Jojo, sa vie sur l’eau
Georges Guiguen participera pour la première fois à la Route du Rhum en 2018. Le skipper de Saint-Cast n’y avait jamais vraiment songé jusqu’alors.
Le teint est hâlé, le regard bleu turquoise, les cheveux milongs bouclés. Une vraie gueule de marin. Georges Guiguen rentre tout juste de la Martinique. Il n’y a passé que deux jours après un mois en mer pour y convoyer l’un de ses bateaux, un 50 pieds, qui servira, durant tout l’hiver, pour des croisières sur les eaux chaudes des Antilles.
Des traversées de l’Atlantique comme celle-là, Jojo, comme tout le monde l’appelle sur les pontons de Saint-Cast, son port d’attache, en compte une bonne trentaine, « le plus souvent en équipage, mais quatre ou cinq fois en solitaire », précise-t-il. Toujours pour le boulot, jamais en course. Un manque qu’il va combler l’année prochaine en participant pour la première fois à la Route du Rhum, dont il s’agira de la 40e édition.
Une association pour le soutenir
Il n’y avait jamais vraiment songé, jusqu’alors. Bizarrement, pour le vieux voileux qu’il est, qui voyait la flotte du Rhum longer la Côte d’Emeraude pour virer autour de la bouée du Cap Fréhel. « Le déclic, c’est quand mon vieux copain d’école, Rémy Hervé, est parti à vélo faire son tour de Gaule en longeant les frontières françaises au plus près. Il l’a fait au bénéfice de la lutte contre le cancer. J’ai pensé qu’à mon tour, je devais relever un défi, avec un objectif solidaire. Pour ma part, ce sera en faveur de l’association Kangourou qui oeuvre pour les enfants malades de l’hôpital de Saint- Brieuc. »
Rapidement, autour de ce projet, s’est constituée une association, « impulsée par François Hamon, qui en est le président, et sans laquelle rien n’aurait été possible. C’est un sacré coup de main, je pouvais difficilement être tout seul sur ce projet ». Parce que la course en mer, c’est bien sympa, « mais j’ai aussi mon affaire à faire tourner ».
Jojo Guiguen est le patron sur le port de Saint- Cast de « Nouvelle Vague », centre de formation agréé ( permis bateau moteur, formation voile) et prestataire de services pour des sorties en mer (balade et croisières, location de bateaux). Une entreprise qu’il a créée en 1992, « après des tas de petits boulots à droite et à gauche, mais avec 3 ou 4 mois minimum chaque année en lien avec le bateau, du convoyage, surtout… ».
Le premier Class40
Itinéraire quasi tracé pour l’enfant de Plévenon né voilà 58 ans, fils de marin-pêcheur, qui ne s’est pas éternisé sur les bancs de l’école, qui a préféré passer un CAP de cuisine, mais que la mer a vite rattrapé, « c’est mon élément. »
Le 4 novembre 2018 quand il mettra le cap sur la Guadeloupe au milieu de 100 autres bateaux au départ de la Route du Rhum, Georges Guiguen ne sera pas le doyen des skippers. Mais son voilier aux couleurs de Saint-Cast-le-Guildo sera le plus vieux dans sa catégorie. Et pour cause puisqu’il s’agit du premier Class40 (12,18 m, soit 40 pieds comme son nom l’indique) jamais construit : « Il avait été conçu chez Jumbo Composites à Trébeurden en 2004 et avait effectué ses premiers bords en course pour la Route du Rhum 2006 avec Thibault Derville à la barre. Je l’avais racheté en 2009 pour proposer des sorties en mer un peu plus sportives. C’est un super bateau. »
Mais depuis, les Class40 ont bien évolué, et il sera compliqué pour le Castin de rivaliser avec les bateaux de nouvelle génération dans cette catégorie. Qu’importe, l’ambition n’est pas de gagner, « mais quand même de bien figurer », rectifie vite Jojo Guiguen, bien décidé «à faire avancer » son voilier.
Il espère réunir un budget de 100 000 €. « Pour les équipements du bateau, notamment de sécurité, c’est 70 000 ou 80 000 euros, et ceux-là, on n’est pas loin de les avoir. Et le rab, ce sera pour l’association Kangourou. Parce que dans l’histoire, on est tous bénévoles. » La ville de Saint-Cast s’engagera financièrement. Pour Dinan Agglomération, il faut encore attendre, la communauté d’agglo soutenant déjà deux skippers… malouins.
Au- delà des participations financières, c’est une grande vague de sympathie qui accompagne Jojo Guiguen et l’association « Nouvelle vague 2018 » (*), « on a déjà 350 adhérents, sans compter tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, nous filent un coup de main ». Y compris à la préparation du bateau, actuellement au sec au Guildo. Et que Jojo compte bien remettre à l’eau à la fin du mois de mars. Les enfants des écoles du coin ne seront pas les derniers à en profiter…