Quand un octogénaire verse 226 000 € à son auxiliaire de vie…
Depuis 2008, elle le baladait, lui donnait un coup de main pour ses mots-croisés, lui faisait la conversation et s’occupait de le mettre au lit : l’auxiliaire de vie était aux petits soins pour le vieil homme de 81 ans, aujourd’hui décédé, qui vivait dans sa résidence secondaire de Dinard. Une aide à domicile exemplaire qui comparaît pourtant devant le tribunal de Saint-Malo le jeudi 15 décembre pour abus frauduleux de la faiblesse ou de l’ignorance d’une personne vulnérable.
C’est une banque qui a signalé de nombreux débits sur le compte de son client âgé au procureur de Paris. L’ancien avocat à la retraite confortable était devenu interdit bancaire dès octobre 2009. Il a fallu l’intervention de sa nièce pour régulariser la situation. En trois ans, c’est un débit estimé à 226 653 €.
Pourtant, elle n’était pas à plaindre : elle était rémunérée 1 050 €… par semaine ! L’équivalent de 110 heures, non déclarées, et sans contrat de travail.
Sur un compte au Maroc, les enquêteurs ont retrouvé 70 000 €. Pour une aide à domicile qui bénéficiait d’une aide au logement et de la banque alimentaire… il n’en a pas fallu moins pour attirer les soupçons.
Quand un médecin a fait remarquer à l’octogénaire qu’il pouvait être un peu trop généreux avec son « assistante de vie », ce dernier a répondu : « Et alors ? Vous croyez que c’est facile de trouver quelqu’un qui s’occupe aussi bien de moi que cette dame ? »
Difficultés de calcul et de conversion, l’homme est qualifié de « vulnérable » par les experts. Il pourrait avoir confondu les francs et les euros lorsqu’il a signé des chèques pour son auxiliaire, dont certains d’un coquet montant de 6 000 €. Pour un seul mois, ce sont 7 chèques émis pour un montant de 11 000 €.
« Comment peut-on concevoir que la victime ait pu avoir une explication claire sur l’objet de ces 161 chèques sur 3 ans ? »
Déontologie, confusion totale pour le vieil homme et affection sont venues s’entrechoquer au regard de ces largesses. Les collègues de l’aide à domicile parlent « d’emprise affective ». « C’est une vulnérabilité partielle. Personne ne dit qu’il était dément. Mais dans ses calculs et sa comptabilité, il y avait une faiblesse », estime le ministère public.
À la barre, la femme et son mari regrettent : « Je ne pensais pas que ça nous amènerait devant la justice », dit l’homme. Et pourtant, le procureur de la République lui fait remarquer que les chèques étaient encaissés sur le compte de la fille du couple. Puis les sommes revirées sur le compte du mari. On n’avait manifestement pas la conscience tranquille…
L’auxiliaire de vie est condamnée à 3 ans de prison avec sursis et 30 000 € d’amende et a l’interdiction d’exercer son activité professionnelle pendant cinq ans. Son mari qui a profité de l’argent est lui condamné à 1 an de prison avec sursis et 20 000 € d’amende. Leur fille, sur le compte de laquelle était déposée une partie des sommes, en est quitte pour six mois de prison avec sursis et 3 000 € d’amende.
Pourtant rémunérée 1 050 €… par semaine !