Le Pays Malouin

Enfant durant la guerre d’Espagne, le Dingéen Ramon Perez raconte

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Vendredi 1er décembre, l’Université du Temps Libre Bretagne Romantique a organisé une conférence sur le thème « Un enfant pendant la guerre d’Espagne », animée Ramon Perez. Aujourd’hui âgé de 87 ans, le Dingéen revient sur cette histoire qui est la sienne.

Pouvez-vous nous expliquer ce qu’était la guerre d’Espagne ?

Cette guerre a commencé en 1936 avec l’arrivée du général Franco en Andalousie. Il prend le pouvoir pour y installer une dictature. Elle a pris fin en 1939.

On l’a appelée la guerre civile d’Espagne mais ce n’était pas un conflit de soldats contre soldats. C’était les Espagnols qui s’entretuaie­nt. C’était épouvantab­le, affreux !

Comment êtes-vous arrivé en France ?

Il fallait sauver les enfants de la guerre. Une organisati­on s’est mise en place avec différents pays d’Europe.

J’avais 7 ans. Il a été décidé d’envoyer les enfants hors du pays. Ils étaient mis dans des bateaux au départ de Bilbao. Six mille enfants ont ainsi été exilés sans leurs parents.

Nous avions de 6 à 12 ans. Je suis parti avec ma soeur aînée. Mon père était à la guerre. Ma petite soeur est restée avec ma mère et ma grand-mère.

Dans le bateau, on nous a entassés sur le pont. Pas de cabines pour nous. On a débarqué sur l’île d’Oléron.

On a d’abord vécu dans des baraquemen­ts de colonies de vacances puis nous avons été accueillis par des familles dans le nord de la France.

Qu’est devenu le reste de votre famille ?

Ma mère, ma jeune soeur et ma grand-mère ont gagné la France à pied par les Pyrénées. Ma grand-mère n’a pas réussi, elle est morte dans les montagnes.

À la fin de la guerre, mon père, comme 500 000 hommes, a gagné la France par la Catalogne. Ma famille était donc en France mais quelque part dans le Sud. Nous ne savions pas où ils étaient.

Comment avez-vous été réunis ?

Nos familles d’accueil se sont démenées pour les situer et ils les ont trouvés. Ils sont allés les chercher à l’autre bout de la France et les ont ramenés dans le Nord, à Méaulte.

La famille Pérez était reconstitu­ée et on y a vécu quelque temps en paix. La guerre d’Espagne était finie. Puis les nazis ont envahi le nord de l’Europe.

Qu’avez-vous fait alors ?

Il y a eu une panique. Tous les gens du nord ont migré vers le reste de la France. On a suivi le mouvement.

On a fait 400 km à pied. C’était très dangereux. Les avions nazis mitraillai­ent les routes.

Il y a eu près de 2 000 morts. On est arrivé en Normandie puis on a pris un train de marchandis­e jusqu’à la région rennaise.

À la gare de tri, les Allemands sont arrivés et ont bombardé un train de munitions. J’étais jeune et j’ai pris peur et j’ai suivi les soldats qui s’enfuyaient. Mes parents étaient restés là-bas.

Vous êtes resté avec les soldats ?

Oui. Tous les soldats avaient ordre de rentrer à la caserne et j’ai suivi. J’ai eu la chance de tomber sur un soldat qui s’est occupé de moi. On est ensuite allé à Fougères à pied.

J’ai été recueilli par des cultivateu­rs qui ont passé une annonce dans le journal pour retrouver mes parents. On m’a raccompagn­é à Cesson-Sévigné et j’y ai retrouvé ma famille.

Comment était la vie en France ?

On ne connaissai­t pas le français, on était pauvre et mes parents n’avaient pas de travail.

Vous étiez enfant, ça a dû être dur de vivre tout cela ?

Tout ça m’a marqué psychologi­quement. Je n’avais ni famille, ni école, ni copains.

Je ne comprenais rien. Ça m’a poussé à toujours vouloir construire et à ne pas détruire. Et vous France ?

J’ai eu tant bien que mal un CAP d’employé de bureau. J’ai trouvé du travail et j’ai rencontré ma femme, Geneviève, une Bretonne de Crozon. Nous avons eu quatre enfants, trois gars et une fille. Ils nous ont donné cinq petits-enfants et un prochainem­ent. êtes resté en

De notre correspond­ante locale Marie VINOUSE

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