L’interdiction de fumer fait un tabac
Entré en vigueur en 2007, le décret relatif à la lutte contre la tabagisme interdisait de fumer dans des lieux publics. Dix ans après, quels sont les avis des consommateurs. Reportage à Mortagne-au-Perche.
Perche. C’est une époque que les moins de 10 ans ne peuvent pas connaître… Celle où l’on pouvait encore fumer dans les endroits publics. Changer les habitudes
Une période si lointaine aujourd’hui. C’est le 1er février 2007 que le décret relatif à la lutte contre le tabagisme, défendu par le ministre de la Santé de l’époque, Xavier Bertrand, est entré en vigueur*. Il interdiait aux clients des cafés-restaurants de « tirer » sur la cigarette à l’intérieur.
Il redéfinit les normes s’appliquant aux lieux qui peuvent être expressément réservés aux fumeurs. Ces lieux, appelés couramment fumoirs, doivent être fermés et ventilés spécifiquement, sans possibilité d’y délivrer de prestations.
Au café de l’Ancre à Mortagne- au- Perche, les gérants n’ont pas connu l’époque où l’on pouvait « cloper » dans le commerce, « mais c’est plus agréable de travailler dans un endroit qui n’est pas enfumé » .
Pour certains consommateurs, cela a complétement changé les habitudes. « Cela me plaisait de commander mon café le matin, de m’installer sur la chaise et de savourer la première cigarette à l’intérieur, souligne Raymond, casquette vissée sur la tête. Mais nous vivons dans une société d’interdiction. » Pas de protestation
Le problème étant que les non-fumeurs subissaient, à leur insu, les fumées de cigarettes. « On faisait avec, reconnaît Marie-Laure, mais c’était insupportable puisqu’on était quand même des fumeurs passifs. Et puis je ne vous raconte pas pour l’odeur sur les vêtements. »
Chez les inconditionnels de la « tige » ou « blonde », l’interdiction a eu des points positifs. « Finalement, je prends du plaisir à aller dehors pour fumer, avoue Jean-Luc. Ce n’est pas désagréable. Au contraire, cela marque le coup. On prend l’air, on discute de choses et d’autres. » Comme une rupture appréciable.
S’il est permis au gérant d’installer les fumeurs en terrasse, c’est parce qu’il s’agit en théorie d’un « espace extérieur », donc non règlementé par le décret d’interdiction.
Concernant la terrasse, la loi stipule que c’est un espace clos (partiellement ou non) mais totalement découvert, ou un espace couvert mais au moins ouvert sur son côté principal (façade frontale le plus souvent), et surtout, un espace qui demeure cloisonné du reste de l’établissement.
Au bar Au p’tit pêcheur, commerce emblématique de la cité mortagnaise, « nous avons principalement que des habitués, explique la gérante. Et même nos gros fumeurs peuvent rester maintenant deux heures à ne pas être tentés. Aucun n’a protesté contre l’interdiction » . Une meilleure santé
Selon la gérante, c’était surtout par mimétisme que les cigarettes s’allumaient. « Quand quelqu’un commençait à fumer, alors, les autres faisaient pareil. »
Mais voilà, « nous n’avons pas senti de bouleversement. Je dirai même que cette interdiction améliore la santé des autres » . Au Café de France, « même si on n’a jamais connu avant, soulignent les gérants, c’est une très bonne décision et les clients des bars se sont relativement bien habitués à cela. C’est rentré dans les moeurs » .
Ils l’avouent, « s’il était toujours possible de fumer dans les bars, nous n’aurions peutêtre pas fait ce choix-là ».
*Sauf dans les débits permanents de boissons à consommer sur place, casinos, cercles de jeu, débits de tabac, discothèques, hôtels et restaurants, pour lesquels l’interdiction est entrée en vigueur le 2 janvier 2008.