Laurent Guitton lève un mystère à Dinan
Trois églises bretonnes ont été ornées de sculptures des 7 pêchés capitaux dévorant un homme. Ce Dinannais d’origine, docteur en histoire, a trouvé le lien qui les unit.
« La malédiction des sept péchés » .
C’est le titre du ’polar iconographique’ que Laurent Guitton publie. Un titre à la Dan Brown mais aucune fiction dans le récit de l’auteur. Il s’appuie sur des recherches historiques même si le ton procède de l’enquête policière.
Trois sculptures mystérieuses.
Il y a trente ans, alors qu’il est guide, l’été, à Dinan, tout en suivant ses études d’histoire, Laurent Guitton avait été intrigué par une sculpture médiévale, sur la chapelle axiale de l’église Saint-Malo. Elle représente les 7 pêchés capitaux dévorant un homme. Deux semblables sont connues en Bretagne. Pourquoi ? Qui en sont les commanditaires ? Des années plus tard, il se penche sur cette énigme qui devait au départ, constituer un simple article d’historien et va se transformer en thèse de doctorat (1). 900 pages plus tard, le chercheur démontre dans son livre qu’elles sont liées les unes aux autres.
De Batz à Dinan.
D’après lui, la première sculpture réalisée, à Batz-sur-Mer, vers 1460, a eu pour commanditaire Marguerite de Bretagne (ou sa mère) qui fait représenter, son mari, François II, nu en enfer, torturé par les 7 pêchés, parce qu’il la trompe aux yeux de tous. S’agit-il d’un maléfice ou d’un appel à la confession, fait à son époux ? À Saint-Léry, près de Ploërmel, en 1480, le même thème est repris. Rebelote (avec des nuances) à Dinan où entre en scène Jean II de Rohan qui commande la ville fortifiée. À chaque fois, ces représentations des 7 pêchés semblent destinées à diffamer quelqu’un. La solution de l’énigme est, bien sûr à découvrir dans l’ouvrage de Laurent Guitton.
Formidable terrain de jeux.
C’est ainsi que Laurent Guitton définit la ville de Dinan où il a passé sa scolarité au collège Vercel puis au lycée de la Fontaine des Eaux. « On y faisait les 400 coups. J’habitais Plumaudan et prenais le car tous les jours. J’y reviens deux ou trois fois par an pour ma famille, mes recherches et le plaisir de parcourir la ville. »
Dinan et l’histoire.
« Les remparts, les églises, les vieilles rues de Dinan, forcément ça laisse des traces. J’ai également été marqué par mon professeur d’histoire de terminale, Monsieur Carlo. Ses cours étaient spectaculaires et passionnants. Cependant, c’est surtout en université, à Rennes, en 3e année (licence) que je me suis vraiment intéressé à la Bretagne médiévale. »
Enseignant. « J’habite aujourd’hui à Montpellier et enseigne l’histoire à Nîmes. Il ne me semble pas que les élèves soient plus difficiles ou moins polis que ceux que nous étions. À leur âge, nous étions insouciants. Ils n’ont pas cette chance et vivent sous la pression d’une réussite impérative voulue par les parents et la société. En revanche, ils ont un truc greffé en permanence dans la main. Vous voyez de quoi je parle ! »
Archives disparues.
« Mathurin Monier est une référence avec son livre, Dinan mille ans d’histoire. Il a eu accès à des archives qui auraient disparu, depuis, lors d’un incendie de la sacristie à l’église Saint-Malo. C’est un secret de polichinelle mais c’est très frustrant. »
Un mythe dinannais.
« Il a souvent été dit que la rue Chauffe-pieds (près de la basilique Saint-Sauveur) s’appelait autrefois rue Chauffe-cons. En réalité, ces deux rues ont coexisté. Et la rue Chauffe-cons s’appelait ainsi du fait de la présence d’une cheminée sur la place voisine. Aucun rapport avec un lieu de prostitution, le quartier était habité par des prêtres » , affirme Laurent Guitton qui fera sûrement des sceptiques chez ceux qui défendent l’autre thèse.
Projets. Fin 2019, Le Pays de Dinan publiera un article qu’il a consacré à un viol commis au XVe siècle par un noble de Saint-Judoce sur une jeune fille. Une affaire jugée par le conseil ducal de Nantes. Laurent Guitton aimerait écrire un livre sur l’histoire de Dinan sous le règne des Montfort, l’occasion d’évoquer au passage Du Guesclin et Anne de Bretagne.