Jacques Cartier, chantre malouin de la francophonie
Au cours de l’été, retrouvez au fil de vos pages Sortir une série de focus sur la francophonie, réalisés par l’association Histoire et Patrimoine du Pays de Dinard-RanceEmeraude et le cercle des Amis de la francophonie. Troisième opus cette semaine, par Gilles Fouqueron qui met en lumière Jacques Cartier.
24 juillet 1534, tout un équipage se tient derrière son capitaine. Pour certains, le soleil présent évoque l’Espagne ; aussi viennent-ils de baptiser la baie toute proche, Baie des Chaleurs. Parti de Saint-Malo, Jacques Cartier n’a pas encore réalisé son rêve et celui de son roi François 1er : celui de trouver le passage de la Chine par le nord du continent américain, par des terres où il est dit qu’il est possible de trouver « grande quantité d’or ». Pour l’instant, il a contourné Terre-Neuve, pressenti son insularité en constatant un courant constant entre elle et le continent. Malheureusement, cette baie des Chaleurs explorée s’est achevée en cul-de-sac au niveau de cette rivière de la Restigouche qui sera, en 1760, le lieu du dernier combat naval entre la France et l’Angleterre en terre canadienne. Le héros sera un autre Malouin : Chénard de la Giraudais.
Le pied en terre québecoise
Pour l’heure, sur la pointe de Gaspé, des hommes dressent une croix marquée aux fleurs de lys, au devant d’un groupe d’Amérindiens. La belle saison les a amenés en cette terre de Gaspésie depuis leur village de Stadaconé. Elle rappelle à tous les marins la mission royale : prendre possession de terres nouvelles en son nom tout en servant d’amer propre à faciliter le retour. Ainsi germe la présence française au Canada. Cartier vient de poser le pied en terre québécoise. Il est temps maintenant de poursuivre le voyage.
Trois navires désormais : pour la Grande-Hermine, la PetiteHermine et l’Emerillon, il est temps de trouver ou de retrouver les eaux canadiennes, car après avoir reconnu en premier lieu quatre provinces du Canada d’aujourd’hui : Terre-Neuve, Ile du Prince Edouard, NouvelleEcosse et Nouveau-Brunswick qui constitueront notre Acadie si chère à nos coeurs, une cinquième province les attend pour une part commune de notre histoire : Québec, la Belle Province. Rien n’est donc plus légitime que ce jumelage entre Saint-Malo et Gaspé qui dans les prochains jours se concrétisera, tel un pont, par delà l’Océan.
Jacques Cartier n’a pas failli dans sa mission. Il a élaboré les premières bases du lexique franco-amérindien. Il a reconnu les deux sites de Stadaconé et de Hochelaga qui deviendront les deux grandes métropoles du Québec. Mais, il a commis l’erreur de croire dans les richesses amassées au cap Rouge, à quelques lieues de Québec. L’or pressenti n’est que mica et pyrite. Les diamants se révèlent n’être que des cristaux de quartz. Un autre Malouin, François Gravé du Pont, dit Dupont-Gravé, aux côtés du sieur Chauvin et de Du Gua de Monts. A ses côtés, un dessinateur prend une part prépondérante : Samuel Champlain. Il pose les bases de l’implantation française en Acadie, dans les actuelles provinces maritimes du Canada.
C’est ainsi que la langue française se répand de part et d’autre de l’Atlantique, mais c’est sans compter sur la population anglaise implantée sur les côtes orientales des actuels Etats-Unis. Elle se sent enfermée par les possessions françaises, car outre le Québec et l’Acadie, la France s’est établie tout le long de l’Ohio et du Mississippi jusqu’à la Nouvelle-Orléans. Malheureusement, en Europe, une nouvelle guerre de Cent Ans a débuté dans la dernière décennie du 17e siècle pour s’éteindre dans la plaine de Waterloo en 1815. Le traité d’Utrecht de 1713 se conclut par la perte de l’actuelle Nouvelle Ecosse, mais les Acadiens ont encore droit de demeurer chez eux. Le prochain conflit les expulse bientôt. Avant même que l’Angleterre et la France soient officiellement en guerre, les voici obligés de prêter un serment d’allégeance sans restriction. Leur refus conduit aux confiscations de leurs biens, à la séparation des familles et à leur déportation. Le « Grand Dérangement » est le drame de l’Acadie. Elle n’est plus que feu et flammes. Nombreux sont ceux qui mourront de misère. Certains débarqueront dans le port de Saint-Malo et feront souche. D’autres retourneront sur l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon, seul territoire restant français après le traité de Paris. Une expérience aux îles Malouines restera vaine. Enfin quelques-uns reprendront mer pour s’installer en Louisiane, formant la communauté cajun. Ainsi sont nées les bases de la francophonie qui aujourd’hui fait partie du patrimoine nordaméricain.
Gilles Foucqueron
L’Association Histoire et Patrimoine du Pays de Dinard/Rance/Emeraude et le Cercle des Amis de la Francophonie vous invitent le samedi 22 juillet à 19h30 au Casino Barrière de Dinard à une soirée francophone sur l’Acadie et la Louisiane avec un clin d’oeil de l’historien Gilles Foucqueron, et le duo La Belle et le Blues dans un répertoire de chansons françaises. Repas cajun servi par le traiteur Pascal Jenvrin. Contact/réservations : 06 08 51 35 96 contact@patrimoine-dinard.fr