« Un nouvel écosystème s’est mis en place »
Michael Allali, directeur d’EDF hydroélectricité Bretagne - Normandie, a tenu à apporter quelques précisions à propos de notre dossier consacré aux 50 ans du barrage de la Rance la semaine dernière, notamment sur le volet environnemental.
Quel est votre avis à propos des changements qu’aurait provoqué le barrage au niveau de la biodiversité et de l’écosystème de l’estuaire ?
Notre constat, et celui de la plupart des acteurs qui planchent sur ce sujet, dont les responsables de Natura 2000, c’est que oui, la biodiversité et l’écosystème ne sont plus les mêmes qu’avant la construction du barrage.
Pour autant, un nouvel équilibre, un nouvel écosystème s’est mis en place, lui-même étant fort riche. En témoigne la classification en zone Natura 2000 et en Zone naturelle d’intérêt écologique faunistique et floristique (ZNIEFF). Elles traduisent bien la richesse actuelle de l’estuaire. Ainsi, les études Natura 2000 ont recensé plus de 70 espèces de poissons et plus de 230 espèces d’oiseaux.
Et à propos de la sédimentation dans l’estuaire ?
M. Thébault avance le chiffre de 80 % d’envasement du au barrage. Je ne sais pas d’où vient ce chiffre, car, à notre connaissance, aucune étude scientifique ne vient étayer ce chiffre.
Les dernières études faites, dans le cadre de la concertation lancée par l’Etat, concluent qu’on ne peut pas définir l’incidence du barrage. Les premières conclusions, révélées aux instances de pilotage confirment que oui, l’usine marémotrice a un rôle dans la sédimentation, parce qu’elle modifie les courants au niveau de leur intensité et leur répartition. Donc cela entraîne des modifications dans la zone de sédimentation, avec certains secteurs qui en ont plus qu’avant et d’autres moins. Cependant, l’étude indique qu’il est infiniment compliqué en l’état des connaissances, pour ne pas dire impossible, de définir le rôle exact de l’usine dans ce phénomène de sédimentation.
Certains font aussi remarquer que la navigation est rendue très difficile à certains endroits ?
Dans le cahier des charges de la concession, l’Etat a fixé un certain nombre d’exigences, dont l’entretien du chenal principal de navigation, tel qu’il était en l’état en 1946. Ceci est tenu de façon très scrupuleuse. Par exemple, au niveau de l’écluse du Châtelier, chaque année, nous faisons en sorte de « chasser » le dépôt de sédiment en aval, via l’écluse, en jouant sur le débit. Saut que cette année, nous n’avons pas eu assez d’eau disponible pour le faire comme habituellement. On a donc vu un problème de navigation, pour certains navires. Mais cela est ponctuel et on y travaille, avec la Région, pour résoudre ce phénomène.
Et à propos de l’avenir du barrage ?
Il ne faut pas oublier le contexte avec la loi de transition énergétique, qui incite à investir dans de nouvelles constructions liées aux énergies renouvelables, y compris hydrauliques. EDF s’inscrit dans cette logique, avec la volonté d’augmenter sa production d’énergie renouvelable, tous moyens confondus. Il est donc hors de question pour EDF d’abandonner l’usine de la Rance, qui est en plus un ouvrage très important pour la Bretagne. Après 2043, à la fin de la concession, ce sera à l’Etat de se positionner, au travers d’un nouvel appel d’offres qui précisera les conditions d’exploitation.