Laure Chichmanov, parler d’osmose en images
Lorsqu’elle raconte comment ses photos ont été prises, Laure évoque ses voyages. Ses images s’inscrivent comme la substance des paysages traversés. Ceux-là même qui lui manquent et qu’elle veut ainsi montrer aux autres.
Mortagne- au- Perche. Cette belle jeune femme a l’aisance et le naturel de celles et ceux qui, depuis toujours, foulent d’autres terres, vivent avec plusieurs cultures, savent manier divers langages artistiques, de la même manière qu’ils parlent couramment plusieurs langues.
Elle est née à Paris, il n’y a pas encore trente ans. Son père est bulgare, sa mère franco-suisse. Laure a grandi à Moscou.
Diplômée de la Sorbonne, en histoire des sciences politiques, elle a terminé son cursus universitaire sur un master 2 de droit audiovisuel. Laure Chichmanov est aujourd’hui assistante réalisatrice.
« J’ai commencé à prendre des photos dès que j’ai eu accès à un appareil, à Moscou, au lycée. Ça a pris une tournure plus sérieuse il y a 7 ou 8 ans. Au moment où j’ai entrepris des voyages. Assistante réalisatrice sur un tournage au Tadjikistan, à la frontière afghane, le réalisateur m’a proposé de faire des photos de plateau. »
Laure travaille essentiellement en argentique, seul le tirage est numérisé. « C’est un choix, parce que j’aime le fait que l’on prenne des photos sans mitrailler. En argentique, on sélectionne, avant de prendre la photo on prend le temps de la réflexion, c’est important, il n’y aura pas des tonnes de photos. J’aime aussi le côté un peu plus romantique de cette technique. » Osmose personnelle dans le paysage
« Se fondre dans le paysage. Est- il besoin de se camoufler pour disparaître ? Chacun a ressenti ces moments, si brefs qu’ils semblent insaisissables, mais qui pourtant imprègnent la mémoire à jamais. Le paysage nous dissout. Pierre, sable, eau, glace, forêt, les éléments prennent possession de nos atomes, la nature absorbe, assemble, à la recherche de l’harmonie. » . Le travail photographique de Laure Chichmanov est une intuition sensorielle, qu’elle transmet à l’image, sans concept préalable, ni discours artistique. Son regard se transforme en une sensation transmise, née de l’instant, saisie par osmose. Ses paysages à Art en Perche
« Pour cette exposition je suis restée sur des photos dans lesquelles l’humain se confond avec le paysage. (…)» Ces photos viennent souvent de lieux de tournage, sont prises lors de repérages, comme pour le film Force spéciale, à la frontière avec l’Afghanistan ; la puissance de la nature y est omniprésente. »
La photographique intitulée Todj, Svetlana dans la neige, « C’est une éleveuse de rennes, à Touva, qu’on a suivi pendant trois mois, pendant le tournage d’un documentaire en Sibérie. » .
Yuri, « le chercheur de morts, avec son chien. Depuis vingt ans il déterre, en Carélie (frontière de la Finlande), les cadavres de prisonniers politiques pendant la période stalinienne. Sur certains lieux, il a fait déterrer jusqu’à 10.000 personnes et quand il trouve des corps, il étudie les squelettes, appelle les autorités pour permettre l’établissement d’un cimetière officiel. »
« L’autre Yuri, baptisé Kiss Cool, il est devant sa cabane bleue sur le lac Baïkal en Sibérie. Je l’ai photographié pendant un voyage perso, sur une partie du lac très difficile d’accès. C’est un mec qui a fait la guerre en Afghanistan, puis de la prison en Russie, il vit dans sa cabane, pour développer de l’écotourisme à la Russe. (Entendez, très sportif). Cette cabane, c’est sa cabane de pêche. L’illusion de brume sur la photo, c’est l’appareil qui gelait ! Au Tadjikistan à Douchanbé, j’ai pris celle de la fille sur la balançoire » L’image pour vibrisses
Laure aime la photo, mais aussi le cinéma et les documen- taires : « C’est le cinéma qui m’y a conduite ; et ma mère, que j’ai toujours vu prendre des photos. Il y a Saul Leiter aussi, un photographe dont j’aime le travail. » Férue de musique, elle fait beaucoup de photos de concerts. (…)
Elle a déjà exposé à l’Institut de géographie à Paris, dans une exposition collective, au Festival territoire en image, en 2013 et à la Galerie l’Aléatoire, une expo- sition collective, Coïncidence, en 2014. Et obtenu quelques parutions de ses photos, dans divers magazines presse et web, Gala, Libération, A nous Paris, ou Le Bonbon.
La suite : la Russie, deux projets de documentaires en cours, dont les repérages débutent en septembre dans le grand nord russe. Et toujours l’image pour vibrisseswww.laurechichmanov. com