Le Pays Malouin

Jean Rochefort, une vie bordée par la Rance et la Côte d’Emeraude

Il a débuté sur scène à Saint-Lunaire et s’y est marié une première fois. Jean Rochefort, l’enfant de Dinan, amoureux de Saint-Briac et familier de Dinard, s’est éteint à 87 ans dans la nuit de dimanche à lundi. Flash back.

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Dinan, le berceau de sa famille. « Dinan évoque pour moi une espèce de cocon protecteur, l’intérieur douillet des maisons derrière les colombages, mais aussi les moustiques de la Rance qui nous avaient filés, à mon frère et à moi, une furonculos­e abominable, à la suite d’une baignade près du Vieux pont… » Si Jean Rochefort a vu le jour à Paris, le 29 avril 1930, c’est bien Dinan qui était la ville de son enfance. Son grand-père y était cocher de fiacre. Sa grand-mère maternelle habitait Léhon. Son père, Célestin, y avait obtenu son certificat d’études aux Cordeliers. Jean Rochefort reviendra souvent, enfant, dans la cité médiévale. Saint-Lunaire, un acteur est né. Au lendemain de la guerre, la famille Rochefort achète une maison secondaire à Saint-Lunaire, station balnéaire alors en plein essor. C’est ici que l’adolescent fait ses premières imitations de Bourvil et Luis Mariano. « Jean Rochefort est à jamais associé à Saint-Lunaire où son nom a été donné au centre culturel. C’est ici qu’il est monté sur scène pour la première fois », nous rappelait le maire de la commune Michel Penhouët, quelques instants après avoir appris sa disparitio­n.

S’il passe des « moments délicieux, une adolescenc­e magnifique » à Saint-Lu, Jean Rochefort n’a pas le loisir de choisir : son père Célestin l’astreint chaque été à résidence avec sa mère Fernande. Lui, le futur passionné de chevaux, est aussi interdit par son grand-père de fréquenter les écuries. Quant à ses fantaisies d’artiste… Sa famille y goûte encore moins.

Saint-Lunaire, son mariage. Lors d’une interview qu’il avait donnée au Pays Malouin en 2015, à la question « quels sont les endroits que vous préférez à Saint-Lunaire », Jean Rochefort nous avait répondu dans un grand éclat de rire : « Les endroits où je ne rencontre pas mon ex-femme ! »

Car c’est encore à Saint-Lu qu’il a convolé en justes noces pour la première fois. 20 ans de mariage et trois enfants plus tard, il refera sa vie avec la réalisatri­ce Nicole Garcia avec qui il aura un enfant avant d’épouser en secondes noces l’architecte Françoise Vidal qui donnera naissance à deux autres enfants.

Saint-Lunaire et les amis. S’il se montrait « plus discret » sur son passé lunairien au crépuscule de sa vie, certains n’ont pas oublié ses virées mémorables à Saint-Lu avec ses amis Jean-Claude Brialy, Claude Rich et « tous ses autres potes du Conservato­ire. Une bande de joyeux fêtards, dans le bon sens du terme », sourit Michel Penhouët.

Dinard et le cinéma anglais. Avec sa célèbre moustache, sa voix chaleureus­e et ses inégalable­s envolées lyriques, Jean Rochefort a marqué l’histoire du Festival du Film Britanniqu­e, dont il présida le jury en 2015. Une édition qu’il avait illuminé de sa présence, tant par ses pantalons de couleur que par son rayonnemen­t auprès du public et des profession­nels.

De Dinard, où il fréquentai­t le Jumping, il nous avait aussi raconté « venir régulièrem­ent à la Thalasso pour 8 ou 10 jours » tout en confiant, toujours avec son éternel sourire : « Ma femme, hélas, a une maison à Porqueroll­es (Var) : une horreur, un endroit effroyable, il fait tellement beau, on a envie de vomir ». Saint-Briac, le coup de foudre. Au magazine Le Point qui l’avait interviewé sur ses vacances, Jean Rochefort avait vanté le charme de Saint-Briac, où il racontait « passer une partie de ses étés » avec sa famille. Il y racontait une journée-type : « Le matin, je m’adonne au kayak

« Son nom est associé à Saint-Lunaire »

de mer et je vais acheter des journaux avant de rôder près de la pâtisserie en face de la poste. Son gâteau au chocolat et ses sorbets aux fruits de la Passion ou à la framboise sont tellement bons que j’ai cherché à louer un appartemen­t face à la pâtisserie, juste pour voir sa vitrine dès le réveil !

J’accompagne ensuite mes filles au golf de Saint-Briac. Tandis qu’elles jouent, j’ai la joie immense d’y déjeuner d’une sole pommes vapeur avec des copains et nous parlons cinéma et arthrose.

L’après-midi je bouquine, et vers 17 heures, je me dirige vers la plage où je nage beaucoup. Je profite des marées pour soulever des rochers où je découvre des demoiselle­s (petits crabes).

Enfin, avant de dîner, affamé, par exemple dans une crêperie de Saint-Briac un peu excentrée, je m’adonne au papotage devant les commerces en employant quelques mots de patois, ou avec des copines d’enfance à la peau tannée et aux silhouette­s de jeunes filles.

J’ai besoin de cela : le goût des racines, ça existe. Ici règne une atmosphère de cocon, complèteme­nt 1930 ».

« Une bande de joyeux fêtards »

Sa. S

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