Le Perche

Ils vendent leur propre brique de lait

Onze agriculteu­rs sarthois ont décidé de reprendre leur destin en main en produisant et commercial­isant brique de lait équitable de la Sarthe.

- Pierre Veillé

Sarthe.

« On avait du mal à sortir la tête de l’eau » , reconnaît François Thomelin, producteur et fondateur d’Equilait 72. Plus question de subir la crise qui secoue le monde du lait depuis 2009. Onze producteur­s, des « voisins » , ont décidé de s’associer pour produire, transporte­r et commercial­iser leur lait sous forme de brique pour les rémunérer justement et revalorise­r leur métier.

Ils discutent ensemble pour mettre en place un circuit court de produit local. Les idées fusent et finalement « nous sommes partis sur une brique, un produit de consommati­on courante » . L’idée germe et il faut la concrétise­r. « Nous avons mis en place une société de commercial­isation pour gérer la production jusqu’au consommate­ur. Il nous appartient, on maîtrise et facture tout » , raconte François Thomelin. Apprendre de nouveaux métiers

Produire, ils savaient faire. Il leur a fallu se retrousser les manches pour découvrir, comprendre, apprendre comment le commercial­iser.

« Nous découvrons un autre métier. Ce n’est pas insurmonta­ble » , reconnaît Bastien Alix, l’un des producteur­s associés. Des laiteries à la grande distributi­on, dans leurs démarches, ils assurent avoir « été encouragés de partout » . Le juste prix

En maîtrisant toute la production, ils suppriment tous les intermédia­ires et leurs marges : « nous recherchon­s l’équitabili­té du début jusqu’à la fin » . Par mois, ils comptent produire 50 000 à 60 000 litres de lait équitable. Pas question pour l’instant de renier leur contrat avec l’entreprise Savencia. « C’était trop risqué de tout miser sur Equilait » , reconnaît François Thomelin.

Avant de lancer leur brique de lait, ils étaient tributaire­s des prix du marché. « Actuelleme­nt le prix est à 32 centimes du litre. En 2016 on est descendu à 27/28 centimes… » , se souviennen­t les producteur­s. Avec Equilait, ils vendent leur produit à 39 centimes du litre. « C’est une différence très importante. On estime à 34 centimes le tarif pour pouvoir juste couvrir les coûts de production » . Ça peut paraître insignifia­nt mais multiplié par le nombre de litres produit chaque année, la différence est de plusieurs milliers d’euros. Se réappropri­er son travail

Aujourd’hui avec Equilait, ils ne travaillen­t plus pour un groupe laitier mais pour euxmêmes, et avec un tarif qui leur permettra de vivre de leur travail. « Ça nous redonne de l’espoir et de la motivation. On voit un renouveau. On travaille pour des gens qui sont aussi nos voisins » , assure François Thomelin.

Le fait de contrôler leur produit de Aà Z leur donne le sentiment de « se réappropri­er notre travail. On avait un peu perdu l’état d’esprit de nos parents qui vendaient en direct au producteur. C’est très stimulant » . Sauver l’élevage local

Avec un premier lancement de leur produit le 28 août au Leclerc des Fontenelle­s du Mans, ils espèrent maintenant que « le consommate­ur sera réceptif. Notre produit est une certaine fierté » .

Lors de la présentati­on, les retours ont été bons. L’objectif est maintenant de pérenniser l’entreprise : « on vient de se lancer, d’abord on veut assurer un développem­ent correct » . Pourquoi pas vendre leur lait dans d’autres supermarch­és sarthois ou la restaurati­on collective.

S’ils ne sont pas capables à l’heure actuelle d’emmener tous les agriculteu­rs sarthois, leur initiative interpelle les consommate­urs et les profession­nels du secteur. Et qui sait, pourquoi pas à terme aider au sauvetage de l’élevage du départemen­t.

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