Le Pays Malouin

Dominique et Michelle Leray, la passion de la charcuteri­e

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L’ancien centre local hospitalie­r n’existe plus. Réduit à 9 400 tonnes de déchets, pour un coût de 230 000 €, dont une partie est prévue à la revente, ainsi que les pierres de granit qui seront remployées par la commune pour des projets, il laisse désormais place vide pour des projets de réhabilita­tion du quartier. Dix millions d’euros y seront investis par la municipali­té pour son renouvelle­ment urbain : bureaux pour administra­tions et entreprise­s, logements pour accompagne­r la croissance démographi­que de Combourg… Le site de 4 hectares va donc changer complèteme­nt de physionomi­e et sa reconstruc­tion sera étalée sur quatre ans.

Trois génération­s se sont succédé dans la charcuteri­e familiale qui date de 1926. Dominique et Michelle seront la dernière.

Nichée rue Notre-Dame, au coeur de la petite cité de caractère et à quelques mètres de l’imposante maison de la Lanterne, la charcuteri­e n’a pas bougé depuis 1926, l’année où Marie-Joseph Ruellan en a ouvert la porte. En 1956, Alphonse, son fils, quitte Lamballe, « où il tenait lui aussi une charcuteri­e », pour reprendre la succession de sa mère à Combourg qui, « à 108 ans, sera doyenne des charcutièr­es. » À son tour, Alphonse passe la main à son fils, Dominique Leray, en 1979. Trois génération­s de charcutier­s se sont succédé ici avec la même passion pour ce métier. Né à Lamballe, en 1952, Dominique Leray, cheveux courts, paire de lunettes sur le nez, se dit être « le dernier pur charcutier du canton de Combourg. »

Du « fait maison »

Il y a une règle à laquelle n’a jamais dérogé ce Breton quelque peu têtu, c’est « qu’ici tout est fait maison. » Il le dit avec une fierté contenue, car l’homme est modeste. Et un peu taiseux. Pourtant quand on parle cochonnail­les, il se fait plus loquace. L’amour du métier reprend le dessus et il avance sans peur « je sais ce que je fais. Et ce que je vends. Je suis capable de conseiller les clients, et surtout je les connais. Si, par exemple, je sais que quelqu’un a une allergie aux oeufs, je lui conseiller­ais une terrine, ou un plat préparé où il n’y en a pas. »

Ne pas trahir la profession

Michelle, sa femme, acquiesce ses propos avec un air complice. C’est elle qui est à la vente. Il lui sourit en retour. La réussite de cette longévité est sûrement due au fait que cet homme ne veut pas trahir sa profession. Ne lui parlez pas charcuteri­e industriel­le, même s’il ne condamne pas ceux du métier qui en use. Il persiste : « Je fabrique tous mes saucissons secs, je suis peut-être encore le seul, mes terrines, mon jambon. » Le jambon répète-t-il, « c’est la base du charcutier. » Et dans un rire détendu et généreux, d’ajouter : « Sauf le chorizo, ça ne vient pas de chez nous. »

Le service traiteur, une bonne demande

Dans la boutique, le porc breton est à l’honneur. En témoigne une ardoise flanquée de drapeaux bretons le mentionnan­t. Et la collection de cochons en porcelaine qui trône dans la vitrine, sur les étagères du magasin. Une partie de cette réussite tient aussi du fait « que nous avons développé le côté traiteur. Il y avait une demande. Elle est encore très forte maintenant. Nous présentons tous les jours trois variétés de plats cuisinés », appuie Michelle.

La charcuteri­e, c’est une équipe de cinq personnes, « quand on fait tout maison, il faut du monde. C’est facile d’acheter dans des salaisons, mais ce n’est pas maison. »

Garder l’esprit de la charcuteri­e

Cette année, comme depuis trois ans, pour les fêtes de Noël, le store sur la façade restera enroulé. La boutique sera fermée. Une trêve bienfaitri­ce, désormais nécessaire, pour Dominique et Michelle. C’est qu’ils en ont passé, toutes ces années, des journées sans compter les heures, les jours d’ouverture. Aujourd’hui, Dominique a pris sa retraite, Michelle reste aux commandes en attendant la sienne. La boutique est officielle­ment en vente. Tous deux espèrent fortement un repreneur qui ne trahira pas l’esprit de la charcuteri­e familiale. Mais Dominique le sait bien, même s’il ne le dit pas, sa moue dubitative à elle seule l’exprime. Ce métier en demande du courage et de l’honnêteté dans le travail.

De notre correspond­ant local Gérard SIMONIN

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