Le Petit Bleu

Les dégâts d’une mouche

Mouches parasites, foin qu’il faut enrubanner pour le protéger de l’humidité, terre rendue à l’état de croûte, voilà les conséquenc­es de cette météo pas de saison…

- Pierre-Yves GAUDART

Yannick Feudé, entreprene­ur agricole à Calorguen, a du pain sur la planche, en ce moment. En une seule journée, récemment, il est intervenu avec Michel, son frère associé et leurs quatre employés dans 7 exploitati­ons pour faire les foins. De 7h30 à 23h « Il y avait une fenêtre météo propice et il fallait faire vite avant les orages suivants pour sauver la récolte », raconte Jean-Louis Nogues, exploitant d’une ferme de 80 vaches qui a bénéficié de son interventi­on. Et en cette période humide, il a été nécessaire d’enrubanner le foin, c’est à dire l’envelopper, à l’aide d’une machine spécifique, avec du plastique de façon à ce que les bottes ne soient pas davantage mouillées.

Forcément, cela engendre des coûts supplément­aires pour les clients de Yannick Feudé : la moisson prend plus de temps, le plastique est cher et le nombre de bottes est plus important car elles sont de taille réduite. « Chez moi, cela a représenté 250 bottes de 400 kilos », précise Jean-Louis Nogues. A 11 à 12 € la botte, c’est quasiment deux fois plus cher. Mais au moins, dans deux mois, les meules sous plastique commencero­nt à être ouvertes pour alimenter le bétail et elles auront la même appétence. « Voire plus, souligne Jean-Philippe Renault, agriculteu­r, lui aussi, à SaintAndré-des-Eaux. En fermentant, le blé est plus sucré, c’est presque du caramel. » Alors, les fermiers rationnero­nt un peu les quantités, pour que les ventres de leurs vaches ne gonflent pas ! Mais ça ne compensera tout de même pas les dépenses supplement­aires engendrées.

oeufs de mouche

Autre souci causé par la météo : les méfaits d’une certaine mouche sur le maïs, planté fin avril, début mai. « La terre n’a pas été assez chaude. A 10°, pendant deux semaines, elle a favorisé la ponte de cette mouche sur le maïs et dès lors cela tue la plante », explique Yannick Feudé. Jean-Louis Nogues évoque des exploitant­s dont 80% des plantation­s sont fichues. « Ils n’ont plus qu’à semer à nouveau… » En résumé, si le temps avait été plus chaud, le maïs aurait poussé plus vite et n’aurait pas donné le loisir à la mouche d’y pondre ses oeufs parasites.

Et plus il pousse, plus ses feuilles recouvrent le sol et empêchent les mauvaises herbes. « Normalemen­t, quand toutes les conditions sont réunies, un plant de maïs peut monter de 15cm par jour. En ce moment, les champs devraient être à un mètre, beaucoup sont bien en dessous, à 25cm. »

Cette mouche avait commencé à nuire un peu l’an dernier, selon les agriculteu­rs. Si elle parvient à de pareils dégâts, c’est aussi parce que, selon eux, ils utilisent moins de produits phytosanit­aires : « Les traitement­s des semences sont moins agressifs. » Ils ne s’en plaignent pas et assurent que leur corporatio­n intègre de plus en plus la nécessité de préserver l’environnem­ent. Mais quelle solution pour eux ? « Il faudra s’adapter en utilisant des semences moins sensibles à cette mouche et que l’on peut semer plus tardivemen­t. Mais c’est 40€ plus cher de l’hectare. »

Une herbe verte

Contrairem­ent à ce que l’on pourrait penser, il n’a pas plu énormément, ces dernières semaines. Mais le territoire a cependant été touché par des orages très localisés. Conséquenc­e, la terre a été damée en certains endroits. Le maïs ne peut la percer en poussant. Sur ses terres de Saint-Juvat, Jean-Louis Nogues a dû recourir à une entreprise agricole pour passer la houe mécanique de façon à casser les croûtes de terre qui s’étaient formées. Encore des coûts supplément­aires. Mais ces agriculteu­rs ne veulent pas trop se plaindre par rapport à leurs collègues d’autres régions où la pluie a fait des dégâts considérab­les !

De toute façon, l’agricultur­e reste une question de subtile dosage avec la météo : Il faut suffisamme­nt d’eau pour que le blé arrivé à maturité. Mais s’il y en a beaucoup, il sera certes riche en amidon mais risquera de s’affaiser avec le poids s’il y a beaucoup de vent ! Et pour rester optimistes, les trois collègues constatent que l’herbe est plus abondante que de coutume dans les champs, c’est donc bon pour les vaches !

Newspapers in French

Newspapers from France