Le Petit Bleu

L’artiste qui n’a pas déchanté

Au piano ou à la guitare, il donne une soixantain­e de concerts par an avec un répertoire exclusivem­ent basé sur des reprises, interprété­es à sa façon. Et ça marche !

- Pierre-Yves GAUDART Francis Vial donnera un concert à la médiathèqu­e de Dinan (où il a récolté déjà un beau succès il y a deux semaines) dimanche 15 octobre à l’occasion de la fête du livre. Contact : 06 03 42 17 40. Site : http://francisenc­oncert.wixsit

Francis Vial n’est pas un chanteur de baluche. Même s’il est souvent en spectacle, le samedi soir ou anime quelques mariages. « 95 % des morceaux » de son répertoire, il les a choisis, il les aime. Adaptés à sa « sauce » , au piano, à la guitare. Deux instrument­s qu’il n’imagine pas jouer sans y poser sa voix puissante. Elle est le pilier de sa prestation, il la protège, il la bichonne. « Ma seule hantise, c’est de chopper la crève. » Le tout juste quinquagén­aire ne fume pas, fait du sport pour l’entretenir. L’année dernière, il lui en avait trop demandé : « J’ai fini la saison, 35 dates en deux mois, sous cortisone, c’est magique mais à éviter. »

Disséquer les chansons

Il faut dire que certaines prestation­s, notamment dans les casinos, peuvent durer quatre heures. C’est beaucoup, même quand on tient la forme comme lui. D’autant plus qu’avant, il y a la route à faire, le matériel à installer. « Une vraie vie de saltimbanq­ue. » En jean chemise ou en costume selon le standing. Une vie qu’il a choisie il y a 17 ans. « Après des tas de petits boulots, j’ai cassé mon CDI pour devenir intermitte­nt du spectacle. Bon, on m’a dit que c’est un statut, pas un métier. Alors ma profession, c’est musicien chanteur. » Un aboutissem­ent à ses rêves d’adolescent quand il écoutait des tas d’artistes au casque de la chaîne hi-fi : Beatles, Billy Joël, Stevie Wonder, Police, Gainsbourg… « C’est ainsi qu’on entend les choses les plus insoupçonn­ées et comment les morceaux sont composés. Cela m’a permis de les disséquer pour savoir les réinterpré­ter. »

Et c’est aussi comme cela que lui est venue l’envie de piano. « Les écouter ne me suffisait plus, alors, à 17 ans et demi, j’ai acheté un piano droit avec l’argent de mon apprentiss­age d’électricie­n. Un peu plus tard, c’était le piano à queue. Je l’ai toujours. Il a fallu une grue pour le poser chez mes parents qui tenaient le magasin ’Aux arts ménagers’ dans le quartier de la gare. » Tout s’est fait à l’oreille. « Je n’ai jamais aimé le solfège. Pendant le service militaire, je jouais du saxo en faisant semblant de lire la partition. » Au piano, Francis Vial commence par composer des chansons, joue dans plusieurs groupes de la région de 1985 à 1995. « C’était plus facile de trouver des lieux pour se produire mais plus difficile qu’aujourd’hui et Internet pour se faire connaître. »

De Paolo Conte à Polnareff

Son seul CD, autoprodui­t, « Bleu, un disque de variété pop française » aura « de bons retours. On m’en parle encore aujourd’hui. J’en ai peut-être vendu un millier » . Francis Vial avoue sans détour qu’il aurait bien voulu vivre de ses « compos » . « Je suis monté à Paris, j’ai laissé des cassettes chez les producteur­s. Pour rien, mais j’ai gardé le conseil de l’un d’entre-eux : simplicité égale efficacité. » Le Dinannais qui produit d’autres artistes dans son home studio 24 pistes numériques bien équipé en a pris de la graine. « J’adore enregistre­r et faire les arrangemen­ts. » C’est ainsi qu’il met sa patte sur les morceaux qu’il « s’approprie » . Et qu’il faut parfois laisser mûrir. « J’ai attendu 5 ans pour faire U2. Un flash : boîte à rythme plus piano Rhodes saturé. » Et monter la voix comme Bono. Le chanteur a une large palette qui va de la voix grave de Paolo Conte à celle, haut perchée, de Polnareff pour Marylou. Et dans tout cela, il peut vous balancer un Highway to hell d’AC/ DC avec un solo échappé de sa guitare acoustique branchée sur une distorsion.

Un répertoire de cent chansons

La chanson peut aussi évoluer au fil des années : « Au départ, je jouais l’Armstrong de Nougaro de façon trop bateau. » Francis Vial, qui dispose d’un stock de cent chansons en permanence, en a peut-être réinterpré­té trois fois plus dans sa vie. Au point de s’éloigner de ses compositio­ns : « Cela m’a coupé l’inspiratio­n alors que je pensais que ça m’aurait aidé. » Mais n’y voyez aucun regret, Francis Vial ne vit pas la musique par procuratio­n. Elle le fera toujours vibrer : sur le devant de la scène dans un café-concert ou dans le brouhaha d’un vin d’honneur, quand il n’est plus qu’une ambiance, un bruit de fond.

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Francis Vial dans son home studio.

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