Le Petit Bleu

Erwan Péron lance ses couteaux à beurre

- Bernadette RAMEL

Le Dinannais a conçu une douzaine d’objets innovants et ludiques, dont Kipik, le hérisson de l’apéro. La petite dernière, Nolwenn, est un couteau à tartiner.

Des objets à la fois beaux et pratiques. Innovants, mais avec une touche de poésie. Fabriqués, quand c’est possible, en Bretagne, et sinon en France. Voilà le credo d’Erwan Péron, le Dinannais de 44 ans créateur du fameux Kipik. Ce petit hérisson à 22 pics, fabriqué en pare-chocs recyclés, à Quimper, a fait son chemin jusque dans les magasins du Museum of Modern Art de New-York. Il est l’un des best-sellers de l’entreprise Lib. « On doit en être à 120.000 exemplaire­s vendus », évalue le designer. La belle histoire avait commencé en 2010 avec la Lib, un mélangeur à cocktails en forme de libellule, restée le produit-phare de la marque. Qui en compte aujourd’hui 12.

Hommage à ses grands-parents

La petite dernière s’appelle Nolwenn. C’est un couteau à beurre. Comme souvent avec Erwan Péron, il y a une histoire derrière l’objet. « J’ai grandi en Afrique jusqu’à 17 ans, raconte-t-il. Je revenais deux fois par an chez mes grands-parents dans le Finistère. Je leur piquais tout le temps un couteau ou deux, pour sculpter. Ils ont fini par m’offrir un Opinel. Chez eux, il y avait toujours du beurre sur la table. A leur décès, je me suis promis de dessiner un couteau à beurre qui leur serait dédié. Nolwenn, c’est le prénom de ma cousine qui elle aussi venait en vacances chez mes grands-parents. »

Pour l’heure, deux versions sont disponible­s, au prix de 25€ chacune. L’une en bois naturel avec une lame gravée de rayures évoquant une marinière. L’autre en noir, avec des symboles rappelant les dentelles d’une coiffe bigoudène, « mais qui sont en fait des symboles celtes ». Ces couteaux tiennent debout et sont faciles à prendre un main. « Le manche est fabriqué près de Rennes, la lame à Thiers. Elle est gravée à Dinan par Meta Graph, installé dans la pépinière d’entreprise­s Ecodia. » Trois autres modèles, d’aspect encore plus « bretons », vont sortir en janvier. Avec là aussi des symboles représenta­nt « joie et ténacité », « confiance et abondance ».

Le beau et l’utile

Des idées, le designer dinannais n’en manque pas. « La création est mon moteur. » Il s’inspire de ce qui l’entoure. « Ça part de situations, de moments d’émerveille­ment. De quelque chose que je trouve beau et que je cherche à rendre utile… » La Lib a vu le jour ainsi, grâce à une libellule posée sur son verre. Hugo, l’escargot à la fois échappe-vapeur et repose-cuillère, qui semble s’enfuir des cocottes, est né d’un dilemme plus terre-à-terre. « Un dimanche midi, je faisais la cuisine et je ne savais pas où poser la cuillère servant à remuer le plat. Le prototype d’Hugo était fait dans la semaine. »

Le temps de développem­ent est souvent beaucoup plus long (jusqu’à deux ans !), quand il s’agit d’objets « très techniques » comme la Lib, ou « Avril » le dessous de plat qui se plie et s’ouvre comme une fleur… Mais le processus reste le même : dessin, maquette (souvent en terre), prototype. La modélisati­on 3D, qui vient ensuite, c’est plutôt l’affaire de son collègue Benjamin Peigné.

Actuelleme­nt, l’équipe travaille sur le prototype d’une planche à découper, avec couteau intégré. Elle s’appellera… Excalibur ! Tout un programme…

De Ménard à Lib

Si son père, lui-même sorti de l’école des Mines, le voyait plutôt ingénieur, c’est le hasard - ou plutôt un train raté, en Normandie - qui a mis la création sur le chemin d’Erwan Péron. Pour combler le temps, il entre dans un salon de l’étudiant, y découvre une école de design, l’école Pivault, à Nantes. « J’ai passé le concours sans en parler à mon père… Il a compris mais ça l’inquiétait quand même. ’Tu es sûr que ça fera un métier ?’, me demandait-il. »

Oui, puisqu’Erwan a été embauché avant même d’être diplômé. Par les meubles Ernest Ménard, de Bourseul, avec qui il avait travaillé durant un stage chez un designer. « J’ai passé dix ans formidable­s chez lui. » En 2006, il décide pourtant de voler de ses propres ailes. Pour ne pas dessiner que du mobilier. « Je voulais aller vers l’architectu­re d’intérieur. » Le concours lancé par la mairie de Dinan pour la rénovation de sa salle d’honneur lui donne l’occasion de se lancer. Son dossier séduit. Bientôt, il créé son agence.

Parallèlem­ent, il ouvre aussi une boutique d’objets de design, « Impression contempora­ine », en lieu et place de l’imprimerie de l’Horloge, à Dinan. Parce qu’il ne trouve pas d’entreprise pour lancer sa Lib, il se décide à l’éditer lui-même. « Rien que le moule coûtait 40.000€ ! Mais l’investisse­ment a été rentabilis­é au bout d’un an et demi. »

En 2017, Erwan Péron va entamer un nouveau chapitre. S’il ferme « Impression contempora­ine » (qui reste ouvert jusqu’au 18 janvier), n’y voyez pas forcément un signe négatif. « On va se recentrer sur la création. Développer la collection Lib, le chiffre d’affaires, le nombre de salariés. » Dinan aura toujours une vitrine des produits Lib, mais « Au Petit Bonjour », Grand’Rue.

 ??  ??
 ??  ?? Le designer dinannais Erwan Péron vient de lancer ses deux premières « Nolwenn », des couteaux à beurre.
Le designer dinannais Erwan Péron vient de lancer ses deux premières « Nolwenn », des couteaux à beurre.

Newspapers in French

Newspapers from France