Le Perche

Trop de boue sur la route, trois ans de prison pour l’agriculteu­r

- Th. Roussin

La récolte du maïs et la pluie rendent les routes très boueuses et, par conséquent, très dangereuse­s. L’agriculteu­r responsabl­e d’un accident risque la prison et, accessoire­ment, une forte amende.

La saison des ensilages de maïs a débuté, ponctuée par quelques périodes de pluie. Avec le ballet incessant des engins agricoles transporta­nt la récolte, les routes deviennent boueuses et les conséquenc­es peuvent être très graves. Le conducteur d’une voiture ou le pilote d’une moto arrivant sur cette chaussée glissante peut rapidement perdre le contrôle et… la vie. Les devoirs de l’agriculteu­r

L’article 591 de l’ordonnance sur la circulatio­n routière indique que « le conducteur d’un véhicule évitera de salir la chaussée. Avant qu’un véhicule quitte un chantier, une fosse ou un champ, ses roues seront nettoyées. Les chaussées qui ont été souillées seront signalées aux autres usagers de la route et immédiatem­ent nettoyées » . L’obligation faite aux agriculteu­rs est particuliè­rement contraigna­nte et ils sont assez peu à la respecter.

Dans un document de la FDSEA ( Fédération départemen­tale des salariés et exploitant­s agricoles) accessible aux agriculteu­rs, on peut lire que la responsabi­lité civile de l’agriculteu­r pourra être recherchée « si un dommage matériel, corporel ou même moral a été causé à une victime du fait de la présence de boue sur la chaussée » . L’article 1382 du Code civil offre à la victime d’un accident d’obtenir des dommages et intérêts « auprès de l’auteur de la faute. Trois conditions doivent être remplies » .

Pour que la responsabi­lité soit engagée, il faut une faute, un préjudice et un lien de causalité. La faute c’est le fait de ne pas avoir nettoyé la route. Le préjudice c’est la blessure corporelle et/ou les dégâts matériels. Le lien de causalité c’est l’accident survenant en raison de la présence de boue sur la route. Quand ces conditions sont réunies, le responsabl­e peut être condamné à payer des dommages et intérêts. C’est ce que prévoit l’article R 116-2-4 du code de la voirie avec une amende de cinquième classe allant de 1 500 à 3 000 euros.

Il est donc indispensa­ble de nettoyer régulièrem­ent la route pendant toute la durée du chantier, pas seulement à la fin. Jusqu’à 45 000 euros d’amende

Aux peines d’amendes peuvent se cumuler des peines de prison en cas de dommage aux personnes. Toujours selon le document de la FDSEA, « causer involontai­rement à autrui une incapacité totale de travail de moins de trois mois est puni d’un an d’emprisonne­ment et de 15 000 euros d’amende » . Si l’accident cause la mort d’une personne, cet homicide involontai­re est puni de trois ans de prison et de 45 000 euros d’amende (article 221-6 du Code pénal).

Pour éviter l’accident et ses différente­s conséquenc­es, il est donc impératif de nettoyer la route, mais aussi de signaler en amont. La FDSEA explique que « si l’agriculteu­r salit la route, il doit aussitôt signaler le dan- ger et, dans les meilleurs délais, procéder au nettoyage, sinon il se met en infraction. Si le danger est signalé, la responsabi­lité de l’usager est également engagée car il doit adapter son comporteme­nt à la signalisat­ion mise en place » .

Attention, le fait de poser des panneaux triangulai­res réglementa­ires, et de les placer dans les deux sens de circulatio­n à 150 mètres du chantier, ne dégage pas de la responsabi­lité en cas d’accident. Il permet seulement aux autorités de juger des moyens mis en oeuvre pour limiter le risque.

Enfin, poser des panneaux n’exonère pas de nettoyer la route en sortie de champ et partout où elle est souillée.

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Un panneau a été posé en amont mais cela ne suffit pas. La route doit être nettoyée.

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