Loin de leur pays, elles étudient au collège Bignon, à Mortagne
Ye Eun Chae, 15 ans, et Mimjung Kim, 14 ans, ont quitté la Corée du Sud pour suivre les cours en France, dans un collège privé. Un déracinement au profit d’une éducation réputée dans le monde entier.
Mortagne-au- Perche. Ye Eun Chae dit ne parler que
« très peu » français. Mais, en réalité, son vocabulaire est déjà fourni et elle est capable d’avoir une conversation sans interprète. L’adolescente de 15 ans est arrivée en France le 10 septembre 2017. Elle a quitté Séoul et ses 9,86 millions d’habitants pour le Perche. Dépaysement assuré.
À Mortagne, la jeune Sud Coréenne est scolarisée au sein du collège Bignon. Sur les bancs de l’école, elle a retrouvé une concitoyenne : Mimjung Kim, 14 ans. Elle vient de Suwon (plus grande ville de la province de Gyeonggi, à environ 30 km au Sud de Séoul - 1 105 953 habitants). Elle aussi, a atterri le 10 septembre dans l’Orne. « Un organisme sudcoréen - EU France - nous a contactés pour savoir si nous pouvions les accueillir en
classe » , explique André Lopez, directeur de l’ensemble scolaire Bignon.
Une première pour l’établissement mortagnais, qui pourtant « reçoit régulièrement des élèves étrangers » . Comment s’est passée la rentrée en 3e ? « J’étais nerveuse. Je ne parlais pas bien français et ne connaissais personne. J’étais
un peu timide » , répond Ye Eun Chae. À 9 000 km de chez elle et avec pour simple bagage linguistique le niveau 1 du Delf (Diplôme d’études en langue française), Ye Eun Chae a dû redoubler d’efforts, pour s’intégrer. Malgré son jeune âge, elle n’a pas baissé les bras : « Depuis, j’ai un peu progressé en français. J’ai pu commencer à étudier et j’essaie de discuter avec les autres » . Mimjung Kim, elle, est scolarisée en 4e. Pour l’adolescente
qui ne « comprenait presque rien » à la langue de Molière,
les « débuts ont été compli
qués » , rapporte André Lopez. Car les deux Coréennes suivent « les cours classiques » , les mêmes que leurs petits camarades percherons. Les enseignants prennent toutefois le temps de « revoir les bases » avec elles. « Je me suis amélio-
rée en grammaire » , se réjouit Ye Eun Chae. Elle s’en sort aussi en mathématiques et physique et « parle bien anglais » .
Travailler à l’ONU
Si Ye Eun Chae et Mimjung Kim s’accrochent, c’est que la France représente pour elles l’excellence, en matière d’études supérieures. Les ados voient loin : la première veut « devenir diplomate, travailler à l’ONU » ,
la seconde rêve « d’être architecte. Et les écoles d’architectures parisiennes sont répu
tées » . Le duo devrait donc rester encore quelques années en France. Pour « facilité l’intégration » , les jeunes filles ont décidé de se choisir des prénoms européens. Ye Eun Chae s’appelle maintenant Emma, et Mimjung Kim a choisi Diana. « C’est leur initiative. Elles ont une force de caractère impressionnante » , témoigne André Lopez. Chaque soir de la semaine,
Emma et Diana dorment à l’internat. Le week- end, elles rejoignent leurs familles d’accueil respectives, à Mortagne. Une « petite ville idéale pour
apprendre la langue » , estime Emma. Avec sa famille d’accueil, elle a visité l’église et quelques lieux emblématiques de la cité d’Alain. Elle a aussi découvert Alençon. Pendant les vacances d’automne, Ye Eun Chae et Mimjung Kim ont voyagé à Paris. À Noël, elles ont pu rentrer chez elles. C’est la seule fois où elles ont revu leur famille. « Maintenant, il va falloir attendre la fin de l’année scolaire, en juillet » , indique le chef d’établissement.
La nourriture française ? Trop fade ! N’ont- elles pas le mal du
pays ? « Elles ont réussi à bien s’insérer, au collège. Mais, culturellement, c’est difficile pour elles. Ici, tout est différent : les relations humaines,
la taille de la ville… Elles sont
parfois un peu isolées » , remarque André Lopez qui salue au passage leur capacité d’abnégation.
À 14 et 15 ans, Diana et Emma ont aussi parfois du mal à supporter l’éloignement. « Ma famille et mes amis me manquent » , admet Emma. Internet pallie - un peu - la solitude : « Le week-end, on fait un FaceTime avec mes parents » . Il y a aussi une chose essentielle, que les deux jeunes filles n’ont plus : la nourriture coréenne. « Ça nous manque, surtout la viande et le Kimchi » . Un mets traditionnel coréen composé de piments et de légumes lacto- fermentés. La cuisine française est « trop fade, pas assez épicée » . Mais, vivre une année scolaire à l’autre bout de la planète ça, ça ne manque pas de piquant !
« J’étais un peu timide »