Le sabot et les sabotiers
C’est devant un parterre d’une trentaine de personnes et de quelques enfants que Joel Pierre, enfant du pays et fils de sabotier, a tenu sa conférence sur ce vieux métier.
Joël Pierre a exposé à la salle des fêtes une vingtaine de paires de sabots, des pièces uniques, et quelques outils spécialement conçus pour le travail du sabot fait à la main.
« Pour faire un sabot, dit-il, on part d’une tronce de hêtre que l’on divise en quartiers. On fait une ébauche à la hache, on façonne l’extérieur à l’aide du paroir et ensuite on le creuse. C’est un travail difficile qui demande une grande maîtrise. »
Pour lui, chaque sabot est une pièce unique et il souhaite faire connaître et reconnaître ce métier depuis longtemps disparu, « par cette conférence, je veux redonner ses lettres de noblesse à ce métier. »
Un musée à Pléven
Depuis qu’il a fait valoir ses droits à la retraite, Joel Pierre donne des conférences et ouvre de temps à autre le musée du métier et du savoir faire du sabotier qu’il a entièrement créé à Pléven. « On me dit souvent que j’ai de la sève du hêtre qui coule dans mes veines. »
Joël en sait un sacré bout sur le métier et les us et coutumes de sabotier, il raconte : « À l’époque on ne se mariait qu’entre sabotiers, qui d’autre aurait voulu donner à marier sa fille à un sabotier ? On se marie à l’intérieur du clan. J’ai l’habitude de dire que les sabotiers de l’époque étaient mal vus comme les Roms aujourd’hui ».
Les sabotiers vivaient près de leur matière première, en forêt, ils construisaient leur hutte sur place et une fois le travail terminé ils repartaient vers un autre coin de forêt reconstruire une autre hutte. « Ils étaient vus par les villageois comme des asociaux », dit-il.
Au début du XXe siècle, autre temps, autres moeurs, les sabotiers se modernisent, ils vivent dans des maisons en dur. Ils se sédentarisent. Une fois l’an, au printemps, toute la famille aide à rentrer les billes de hêtre dans la cour de la maison, puis les descendent vers la plaine, les recouvrent de tiges de châtaignier pour protéger le bois des chaleurs du soleil, car pour le travailler, le bois de hêtre doit rester vert.
Avec les années qui passent, on se modernise, les machines vont remplacer les mains, « cela fait gagner du temps sur le façonnage des sabots, mais les finitions restent encore manuelles. »
Il n’en reste pas moins que la fabrication du sabot se fait avec un geste précis et ferme, pour cela le sabotier a un atout de taille qui lui facilite un peu la tâche : il est ambidextre.