Le Pays Malouin

Le ‘demi-papy’ s’en était pris à plusieurs fillettes

Trois ans de prison dont deux avec sursis pour ce sexagénair­e qui a été reconnu coupable d’agressions sexuelles sur des enfants de 8 à 11 ans.

- Pierre-Yves GAUDART

Je ne sais pas. » La « formule est revenue des dizaines de fois dans la bouche de ce monsieur, pour toute réponse aux nombreuses questions de la juge. L’homme qui se déplace comme un vieillard bien qu’il n’ait que 63 ans il a été victime de plusieurs AVC - nie avoir commis tout geste déplacé à l’égard de trois fillettes entre 2019 et juillet 2021.

Deux des faits qui lui sont reprochés se sont passés à son domicile où il vit avec sa concubine qui a de petits-enfants. L’une d’entre-elles est assise sur un lit et regarde la télévision lorsque son ‘demi-papy’ entre dans la pièce et s’allonge. « Il lui demande de baisser son pantalon, lui caresse le ventre et tente de lui toucher le sexe avant qu’elle ne sorte en pleurs et se confie à sa demisoeur, à sa grand-mère puis à sa mère qui déposera plainte au commissari­at », résume la juge.

« Prédateur »

Lors des auditions, la demisoeur expliquera avoir, elle aussi, été victime de ce ‘demi-grandpère’. 18 mois auparavant, après une dispute de couple, il faisait chambre à part et dormait avec la gamine. « Il lui a baissé le pantalon et touché le sexe. Elle a pleuré, car elle a eu mal. Il s’est alors excusé. A l’époque, elle n’en a parlé à personne pour lui éviter la prison. »

C’est à la suite de ces révélation­s que le parquet de SaintMalo rouvre une enquête initialeme­nt classée sans suite, indique la présidente du tribunal, Marianne Despierre. Une mère de famille avait porté plainte en août 2019 contre le même homme.

« Comme un prédateur, il avait repéré une amie des petits-enfants, alors âgée de 11 ans, venue jouer à proximité et s’était arrangé pour la raccompagn­er à domicile, à 23h. En chemin, il lui avait touché la poitrine et demandé des bisous. Il sentait l’alcool »,

explique Catherine Jeannesson, avocate de la fillette. L’enfant, très choquée, l’avait aussitôt rapporté à sa mère. Celle-ci s’était rendue au domicile de l’homme qui avait nié.

Lors de l’audience, il garde la même attitude qu’en garde à vue : « Je lui ai peut-être touché l’épaule, un genou, sans faire exprès c’est tout. »

« Une jeune fille a tenté de se suicider »

S’il n’est pas poursuivi pour cela, un autre fait, antérieur, n’arrange pas sa situation : la fille de sa seconde épouse a prétendu qu’à deux ou trois reprises, il s’est masturbé en lui caressant le sexe, allant jusqu’à la pénétratio­n digitale. Elle s’est confiée à sa mère qui ne l’a pas crue. La jeune fille a tenté de se suicider.

« Comment expliquez-vous que toutes ces jeunes filles disent la même chose à votre égard ? », demande la juge. « Je ne sais pas. » Devant l’insistance de la présidente, il assure qu’il les considérai­t comme ses petites filles, jouait avec elle aux petits chevaux et aux dames, mais ne semble pas comprendre le traumatism­e qu’elles ont vécu et pour certaines, vivent encore.

« Pas d’empathie pour les victimes »

L’une d’entre-elles - celle qu’il avait raccompagn­ée à son domicile - âgée aujourd’hui de 15 ans témoigne : « Aujourd’hui, je change de trottoir lorsque je croise un homme âgé. »

Les expertises de ce monsieur concluent qu’il n’a aucune empathie pour ses victimes, des difficulté­s au niveau intellectu­el et mentionnen­t « une dépendance sexuelle et une addiction à l’alcool qu’il minimise » - ce qui est d’ailleurs le cas tout au long de l’audience.

Aujourd’hui, seules sa soeur et une des nombreux enfants qu’il a eue de plusieurs unions ont gardé contact avec lui. Sa compagne l’a quitté sans qu’il pense que cela ait un quelconque rapport avec les faits qui lui sont reprochés.

L’avocate de l’adolescent­e présente à l’audience déplore que sa cliente fasse « encore des cauchemars, elle attendait des réponses, mais il met à distance les événements. Tout ne peut s’expliquer par sa personnali­té frustre. »

« Son parcours est jonché de victimes »

« J’ai la conscience tranquille, je n’ai rien à me reprocher », répond le prévenu à plusieurs reprises. « Eh bien si, il a des choses à se reprocher. Son parcours est jonché de victimes », s’exclame Pierre Stichelbau­t, avocat de deux enfants qui, rappelle-t-il, « avaient 8 et 9 ans lors des faits et étaient sans défense. Aujourd’hui, elles vont plutôt bien, mais comment irontelles dans le futur ? »

La procureure, Muriel Masson requiert notamment deux ans de prison ferme et le mandat de dépôt. Son avocat Christian Tricheur plaide la relaxe. Son client est « incapable de rêver sa vie et donc d’élaborer quoi que ce soit. Il ne ment pas. D’autres pistes concernant des proches de la famille n’ont pas été explorées. »

Le sexagénair­e, déclaré coupable, est condamné à trois ans de prison dont deux avec sursis. Sa peine sera aménagée avec surveillan­ce électroniq­ue ; obligation de soins addictolog­iques et psychologi­ques ; il sera inscrit au fichier des auteurs d’infraction­s à caractère sexuel et devra indemniser les victimes et leurs représenta­nts légaux à hauteur de 3 700€.

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