Voyage universel sur le mont Saint-Michel
Philippe Lefevre en est à son 4e voyage intérieur qui paradoxalement, nous fait toujours bouger. Cette fois-ci, le bassiste de Trélivan emmène ses auditeurs dans la proche contrée du mont SaintMichel. « Un lieu que je connais par coeur et que j’aime notamment la nuit. »
Les sensations que lui procurent ce lieu mythique, Philippe Lefèvre les insuffle donc dans sa musique ethnique, celtique, discrètement électronique. Il démarre cette ascension spirituelle « En arrivant sur la grève », premier titre de ce nouveau CD. Des choeurs de moines ouvrent et concluent ces soixante minutes de musique instrumentale : son pèlerinage n’a rien de religieux. Il se veut « initiatique » et vise à « rendre hommage » à ceux qui ont construit le mont. Ça, c’est la petite touche médiévale du disque, avec les violons de circonstance. Pour le reste, ce voyage vertical, du sol sablonneux jusqu’au « fantastique », est dans la lignée des précédentes réalisations du compositeur : une occasion de partir vers les doux rivages du monde où s’entremêlent whistle, ocarina géant, duduk, oud, cithare, dans un berceau de boucles électros.
Mais cette musique ’lounge’(1) ne perd pas de vue son objectif premier : celui de planer sur les sommets du mont.
Cela passe par une évocation de l’épouse de Du Guesclin, Tiphaine Raguenel, qui y a son musée, dans le logis où elle est censée avoir vécu avant de devenir dinannaise. On y croise aussi Guy de Maupassant, qui, « dans les pourpres du jour mourant », se tourne vers la Bretagne. Et une passerelle s’établit à nouveau avec Dinan, ville d’où est partie cette musique, grâce au dernier titre emprunté à l’écrivain Roger Vercel, « Sous les pieds de l’archange ».
Entre-temps, Philippe Lefèvre nous fait cheminer dans la crypte du Mont, accompagnés par une mélodie orientale qui fleure bon l’encens. Il fait glisser son auditeur sur des arpèges métalliques de harpe celtique et bifurque par l’Afrique, à l’aide de sonorités extraites d’un n’goni (instrument à cordes pincées) pour le mener au paradis.
On n’est bien sûr pas obligé de corréler ces belles orchestrations avec la balade sur le mont. C’est ainsi que Philippe Lefèvre les a conçues mais chacun fera le voyage intérieur qui lui siéra, en écoutant cette musique veloutée d’où sont bannis les tourments.
(1) En résumé, une musique électronique, au tempo moyen, mêlant instruments exotiques, anciens et actuels.