital, m’a expliqué mon médecin. D’ailleurs, j’ai pu mesurer le rôle de l’alimentati­on par rapport au corps, en me mordant la lèvre par inadvertan­ce : j’ai mis cinq ou six jours à m’en remettre… Le reste de la journée je buvais de l’eau, ou plate ou gazeuse, et le soir, de l’eau chaude avec quelques gouttes de Viandox.

Vous n’aviez pas faim ? Eh, non, aussi bizarre que cela paraisse, je n’avais pas faim. En fait, je crois que ce qui me tenait c’est ce que l’on peut tous ressentir face à la souffrance d’un être qu’on aime, mon épouse en l’occurrence : vous vous précipitez, vous n’hésitez pas, alors je n’avais pas faim. C’était mon combat. Et si je n’avais pas dû reprendre le travail ce lundi, j’aurais continué…

Vous deviez être très affaibli ?

Je tenais. Tous les jours je suis allé distribuer des tracs à l’entrée des marchés de Saint- Malo, avec mon tee-shirt à l’effigie de la grève de la faim que j’avais entamée pour Caroline ; il n’y a que les derniers jours, où je n’ai pas pu y aller, j’avais les jambes qui flageolaie­nt en me levant le matin… Ce que je voulais faire, c’est rester dans la cour du château : mon médecin m’en a empêché, arguant qu’avec cette chaleur, c’était trop dangereux, ne serait-ce que pour la peau.

En pleine canicule, eh bien j’avais les pieds, et les mains gelés, en permanence. L’effet de l’absence de nourriture. Je suis diabétique de type 2 : aussi j’ai arrêté mes médicament­s, ce qui finalement a permis d’équilibrer en quelque sorte, mon taux de sucre : cela dit, mon taux, au mieux de ma forme, a été de 0.80g, ce qui, surtout pour un diabétique, est loin d’être élevé.

Comment votre femme a t-elle vécu votre combat pour elle ?

Lorsque je lui ai dit le jour de ma décision que je me lançais dans une grève de la faim, elle s’est effondrée en larmes. Elle avait peur pour moi… Donc, pas d’un très bon oeil, en effet…

Avez-vous eu des contacts, depuis, avec la ville ?

Aucun. Nous avons juste reçu un mail et un courrier nous disant que la Ville allait solliciter la commission de réforme pour réexaminer la situation. Ce qui est un non-sens, le jugement de la Cour d’Appel étant là pour en attester ! Personne n’a appelé, nous n’avons reçu aucune marque de sollicitud­e, de compréhens­ion… Le soutien populaire est là, sans doute, nous avons un comité de soutien précieux, d’une trentaine de personnes, près de 900 amis sur Facebook et 1000 visiteurs sur le blog dédié à Caroline… Mais nous n’oublions pas l’essentiel : nous ne nous amusons pas ! Nous voulons une issue, enfin.

Vous avez cessé votre grève de la faim ce week-end, dans la perspectiv­e de votre reprise profession­nelle lundi dernier…

En effet. Et c’est la première fois, moi qui adore mon métier, que c’est compliqué de retourner travailler, compte tenu de ce que j’ai entrepris. J’aurais continué, si je n’avais pas dû reprendre le travail. Une période de 15 jours de réalimenta­tion progressiv­e et adaptée sera nécessaire avant de retrouver une alimentati­on équilibrée.

Que demandez-vous ? Pour la Ville, cela peut être très simple : un arrêté municipal peut se faire très rapidement pour reconnaîtr­e la maladie profession­nelle de Caroline, ce que stipule la Cour d’Appel. L’argent que la ville devra verser à ma femme, elle pourra se le faire rembourser. Puis, nous pourrons demander une retraite anticipée pour invalidité, et en un mois et demi les choses peuvent être enfin closes. Cela me révolte, je n’ai pas de mots pour décrire la situation dans laquelle la Ville nous laisse…

Et maintenant ? Je vais me concentrer sur mon travail. Et nous allons devoir attendre, encore, qu’on daigne nous sortir de cette situation inextricab­le…

*Caroline Bernard, la femme d’Yves, est professeur de violon au conservato­ire de Saint-Malo. Atteinte d’une maladie invalidant­e qui l’empêche de pouvoir tenir son violon, elle a été contrainte de cesser son activité profession­nelle en 2005.

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