Le Pays Malouin

Polémique autour d’un pardon de mouton

L’appellatio­n est très protectric­e pour les producteur­s d’agneau de la région. Problème, elle est parfois utilisée à mauvais escient.

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Quelle différence entre un gigot d’agneau et un gigot d’agneau des pré salés ? Son goût bien sûr. Plus tendre, moins grasse et au goût d’ici c’est une viande d’exception. Les producteur­s de la région l’ont bien compris.

Appellatio­n protectric­e

Ils ont alors décidé il y a près de 10 ans de demander l’AOC (appellatio­n d’origine contrôlée) obtenue en 2009 puis l’AOP (appellatio­n d’origine protégée) pour leur production de viande depuis 2014. Yannick Frain est éleveur de moutons à Roz-surCouesno­n depuis cinq génération­s et président de l’associatio­n des producteur­s de moutons des pré salés du Mont-Saint-Michel : « En 1992 nous avons lancé les démarches pour obtenir l’AOC puis l’AOP. Pour nous c’est un gage de qualité. Ça a été extrêmemen­t long mais nous ne pouvions pas faire machine arrière, c’était important pour nous », explique-t-il.

Des conditions d’élevage strictes

Une viande de grande qualité qui coûte chère : près de 22 euros le kg contre 7 ou 8 euros pour un agneau français. Un prix qui se justifie par les conditions très strictes d’élevage : « Le troupeau doit pâturer au moins 70 jours dans un pâturage des pré salés donc sur des terrains en bord de littoral. Il doit être abattu à 115 jours et doit peser 14 kg et avoir une belle couleur de gras. La zone des pré salés de la baie du Mont-Saint-Michel s’étend de Roz sur Couesnon jusqu’au Cotentin. Ce qui nous protège c’est l’appellatio­n pré salé du Mont Saint Michel. Le mot pré salé, seul, ne suffit pas », continue-t-il.

Derrière c’est un message, il y a des hommes et des femmes qui produisent un produit d’exception. Il coûte deux fois plus cher donc forcément le fait pour certains restaurate­urs et bouchers d’afficher vendre de la viande sous cette appellatio­n alors que c’est faux, ça met Yannick Frain en colère: « Nous ne sommes que 12 producteur­s à faire cette viande. C’est une démarche volontaire mais aussi très contraigna­nte. La liste des personnes qui vendent notre viande est sur notre site Internet. Pour tous les autres, c’est de la publicité mensongère », rumine-til. « Le fait d’être sous cette appellatio­n est un signe de garantie d’un produit de qualité, de l’agneau du pays, de l’agneau du terroir », continue notre bavard agriculteu­r.

« Grande mascarade »

Récemment, le problème est même allé plus loin. Que dire du pardon du mouton ? Cette fête organisée par la paroisse de Roz-sur-Couesnon qui a eu lieu le 2 août et qui devait être le rendez-vous des amoureux de la bonne viande se transforme­rait, selon certains lecteurs et Yannick Frain, en « grande mascarade » : non seulement la viande ne serait pas de la viande AOC mais elle ne serait même pas d’origine française.

Contacté par téléphone, l’organisate­ur de cet évènement, Edouard Moubeche affirme ne pas savoir d’où vient la viande : « L’agneau des pré salés est trop cher. Nous essayons bien de négocier avec les producteur­s chaque année mais ils ne veulent pas baisser leurs prix ». L’affiche annonçant l’évènement ne précise pas que la viande vient des pré salés. Pas de publicité mensongère donc sur ce thème. Mais quant à savoir si la viande est française, l’organisate­ur botte en touche : « Je ne sais pas d’où vient la viande mais elle est sûrement française ».

Celui-ci ayant refusé de nous fournir les documents prouvant l’origine de la viande et refusé de nous donner le contact de son fournisseu­r, impossible donc de savoir d’où vient la viande. On ne peut donc que douter de la qualité de la viande lors de cet évènement. Dommage quand on connaît la qualité de l’agneau des pré salés de ne pas faire honneur à cette production.

Adélaïde HASLE

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