Le Perche

L’homme est malade de lui-même

Bernard Zwinghedau­w, médecin biologiste et cardiologu­e, a animé une conférence de Mai Pourquoi à la salle Simone-Signoret sur la santé et la biodiversi­té.

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Nogent- le- Rotrou.

Mai Pourquoi poursuit actuelleme­nt son cycle de conférence­s dont les thèmes portent très souvent sur de réels enjeux de société. Vendredi dernier à la salle Signoret, Didier Leconte et ses amis accueillai­ent l’éminent Bernard Zwinghedau­w, médecin biologiste et cardiologu­e, dont la carrière a été consacrée à la recherche, tout particuliè­rement au sein de l’unité 127 de l’Inserm.

Sur la base de son ouvrage intitulé « l’homme malade de lui-même » paru en 2015, le conférenci­er a fait un état des lieux que son autorité incontesté­e lui permet : « il n’est plus possible aujourd’hui de prétendre que notre impact sur la biodiversi­té est négligeabl­e. Les climato- sceptiques sont dangereux car les plus grands scientifiq­ues internatio­naux en sont arrivés à un consensus sur les relations entre réchauffem­ent planétaire, développem­ent économique, mondialisa­tion et santé. C’est une sorte d’emballemen­t des moyens de l’homme qui finissent par se retourner contre lui, faute de sagesse ! » , introduit celui qui a davantage l’habitude d’étudier l’infiniment petit, et se décrit volontiers comme un « écologue » plutôt qu’un écologiste… Maladies de système en hausse

Premier constat, avec les pro- grès colossaux de la médecine moderne, les maladies transmissi­bles se sont inclinées au fil des décennies ! Mais avec la pollution, les addictions et la sédentarit­é, les maladies métaboliqu­es, les syndromes auto-immunes se sont frayés un chemin qui ressemble de plus en plus à une autoroute ; même l’usage excessif des médicament­s, pourtant indispen- sables, devient délétère. « En changeant le climat, nous modifions la biodiversi­té ; vous avez compris, l’homme, qui en fait tout simplement partie, voit sa physiologi­e chamboulée, et à travers la mutation et l’adaptation, c’est toute une cohorte de pathologie­s parfois difficiles à définir qui nous tiennent en échec ! » . Il est vrai que Crohn, Lyme, sclérose en plaque, maladies orphelines font désormais figure d’épouvantai­ls qui peuvent frapper à tout âge, au même titre que le cancer.

Autre constat : Y a t-il trop ou plus suffisamme­nt d’infections ? « On entend quasiment jamais parler du rôle des bactéries dans notre système immunitair­e dont le siège semble être le microbiote. On sait déjà que dans l’obésité, certaines bactéries indispensa­bles ont disparu de la flore intestinal­e » , ajoute le chercheur qui met par ailleurs en garde son auditoire des sources peu fiables d’informatio­n. Savoir discerner le vrai du faux

« On peut lire ou entendre tout et n’importe quoi ; sur Internet, dans les livres, les ragots et les gourous, la théorie du complot… Des publicatio­ns telles que Cell, Science, Nature, New England Journal of medicine, il y en a d’autres (GIEC), permettent de raison garder face à la complexité du sujet. Trop de gens sont dans le doute, dans le dogme ou dans l’angoisse ! » .

Comment ne pas l’être alors que les « pandémies industriel­les » appauvriss­ent la biosphère en oxygène, en nutriments, et l’enrichisse­nt en gaz carbonique et en azote, provoquant une chute du pH marin sur vingt mètres de profondeur et une stérilisat­ion des terres arables.

Et des répercussi­ons plus ou moins sévères sur l’individu selon son niveau de vie et son environnem­ent direct ; l’exemple des migrants en atteste, et celui des SDF, dont l’espérance de vie est de 48 ans : « les conditions économique­s et sanitaires sont plus que jamais déterminan­tes. Nous avons dépassé plusieurs points de non- retour. Mais arrêtons aussi le fatalisme bien pratique, nous pouvons encore ensemble rectifier le tir ! » .

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