Le Pays Malouin

Défendu par un membre de sa famille

Contacté avec l’aide du service des archives de Saint-Malo, un membre de la famille de Jacques Dugé de Bernonvill­e, qui a reconstitu­é son arbre généalogiq­ue, prend la défense de l’ancien chef collabo.

- PYG

Il a été un militaire ex

« ceptionnel, 30 blessures (il est d’ailleurs facilement reconnaiss­able du fait d’une balafre à la joue NDLR) et 75% d’invalidité en 1918, à 20 ans. Pour la 2e guerre mondiale, catholique et surtout anticommun­iste, il a effectivem­ent fait partie de la milice mais n’a jamais pris part à des séances de torture ou autres dont il a été accusé. »

Ce membre de la famille continue son plaidoyer : « On l’accuse d’avoir été SS. Or, il y a été envoyé en mission quelques semaines par le gouverneme­nt dans le cadre d’une mission de renseignem­ent. Il n’a jamais porté l’uniforme allemand. » Mais c’est bien au côté des Allemands que Jacques Dugé de Bernonvill­e traquait les résistants sur le massif des Glières, en avril 1944, à la tête d’un unité des forces de la Franc-Garde.

L’universita­ire rennais Marc Bergère qui a consacré de nombreuses lignes à De Bernonvill­e dans un de ses ouvrages, ‘Vichy au Canada’ (Presse universita­ire de Rennes, 2015) publie une photo où l’on voit le milicien in situ. Il écrit qu’en Vercors, « les méthodes employées sous les ordres de Bernonvill­e sont des plus brutales (...) Elles consistent surtout à ‘terroriser’ la population locale pour la dissuader d’apporter son soutien aux maquisards. Dès lors, arrestatio­ns, exactions, pillages, incendies se multiplien­t ».

Il dit également que son enrôlement au sein de la Waffen-SS « ne souffre d’aucune contestati­on possible au vu des éléments versés à son dossier ».

Cependant, pour notre interlocut­eur, Jacques de Bernonvill­e « était avant tout un brillant militaire brave et droit qui a obéi aux ordres. Catholique très pratiquant, il n’a pu commettre les exactions dont on l’accuse sans preuve, d’ailleurs. Soyez donc prudent en lisant les horreurs dont on l’a accusé. »

Certes, soyons prudents mais de nombreux chercheurs se sont intéressés à Jacques de Bernonvill­e, la Justice française l’a condamné à mort par contumace. Son nom figure sur un document de paie de la Waffen SS. Pourquoi ce héros de la guerre 14-18 n’est-il pas revenu défendre son honneur devant les tribunaux français ?

Marc Bergère explique pour sa part que d’autres hommes, parfois des héros, eux-aussi de la mouvance royaliste ou d’extrême droite ou les deux ont fait le choix de rejoindre de Gaulle. De Bernonvill­e, lui, a préféré Pétain, séduit par sa Révolution Nationale.

Alain Cerri - fils de Roger Cerri, maquisard qui combattit sur le plateau des Glières - cite quant à lui des extraits d’une lettre du colonel Romans Petit au sujet de Bernonvill­e, « criminel de guerre de la milice ». Ce compagnon de la Libération écrit : « Certes, Bernonvill­e se conduisit bien, paraîtil, en 14 - 18, mais, preuves en mains, j’affirme qu’après l’armistice de 40, il se mit en travers de notre action, mit tout en oeuvre pour dépister les agents alliés, les chefs de la Résistance et qu’il présida même à des séances où les nôtres furent torturés. [...] J’affirme que Bernonvill­e a bien la responsabi­lité de déportatio­ns [...] Tandis que se déroulaien­t des combats meurtriers, Bernonvill­e tendait des embuscades à ceux qui, faisant cause commune avec les Alliés, suivaient le chemin de l’honneur. (...) Pourquoi le témoignage de Maurice Nédey, arrêté, torturé, déporté aurait-il moins de poids que celui de Bernonvill­e, inspecteur général de la Milice ? (...) Et les Alliés n’auraient-ils pas eu plus de difficulté­s et, partant, plus de sang versé si toute la France avait pensé et agi comme Bernonvill­e ? »

Le défenseur de Jacques de Bernonvill­e nous a indiqué que ce dernier a écrit sa version des faits pour ses quatre filles mais il n’a pas été autorisé, faute d’accord familial, à nous la communique­r.

■ Remercieme­nts à Marc Jean et son équipe des archives municipale­s de Saint-Malo et à Thierry Ménager pour leur aide aux recherches documentai­res.

■ A consulter : une émission de TV5 où Yves Lavertu relate l’affaire Bernonvill­e : www. tv5unis.ca/videos (saison 2 , episode 9). Le livre d’Yves Lavertu est disponible par commande sur le site renaudbray.com

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