Le Pays Malouin

Une belle solidarité pour aider une famille malouine

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Daisy et Jérôme, un couple de trentenair­es de Saint-Malo, s’étaient installés en 2016 sur l’île de Saint-Martin, avec leurs deux enfants de 3 et 7 ans. L’ouragan Irma a détruit leur rêve. Daisy nous raconte ce qui s’est passé. Et la suite, quand une famille se retrouve avec presque rien.

« Mon mari est policier. Nous étions partis à Saint-Martin dans le cadre de son travail. La nuit du 5 au 6 septembre fut un enfer. Nous étions trois familles dans notre appartemen­t. Toutes originaire­s de Saint-Malo, nos maris travaillan­t dans la police. La toiture bougeait et nous avons dû nous réfugier chez les voisins du dessous, nous étions 26 dans l’appartemen­t.

Le lendemain, la première chose que nous nous sommes dit, c’est : on est en vie !

Après l’enfer, la survie

Dans notre appartemen­t, des fenêtres avaient explosé, il y avait des trous dans la toiture, des infiltrati­ons partout. On avait peur que ça s’effondre. On s’est réfugié chez des amis.

Nous avions prévu des réserves d’eau. Mais au bout de trois jours, nous n’en avions plus pour nous laver. Quant à la nourriture, au bout de deux jours, il ne restait que des conserves. L’ouragan José arrivait, on s’est dit qu’il fallait évacuer nos familles.

Le vendredi 8 septembre, on s’est retrouvé à l’aéroport, avec des centaines de femmes et enfants. Nous avons eu le droit de prendre un avion pour la Guadeloupe. Nos trois hommes sont restés. Je suis partie avec mes papiers, les doudous de mes enfants et deux sous-vêtements pour chacun. Je n’avais que 20 euros en poche.

Arrivés en Guadeloupe, on a eu le choc de voir tout le déploiemen­t mis en place pour nous, alors qu’à Saint-Martin il n’y avait rien. Nous avons été très bien accueillis par la Croix Rouge. Nous sommes partis en bus dans un hôtel. J’ai réussi à joindre ma famille et je leur ai dit que nous voulions repartir en métropole.

Avec mon mari, on s’est posé la question de rester. Mais il a vu des choses pas belles : des pillages, des gens armés… On ne pouvait pas prendre de risques avec nos enfants.

Nous avons pris un avion militaire dans la nuit de dimanche à lundi. A Roissy, mes parents sont venus nous chercher. C’était un sacré soulagemen­t. La fatigue commençait à se faire sentir. Ma fille ne s’alimentait plus, mon fils avait des plaques d’eczéma à cause du stress.

On a commencé à retrouver une vie normale chez mes parents, qui habitent dans la région malouine. J’ai inscrit mes enfants à l’école la semaine suivante.

« Ici, nous n’avions presque plus rien »

Pendant deux semaines, j’ai passé mon temps à effectuer des démarches administra­tives. Sur place, mon mari a nettoyé l’appartemen­t et mis en carton de ce qui avait pu être sauvé. Finalement, nous préférons tout donner à ceux qui sont restés. J’étais très inquiète pour mon mari. Heureuseme­nt, il a pu nous rejoindre une dizaine de jours plus tard.

Ici, nous n’avions quasiment plus rien. Mais une formidable solidarité s’est organisée autour de nous. On nous a racheté des affaires pour qu’on puisse se vêtir, une cagnotte a été mise en ligne… Je tiens à remercier les nombreuses personnes qui nous ont aidés.

Nous vivons toujours chez mes parents, mais nous sommes en attente d’une location à la fin du mois. On s’en sort bien, les deux autres familles vont devoir attendre novembre et décembre.

Des amis et de la famille nous prêtent des véhicules. Celui que nous avions à Saint-Martin est une épave. Quant aux affaires que nous avons perdues là-bas, les assureurs m’ont fait comprendre qu’on ne serait pas remboursé.

Malgré tout, on s’estime chanceux. Nous sommes en vie, nous avons un toit et avons pu compter sur une aide fabuleuse. Il nous reste à racheter une voiture. Mon mari attend une réaffectat­ion et de mon côté je cherche un poste dans l’administra­tif.

Les enfants ont été très courageux. Ils ont commencé à craquer quand ils ont compris qu’ils étaient en sécurité. Mon fils, dès le début, m’a posé beaucoup de questions sur le cyclone. Ça va aujourd’hui. Ma fille, un peu plus âgée, ne voulait au contraire pas en parler. Le suivi psychologi­que lui a fait beaucoup de bien. Comme le fait de reprendre l’école.

Il y a aussi une sorte de sentiment de culpabilit­é à être rentrés, alors que d’autres sont restés. Mais Saint-Martin restera en nous et on y retournera ».

Recueilli par Nicolas EVANNO

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