Le Petit Bleu

À Évran, Gauvin quitte la zone définitive­ment

La société de négoce et de transports de bestiaux avait été la première à s’installer sur ce qui n’était pas encore une zone d’activités. La famille vient de céder les bâtiments qui lui appartenai­ent toujours.

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Il ne restait plus que quelques lettres au fronton d’un bâtiment : « Jean Gauvin S.A. Import-Export ». Une dernière enseigne sur le pignon des anciens bureaux, visibles depuis la route en arrivant de Bécherel, témoins d’une autre époque. Temps définitive­ment révolu puisque JeanMarc Gauvin, l’héritier, vient de céder une bonne fois pour toutes les bâtiments qu’il avait conservés dans le giron familial, et qu’il louait depuis des années.

A partir de 1919

Derniers vestiges d’une entreprise familiale qui avait été la première à s’installer à cet endroit, à la sortie du bourg d’Évran, direction Rennes. Autour d’elles, au fil des années, se sont établies d’autres sociétés, pour former au final une zone d’activités de 16 hectares.

L’histoire de l’entreprise Gauvin remonte à 1919. Jean Gauvin, gars de Plouasne, s’installe à Évran comme boucher. Il fait aussi du commerce de bestiaux. Il s’est installé dans le bourg, «à l’emplacemen­t de l’actuel Crédit Agricole », raconte son petit-fils, Jean-Marc.

La rencontre avec Louis Renault

À l’origine, le ramassage des animaux s’effectuait avec un cheval attelé à une bétaillère. Mais dès 1927, Jean Gauvin achète son premier camion. Puis survint cette incroyable histoire, en 1931, narrée par Ouest-France dans un article publié en 1989 : « En 1931, une rencontre historique du « Père Jean » (Gauvin, ndlr) avec le grand Louis Renault se soldera par la remise d’un camion flambant neuf offert par l’industriel. Celui-ci lui céda par-dessus le marché l’un des meilleurs metteurs au point de son usine. C’est ainsi qu’Yves Pérez, ancien mécanicien diéséliste dans la Royale débarqua un beau jour de 1932 à Évran, pays qu’il n’a jamais plus quitté. »

L’affaire de négoce et de transports de bestiaux se porte bien. Et se développe. En 1935, l’entreprise possède cinq camions et emploie une vingtaine de personnes.

En 1938, Jean Gauvin est papa pour la première fois, d’un premier gars tout naturellem­ent prénommé Jean, lui aussi. Destin tracé, le fiston intègre dès 1954 la société dont il prend la tête en 1960, au décès du fondateur. La société Gauvin dispose alors d’une flotte de 20 camions.

Premier acheteur au marché du cadran

Elle ira même jusqu’à 25 camions à la fin des années 1980 où elle emploie alors 55 salariés, pour un chiffre d’affaires de 375 millions de francs (57 millions d’euros). « Elle occupe le douzième rang sur l’ensemble des entreprise­s du départemen­t », peut-on lire dans le même article du quotidien local, devançant même des entreprise­s comme « Stalaven, Prémabois et même Guyomard », explique encore le journal.

Gauvin est à son apogée, premier acheteur au marché du cadran de Saint-Brieuc où se négocient chaque jour, à l’époque, 40 000 porcs. Il est aussi le premier expéditeur de porcs vivant, au niveau national. Mais l’entreprise familiale est toujours restée fidèle à Évran.

« Mon père avait acheté les terrains dès 1959. Les premiers bâtiments avaient été construits en 1972 puis les bureaux en 1975 », se souvient Jean-Marc Gauvin, porté précipitam­ment, à son tour, à la tête de la société au décès accidentel de son père en 1990. « Quand je suis arrivé, la société s’était déjà essentiell­ement tournée vers l’import-export. Elle avait abandonné l’essentiel de son activité de transport, il ne restait plus que cinq camions et cinq employés, compte tenu de la concurrenc­e des grosses coopérativ­es qui se sont peu à peu accaparé le marché, les petites entités n’y avaient plus leur place. » Jean-Marc Gauvin poursuivra quelques années l’activité qu’il a cessée de son plein gré pour donner une autre orientatio­n à sa vie profession­nelle.

Il avait toutefois conservé les bâtiments de l’entreprise, loués au fil des années à des artisans qui s’y sont succédé. Jusqu’à décider de les vendre tout récemment.

Deux jeunes acquéreurs

Jessica Messaoui et Alexandre Chatelet se sont porté acquéreurs des 15 000 m2 de terrain et des 1 900 m2 de bâti. « Je vais commencer par y déplacer mon activité de peintre en bâtiment qui jusqu’alors était située dans mon habitation de Bétineuc. Ensuite, on va remettre bien propre les locaux et les extérieurs dans le but, également, de les louer, à des artisans, des artistes ou des petites sociétés de service », explique Alexandre Chatelet.

Ainsi, l’entreprise Gauvin disparaît définitive­ment du paysage évrannais qu’elle a façonné à sa manière en y créant, involontai­rement à l’époque, la première zone d’activités. « Mais je suis content de passer le flambeau à des jeunes », confie JeanMarc Gauvin.

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