Le Petit Bleu

L’énigme du grand menhir

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Serge Cassen, chercheur au CNRS, est un spécialist­e des mégalithes. Il y a quelques mois, un documentai­re de France Télévision, « L’énigme du grand menhir » montrait ses découverte­s, notamment dans le golfe du Morbihan. Les gravures réalisées 5.000 ans avant Jésus-Christ et qui couvrent ces pierres monumental­es à Locmariaqu­er - où se trouve le plus grand menhir d’Europe - et sur l’île de Gavrinis, formeraien­t des récits liés à la mer. Récits qui peuvent laisser supposer que ces peuples du néolitique partaient déjà à la conquête des océans. Des gravures semblables ont été trouvées en Galice. Mais aussi sur le menhir penché qui se trouve à Saint-Samson-sur-Rance.

Serge Cassen nous a donné quelques clefs concernant ce menhir. Mais il ne dévoile pas tout : il consacre un livre à la fameuse pierre penchée qui sortira au début de l’année. d’« animaux sauvages bien reconnaiss­ables (sanglier, cervidé) et d’autres qui sont probableme­nt domestique­s (caprin, bovin) ». L’universita­ire constate aussi la présence de bateaux* (des croissants de lune dissymétri­ques) et même des hommes ! Ils sont symbolisés par des croix, plantées sur ces embarcatio­ns. Il confirme ce qui a souvent été dit : « Les objets sont des crosses de jets et des haches emmanchées » et annonce que « le menhir de Saint-Samson réunit le plus grand nombre de haches gravées d’Europe occidental­e » : 16 !

Le plus grand nombre de haches gravées d’Europe

Une tente opaque pour faire apparaître les gravures.

Le menhir de granit est si érodé qu’on ne distingue, à l’oeil nu que quelques gravures floues. Serge Cassen a donc « combiné différente­s techniques telles que la photogramm­étrie et des éclairages tournants » pour parvenir à ses découverte­s. « L’’acquisitio­n s’est faite de nuit et sous une tente opaque. Le plus long est le traitement informatiq­ue, ensuite au laboratoir­e », explique-t-il.

Des points communs avec les mégalithes du golfe du Morbihan.

L’archologue se doutait qu’il trouverait des similitude­s, « mais pas à ce point ». Les seules représenta­tions propres au menhir constarmor­icain sont celles des sangliers et des cervidés. Les autres signes et symboles ont déjà été observés par lui et son équipe à Locmariaqu­er et Gavrinis. Autre point commun aux différents sites : des gravures qui se superposen­t. Est-ce à dire qu’elles ont été réalisées à diverses époques ? Non, répond le chercheur « Les signes sont placés dans un ordre hiérarchiq­ue, les uns ont la préséance sur d’autres, voilà pourquoi ils se recoupent. »

Une stèle historiée comme une bande dessinée.

Serge Cassen considère donc que ce menhir est une stèle historiée dont le récit est décomposé en plusieurs cartouches. Mais il se garde bien de parler d’écriture ou de langage symbolique et avoue qu’il est « impossible à dire ce qu’elle raconte, car le support oral a évidemment disparu. On se doute qu’il s’agit d’une histoire où animaux et objets sont en correspond­ance avec le monde des humains, ces animaux euxmêmes pouvant représente­r des parties du corps social (comme sur un totem, par exemple). La présence de bateaux pose la question du voyage, qu’il soit funéraire ou utopique ou l’histoire d’une fondation : comme les mythes expliquant l’origine du monde, ou d’un lignage, etc. »

L’âge du

Jusqu’à présent,

menhir.

il était daté * Sur une page wikipédia, il est déjà mentionné que « sous un éclairage rasant, des gravures sont visibles sur trois de ses faces, réparties dans une douzaine de cartouches quadrangul­aires, représenta­nt des croix, des palmettes, des crosses, des haches, des carrés, des ondulation­s, des animaux (caprin, bovin), des croissants pouvant évoquer des barques ».

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