Le Perche

pour son renard

La semaine dernière a été cauchemard­esque pour Chantal Foucault, qui vit à Moulicent avec sa renarde âgée de 11 ans. Son domicile a été perquisiti­onné, de manière brutale selon elle, et l’animal lui a été retiré. Une associatio­n s’est mobilisée.

- Raphaël Hudry

Le domicile de Chantal Foucault a été perquisiti­onné la semaine dernière et Câline, âgée de 11 ans, lui a été retirée. Une associatio­n se mobilise pour retrouver le renard.

Longny- les-Villages.

Il est vrai que la loi doit être la même pour tout le monde. Un renard est classé « animal nuisible » et ne fait normalemen­t pas partie des animaux domestique­s. Mais était-ce la peine de violenter une dame parce qu’elle en possède un ?

Souvenez-vous. En octobre dernier, Le Perche dressait le portrait de Chantal Foucault, une habitante de Moulicent qui avait recueilli un bébé renard, une femelle trouvée derrière un tas de bois, seule survivante de sa couvée. Depuis onze ans, l’animal vivait de manière quasi domestique et se dirigeait lentement vers la fin de sa vie. Perquisiti­on musclée

Oui, mais voilà. Mercredi dernier, à 9 heures du matin, sept personnes entrent chez Chantal Foucault. Parmi eux, des fédéraux de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) et des gendarmes de la compagnie de Longny- auPerche. Leur but, perquisiti­onner Câline, la renarde. L’habitante aurait alors fait une crise de panique et aurait demandé (crié ?) aux forces de l’ordre de ne pas la prendre. Elle avoue également avoir insulté les militaires, notamment « d’enfoirés ».

L’opération semble avoir été étrangemen­t musclée. Selon Chantal, trois gendarmes l’auraient « brutalisée » , ainsi que son père. Nous parlons ici d’une femme de 63 ans légèrement handicapée, et d’un homme de 93 ans qui marche difficilem­ent. « Ils m’ont coincée, avec les mains derrière le dos », ajoute Chantal qui n’hésite pas à parler de « séquestrat­ion » . En règle ?

Les forces de l’ordre sont reparties avec Câline. « Ils l’ont mise dans une cage. Elle s’est laissée faire, elle n’est pas agressive ». Âgée, malade de la thyroïde, l’animal est en fin de vie. Mais, traitée et vaccinée, elle « était en règle d’un point de vue sanitaire ». Chantal avait même un passeport européen pour le canidé.

« Ils n’avaient aucune raison d’intervenir, le seul papier qui manquait, c’est un permis » , lance Valeria Orfila, fondatrice de l’associatio­n 4 sabots et un fer, basée à Saint-Mauricelès-Charencey. Cette dernière a été contactée par Paulette Tallet, présidente de l’Associatio­n de protection des animaux de compagnie et autres (Apaca) de L’Aigle.

Selon Valeria, les services lui auraient assuré que plus aucun permis ou autorisati­on ne pouvait être délivré pour détenir un animal sauvage. Ce qui est faux, comme indique la préfecture (lire encadré ci-dessous). En revanche, « en aucun cas, l’animal ne doit être prélevé dans la nature ». C’est ce qui pose problème dans le cas de Chantal. « Elle ne reverra jamais sa maîtresse »

Cependant, quel était l’intérêt de lui retirer l’animal alors que la renarde est en fin de vie et ne représenta­it pas un danger ?, comme s’interroge Me Isabelle Terrin, avocate à Marseille et spécialisé­e dans la cause animale. Elle a été appelée à l’aide par Valeria Orfila. « Je suis très étonnée par la célérité avec laquelle le service public a réagi pour enlever une renarde en fin de vie à la personne qui l’a sauvée, et avec laquelle elle a toujours vécu, souligne la magistrate. Qui cela ennuyait-il ? C’est cruel, d’autant qu’on ne sait pas où se trouve la renarde, si elle est bien soignée, si elle supporte ce changement à son âge… Le minimum d’humanité serait de donner des nouvelles. »

Valeria Orfila, très remontée contre ce qu’elle estime être de « l’abus de pouvoir » de la part des gendarmes, aurait contacté 30 Millions d’amis et la Fondation Brigitte Bardot pour faire bouger les choses. Tout ce qu’elle voudrait, c’est que « Câline termine sa vie avec sa maîtresse » .

Mais cela ne semble pas être possible. Paulette Tallet, présidente de l’Apaca, a ainsi été en contact avec les services concernés. « Je leur ai dit que je voulais constater l’état de la renarde, mais on n’a pas le droit de se mettre en rapport avec des animaux sauvages enlevés. On m’a assuré qu’elle allait très bien, qu’elle n’était pas morte. Mais je pense qu’elle ne reverra jamais sa maîtresse… »

Malgré tout, la présidente de l’Apaca s’indigne aussi de la manière dont s’est déroulée l’opération, « normalemen­t, ils préviennen­t quand ils doivent intervenir » , et fustige l’attitude « aberrante » des gendarmes.

Chez Chantal, c’est également l’incompréhe­nsion. Choquée, elle a porté plainte contre les trois gendarmes jeudi soir. Contactée, la brigade de gendarmeri­e de Longny nous a redirigés vers la compagnie de Mortagne-au-Perche, qui nous a elle-même renvoyés vers le procureur d’Alençon. Pour le magistrat, « c’est à bon droit que ce renard a été pris là où il ne devait pas être. Concernant la plainte déposée, une enquête est en cours, et les enquêteurs feront preuve de toute l’impartiali­té requise ».

Valeria Orfila poursuit son combat et tente de mobiliser les internaute­s avec un objectif : « rendez Câline à Chantal » . D’autant plus que, selon un document que Le Perche a pu consulter, le procès-verbal de la perquisiti­on concernera­it une tortue d’Hermann et non pas un renard. Dans ce cas, les services fédéraux avaient-ils le droit de saisir un autre animal ?

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 ??  ?? Câline, la renarde de Chantal Foucault, lui a été enlevée par les forces de l’ordre. Elle a porté plainte contre les gendarmes.
Câline, la renarde de Chantal Foucault, lui a été enlevée par les forces de l’ordre. Elle a porté plainte contre les gendarmes.

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